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Amy Mowafi et Dalia Awad : Contrairement à d’autres journaux, on pense d’abord aux lecteurs.

Alban de Ménonville, Mardi, 01 avril 2014

Toujours avec le lecteur en ligne de mire, la fondatrice de CairoScene, Amy Mowafi, et la rédactrice en chef, Dalia Awad, expliquent quel équilibre est nécessaire entre véritable journalisme et contenus alléchants. Pour elles, il s’agit à la fois de diversifier les publications et d’être économiquement indépendant.

Dalia Awad
Dalia Awad

Al-ahram hebdo : En deux mots, d’où est parti CairoScene ?

Dalia Awad : En 2010, ce n’était qu’un simple calendrier online avec les diverses activités qui se déroulaient au Caire. C’est devenu un blog puis un site Web plus complet avec davantage de rubriques. Aujourd’hui, on est une douzaine à s’occuper du site.

Amy Mowafi : Ce qu’on voulait c’était combler le manque. Au Caire, la scène journalistique n’était pas diversifiée. Il n’y avait aucune publication qui ciblait la tranche d’âge allant de 20 à 30 ans. On est les premiers du genre : à la fois politique, économique, social, mais aussi mode, événements cool … Beaucoup de choses se passent au Caire (festivals, soirées, concerts …) sans que ces activités soient correctement relayées. Nous, on le fait comme on le sent, sans restriction.

— Justement, certaines de vos publications sont assez provocatrices …

Amy Mowafi : On ne cherche pas à provoquer, mais s’il y a quelque chose à raconter, on le fait sans peur de choquer.

Dalia Awad : Parfois, on essaye cependant de ne pas aller trop loin. Mais à partir du moment où on n’offense personne, on estime qu’on ne dépasse pas les limites.

— Etes-vous soumis, comme c’est le cas dans une partie de la presse, à des pressions ?

Dalia Awad : On essaye toujours de faire la part des choses, de prendre les deux points de vue. Le fait qu’on soit en anglais nous permet aussi d’aller plus loin, d’avoir plus de liberté et de ne pas être soumis à ces pressions que vous évoquez.

CairoScene est une publication gratuite : pas de version papier, pas d’abonnement payant. Vous vous basez donc uniquement sur les pubs pour être rentable …

Amy Mowafi : Beaucoup de publications sur le Web ont une vision trop idéale du journalisme. Il ne souhaite qu’écrire des articles profonds, des analyses aussi parfaites que possible d’un point de vue journalistique. Du coup, elles ferment rapidement faute de rentrées financières. Ce qu’on cherche à CairoScene c’est avoir un équilibre entre le journalisme et le profit. Sans profit, il n’y a plus de journalisme. Ici, on ne se sacrifie pas aux publicitaires, mais on s’y conforme. Et grâce aux rentrées de la pub, nous sommes capables de produire des articles de qualité. Aujourd’hui, on a une indépendance financière qui nous permet d’être libres.

— Quelle est votre ligne éditoriale ?

Dalia Awad : On se concentre sur ce qui se passe localement dans le but d’attirer l’attention d’ailleurs. Quand un de nos articles, comme celui sur les pires pas de danse égyptienne, est remarqué et en partie repris par le New York Times, cela prouve qu’on parvient à trouver un écho international à un événement cairote. Notre équipe est d’ailleurs très internationale : on trouve beaucoup d’Egyptiens qui reviennent d’un peu partout, Europe, Canada … Même si l’Egypte est spéciale, on s’inspire de ce qui se fait ailleurs pour présenter une diversité de visions. Et ce, pour l’instant au moins, les lecteurs semblent apprécier.

— Vos articles ne sont publiés que sur Internet. Quelle importance accordez-vous aux réseaux sociaux ?

Dalia Awad : D’abord, on considère les réseaux sociaux comme notre communauté de lecteurs. Pour chaque sujet on se demande : de quelle manière aura-t-on le plus d’impact ? Ensuite, il faut une synergie entre le responsable des réseaux sociaux et les journalistes. Les articles un peu provocateurs marchent très bien sur la toile. Enfin, on considère toujours les commentaires comme quelque chose d’appréciable, qu’ils soient positifs ou négatifs.

Amy Mowafi : Contrairement à d’autres journaux, on pense toujours au lecteur. On cherche à éveiller sa curiosité, à lui présenter des points de vue alternatifs, mais aussi on lui donne ce qu’il cherche et qu’il ne trouve pas au Caire : un contenu en constante évolution qui fait un équilibre entre des articles de fond, parfois complexes, et des choses plus légères — on parle de sexe, de drogue, de scènes underground … pour rassembler un contenu divers et varié tout en gardant notre identité.

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