Beaucoup de membres des Frères musulmans ont rompu avec la confrérie au cours des 3 dernières années. Parmi eux, des dirigeants de la confrérie qui ont dévoilé les raisons politiques de leur départ, tel Sarwat Al-Kherbawi, qui a publié deux ouvrages pertinents basés sur son expérience avec la confrérie : Au coeur des Frères musulmans et Le secret du temple.
L’intérêt du livre de Sameh Eid, Qissati maa al-ikhwan, réside dans le fait que son auteur ne fait pas partie des dirigeants du groupe. A Damanhour, ville provinciale du Delta du Nil, il nous montre comment les Frères travaillent dans les villages isolés, les écoles, les mosquées et les lieux de prière.
Eid a rejoint les Frères lorsqu’il était jeune garçon. Ce n’est que pendant ses années d’université qu’il commence à critiquer la confrérie, en particulier ses dirigeants. Un tournant intervient lorsqu’il est convoqué un jour pour une interrogation interne et est obligé de mettre fin à ses contacts avec un autre membre de la confrérie. C’est comme s’il s’était réveillé d’une grande illusion. Il commence à s’interroger sur l’absence de critique au sein du groupe, de même que sur la soumission totale aux cadres supérieurs. Mais il ne démissionne pas encore.
Après l’université, il obtient, avec l’aide des Frères musulmans, un travail de professeur dans une école au Yémen. La confrérie cherchait alors à surveiller les détails les plus intimes de son comportement personnel. Sa relation avec son colocataire a été par exemple l’objet de plusieurs interrogatoires.
« Choqué », comme il dit, il rentre en Egypte. Les choses changent lorsqu’il démissionne du groupe en 2000 et adhère à Al-Wassat, un parti islamiste qui correspond mieux à ses convictions à cette époque. Pourtant, il découvre plus tard qu’il n’existe pas de différences fondamentales entre Al-Wassat et les Frères musulmans, il démissionne en 2012.
Ce sont les grandes lignes de l’engagement de Sameh Eid qu’il relate dans son livre avec parfois de petits détails sur, par exemple, la discrimination au sein de la confrérie, sur les coutumes de mariage et la distinction basée sur le sexe au sein d’une même famille. Ce sont ces détails qui dévoilent l’histoire profonde de sa vie.
Quant à son style d’écriture, il écrit comme il parle, ce qui signifie qu’il ne s’intéresse trop ni à la syntaxe, ni à la grammaire. Son style est un mélange d’arabe dialectal et classique. Cette écriture, qui manque de discipline, l’empêche souvent de transmettre ses idées. Il se focalise sur son sujet principal, à savoir les origines des Frères, sans se soucier des théories et des idées politiques. Ce qui l’intéresse ce sont les sentiments et les réactions en général. C’est l’histoire d’un homme ordinaire, un parmi des milliers de Frères, qui passe inaperçu l
Qissati maa al-ikhwan de Sameh Eid, Dar Al-Mahroussa, Le Caire 2014.
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