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Radwa Achour, la grande militante

Mardi, 09 décembre 2014

Académicienne et militante de la cause palestinienne, l'écrivaine Radwa Achour est décédée le 30 novembre dernier à l'âge de 68 ans. Son amie de longue date, Amina Rachid, professeur de littérature française et comparée à l’Université du Caire, lui rend dans ces lignes un vibrant hommage.

Radwa Achour, la grande militante

Radwa n’est pas une amie d’enfance. J’ai fait sa connaissance il y a près de 30 ans. C’était dans un hôpital, je ne sais plus lequel. Elle venait de subir une ablation du sein. Un cancer déjà ! J’étais avec Latifa Al-Zayat. Nous sortions d’une réu­nion de notre Comité de Défense de la Culture Nationale (CDCN), créé à l’issue des accords de Camp David en signe de protestation. J’étais très émue par cette jeune femme, allongée dans ce lit, si belle et apparemment sereine.

Nous nous sommes retrouvées sou­vent au CDCN ou dans l’une de nos universités, Aïn-Chams, où elle ensei­gnait au département d’anglais, et l’Université du Caire où j’enseigne la littérature française. Nous étions toutes deux comparatistes et nous nous retrouvions à l’occasion de conférences ou de soutenances de thèse. Une estime réciproque nous unissait, une complicité parfois, et progressivement une amitié s’est construite qui devait durer.

J’ai lu tout ce qu’elle a écrit, pour le plaisir ou pour répondre à une demande : présenter Pierre chaude à l’Atelier ou écrire sur Farag pour une revue sur le roman. J'ai découvert son sens de l’histoire ancienne dans sa belle trilogie de Grenade ou l’histoire moderne dans Atyaf, Farag, Un Morceau d’Europe. J’ai découvert aussi son profond amour de l’humanité, celle des humbles surtout, ainsi que son refus de l’injustice et de l’oppression. Progressivement s’affirmaient son sens de l’humanité et son talent d’écrivaine, à travers ses derniers chefs-d’oeuvre, Al-Tantouriya ou Plus lourd que Radwa.

On me dit que Radwa ne nous a pas quittés, qu’elle restera dans ses oeuvres, à travers sa petite famille, les poètes Mourid et Tamim Al-Barghouti, et les étudiants qui poursuivront son oeuvre, ce don qu’est notre métier d’enseignant, les jeunes qui l’ont aimée … Mais je regrette sa présence physique, son regard et ses paroles, et je la regretterai longtemps.

L’écrivaine en quelques lignes

Radwa est née le 26 mai 1946 et décédée le 30 novembre 2014 après une lutte contre un can­cer du cerveau qui a duré quatre ans. Elle était pro­fesseur de littérature anglaise à l’Université de Aïn-Chams, spécialisée en critique littéraire afro-américaine, mais elle est surtout connue comme écrivaine. Avec son mari, le poète palestinien Mourid Barghouti, et son fils Tamim Barghouti, poète, elle formait le centre d’un trio littéraire uni et de qualité. Elle a publié plusieurs romans, dont une trilogie histo­rique, Grenade (première partie, Dar Al-Hilal, 1995) puis Maryama Wal Rahil (Maryama sur le départ, en deux parties, Dar Al-Hilal, 1995). Elle est également l’auteur d’autres romans, dont Hadjar Dafië (pierre tiède, Dar Al-Moustaqbal, 1985), Khadidja wa Sawsan (Khadidja et Sawsan, Dar Al-Hilal, 1987). Qittaa min Europa (un bout d’Eu­rope, Al-Markaz Al-Thaqafi Al-Arabi et Al-Shorouk 2003) s’intéresse au Caire du khédive Ismaïl. Il y a eu aussi Farag en 2008, Tantouriya en 2010, puis Athqal men Radwa (plus lourd que Radwa, fragments d’une autobio­graphie) en 2013 chez le même éditeur, Al-Shorouk. Elle est également connue pour son engage­ment politique aux côtés des Palestiniens entre autres, mais aussi en tant que membre du mouve­ment du 9 Mars qui revendiquait l’indépen­dance des universités égyptiennes .

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