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Hamdi considéra la chute de l’Union soviétique comme une défaite personnelle. Auparavant, il n’était pas de gauche. Il se moquait des communistes et les considérait comme la raison de tous les problèmes de l’Egypte. Il les considérait également comme la raison du retard de sa célébrité en tant qu’écrivain ainsi que de nombreux autres romanciers, poètes et dramaturges. Il se rendait aux colloques qui débattaient des oeuvres littéraires et lisait une ou deux pages en tant qu’intervention. Son élégance classique proche des gens, son style et sa langue bien maîtrisés ainsi que sa voix sûre d’elle-même incitaient la salle à écouter ce qu’il disait avec admiration malgré la faiblesse du contenu et l’absence d’idées brillantes. Hamdi avait 55 ans (au début des années 1990 du siècle passé). Il s’était marié deux fois et avait échoué. On disait qu’il était si avare qu’il avait divorcé sa deuxième épouse car il était revenu un soir et avait trouvé la lumière allumée alors qu’elle dormait. Il était aisé et avait une insertion professionnelle en tant qu’avocat dans une société de produits médicaux que possédait l’Etat.
Il avait une voiture avec chauffeur à sa disposition. Il sentit un réel danger après l’accession de d’Eltsine au pouvoir à Moscou. Il écrivit un violent article, le premier du genre, où il attaquait ceux qui avaient salué les nouveaux changements là-bas. Il devint un personnage désiré dans toutes les occasions qui ne l’acceptaient pas auparavant. Il devint de plus en plus plein de ferveur dans les débats. Il ne fumait et ne buvait pas non plus. On ne l’aperçut pas en train de manger en dehors de chez lui. Lors d’un colloque à l’atelier du Caire en 1992, Doaa admira ses propos et lui demanda de lui parler de l’avenir du capitalisme mondial après la chute de l’Union soviétique. Il se sentit aussi important qu’Ismaïl Sabri Abdallah et que Fouad Morsi. Il sortit ce jour-là heureux de lui-même et il lui donna rendez-vous après une semaine. Il lut durant ce temps ce qu’il fallait pour qu’il puisse en parler. Doaa était proche de la trentaine. Au début, elle lui raconta son histoire et son séjour avec son mari au Brésil. Elle découvrit que son mari avait livré ses compagnons révolutionnaires aux services secrets. Elle l’informa également qu’elle avait perdu sa fortune là-bas et qu’il lui était défendu de voir son fils, Sélim.
Et elle sanglota. Il lui tapota le dos et se baissa vers elle tout ému. Elle lui demanda de rendre le sujet international car elle ne voulait pas baisser les bras après que les affaires étrangères l’avaient délaissée. Hamdi crut ses propos et il considéra son procès comme le sien surtout après qu’il apprit que sa fortune se chiffrait en millions. Durant les années 1992 et 1993, ils ne se séparèrent pas. Ils buvaient la bière à partir de 6 heures et changeaient les endroits où ils s’installaient. Elle était bien en chair de manière agréable et une certaine nostalgie couvrait ses traits réguliers. Lui se départit de sa retenue et se fit teindre les cheveux. Elle était apparue dans la vie subitement et personne ne savait rien d’elle, ni où elle habitait. Elle avait dit qu’elle était d’Alexandrie et qu’elle ne voulait pas que sa famille sache qu’elle n’avait pas réussi. Ses parents étaient contre « ce mariage et toutes ses retombées négatives » On disait qu’elle avait de manières obscures réussi à s’approprier tout l’argent qu’il avait mis de côté. Puis elle disparut complètement. Il se métamorphosa lui en une autre personne. Il portait d’étranges vêtements, ne se rasait pas régulièrement et balbutiait des propos incompréhensibles en marchant. Il ne parlait à personne bien qu’il se trouvât dans les mêmes endroits, entouré des mêmes personnes qu’il connaissait. Toutefois, il devenait violent avec les personnes qui se moquaient de lui. Puis il disparut complètement depuis le milieu des années 1990. Nombreuses personnes crurent à sa mort. Cependant, il réapparut vêtu d’une djellaba blanche avec sa barbe blanche hirsute priant derrière le cercueil de Naguib Mahfouz à la mosquée d’Al-Hussein en 2006. Et lorsque l’Egypte gagna la coupe d’Afrique en 2008 au Ghana, l’année où Drogba avait trouvé une nouvelle manière de fêter un but, comme les rois vainqueurs. On aperçut Hamdi très élégant, portant le drapeau de l’Egypte sur le pont Qasr Al-Nil à une 1h30. Il était heureux et il imitait Drogba après avoir atteint un but.
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Quelques histoires limitées s’étaient rassemblées au cours des ans pour lier le peintre et le traducteur. Le premier était un grand artiste réussi sans s’appuyer durant sa vie sur un pouvoir quelconque. Il vivait entre ses pinceaux et ses couleurs. Le traducteur était un homme posé. Il était préoccupé par ses vêtements « venus de l’étranger » et de son image devant les autres plus qu’il ne fallait. Ils se rencontraient dans l’atelier de l’artiste à Zamalek une fois par semaine « en l’occurrence le mercredi ». Le traducteur aimait la médisance et l’apportait toute fraîche à son ami qu’il connaissait depuis la fin des années 1950. Il était d’une grande famille du Fayoum. Il ne cessait d’en parler, de ceci et de ses exploits devant n’importe qui à tout moment. Il parlait beaucoup de son père qui était un officier dans la garde royale. Il gardait des histoires de son enfance qui n’étonnait personne. Personne ne se rendait chez le peintre que sur un rendez-vous préalable et de manière générale il ne rencontrait jamais deux personnes à la fois. Le traducteur avec l’avancée en âge montra sa haine pour tout le monde. Il voyait qu’il avait été choisi au ministère de la Culture, mais que ses amis communistes l’avaient trahi. Il parlait de pourparlers qui avaient eu lieu avec de responsables importants dans les années 1970. Le peintre était aux anges lorsqu’il parlait de poésies, de cinéma, de théâtre et de romans. Il voulait connaître le monde sincèrement.
Le traducteur perdit ses moyens de communication avec tous ses amis, car il considéra qu’ils l’avaient laissé tomber. Mais il resta fidèle « au café brésilien » à la rue Soliman Pacha à 8h. Il ne lisait que le quotidien Al-Ahram et n’était pas convaincu par les autres journaux. Sa brutalité apparaissait dans toute sa splendeur lorsqu’une femme était dans les parages. Il devenait agressif et avançait des propos définitifs qui ne supportaient aucune discussion. Le peintre commença à en avoir marre de lui. Surtout depuis qu’il lui avait demandé de dessiner son père sur un cheval en costume militaire avec toutes ses médailles et ses décorations. Le traducteur lui apporta plusieurs photos de son père montant un cheval dans des endroits différents. Le peintre essaya de s’excuser durant 3 années. Le traducteur était prêt à payer n’importe quoi que demanderait le peintre. Dans les rendez-vous quotidiens entre eux, le traducteur n’était plus seul dans l’atelier. Les admirateurs du peintre et ses élèves étaient présents et ils occupaient l’espace comme s’ils étaient chez eux. Le traducteur devint plus violent et se sentait seul. Une des peintres essaya de « l’avoir » surtout après qu’elle apprit que ses goûts étaient anciens et qu’il ne connaissait rien à la révolution qui avait eu lieu dans la poésie égyptienne au début des années 1990. Elle l’affrontait en minaudant et il devenait écarlate et embarrassé. A cause d’elle, il recommença à fumer. Le peintre regardait le spectacle. A chaque fois en partant le peintre lui parlait des traits difficiles de son père et qu’il lui fallait un délai supplémentaire. Le traducteur lui disait : « Il n’est pas vrai que tous les traits des Turcs se ressemblent ». Le peintre confirmait ces dires. Un de ces jours le traducteur alla à l’atelier alors que le grand peintre avait des invités d’Amérique. Ils étaient venus pour lui organiser une exposition à New York.
Ils étaient 3 hommes et 2 femmes. Il le présenta et parla de leur amitié et de leur histoire. Le traducteur les traita en tant qu’espions et il parla de manière brutale avec eux. Le peintre le tira par la main et lui parla. Deux jours plus tard, il lui téléphona. C’était la première fois qu’il lui parlait à la maison. Il lui dit qu’il avait peint son père et qu’il ne voulait pas d’argent. Avant de lui montrer la planche, il l’insulta à voix basse à cause de ce qu’il avait dit à ses invités. Le traducteur souriait avec dans les yeux un éclat dans une attente enfantine. Lorsque le peintre sortit le tableau et le posa sur le mur. Le traducteur pleura à chaudes larmes. Il lui dit : « Qu’as-tu fait de mon père ? ». Le peintre alluma un cigare, versa un verre et regarda les voitures dans la rue. Tout ce qu’il avait fait c’était qu’il avait peint son père avec son costume, mais il avait remplacé le cheval par un cheval en bois pour enfant. Le traducteur sortit triste. Le fil se coupa entre eux. Et lorsque le peintre mourut, son ami n’assista pas … aux funérailles.
Ibrahim Daoud
Né en 1961 à Ménoufiya. Après un diplôme en commerce de l’Université de Tanta (Delta) en 1983, il s’est lancé dans le travail journalistique dans nombre de journaux avant de se spécialiser dans la presse culturelle dans Al-Watan du Koweït, Al-Hélal, puis actuellement le quotidien Al-Ahram. Il a commencé à écrire des poèmes depuis son jeune âge avant de faire partie des défenseurs acharnés du poème en prose depuis 1988. Parmi environ 10 recueils de poèmes en prose, l’on cite Tafassil (détails) en 1989, Matar khafif fil khareg (pluie fine à l’extérieur) en 1993, Halet machi (état d’errance) en 2007, toujours chez le même éditeur Merit. Il vient de recevoir au début du mois, le prix Sawirès 2012 pour le meilleur recueil de nouvelles pour Al-Gawo al-aam (l’ambiance générale), aux éditions Merit 2012.
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