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Méditerranée, le centre-ville de la planète

Rasha Hanafy, Lundi, 08 avril 2019

Les Rencontres Ecrire la Méditerranée ont eu lieu à Alexandrie du 7 au 10 avril, mettant l’accent sur la grande diversité de cette région à travers le thème des saveurs et de la gastronomie. Le 11 avril, une soirée spéciale est prévue au Caire, avec la participation de plusieurs écrivains et intellectuels des quatre coins de la Mare Nostrum.

Méditerranée, le centre-ville de la planète
Café littéraire d’ouverture des Rencontres au bistro Le Boudoir, à l’IFE d’Alexandrie.

Pour la huitième édition des Rencontres Ecrire la Méditerranée, les organi­sateurs ont choisi le thème Saveurs méditerranéennes. Les par­tenaires de cet événement, à savoirl’Institut Français d’Egypte (IFE), le Centre méditerranéen de littérature, la Bibliothèque d’Alexan­drie et l’Université Senghor, enten­daient « célébrer les saveurs d’une Méditerranée que l’actualité de ces dernières années nous a habitués à considérer sous une lumière plus sinistre. Il était temps de rappeler, en effet, que l’espace méditerranéen est resté par-delà la tragédie le lieu d’élection de la sensualité et d’une infinie diversité de goûts et de cou­leurs ». C’est ce que tous les invités ont souligné à l’ouverture de la manifestation culturelle, le 7 avril, à l’IFE d’Alexandrie.

Les Rencontres 2019 ont lieu dans le cadre de l’année culturelle France-Egypte. A travers de nom­breuses activités culturelles — ate­liers culturels et gastronomiques, exposition de photographies par Bruno Boudjelal, exposition de tapisseries par le centre d’art de Wissa Wassef, cafés littéraires, ren­contres d’auteurs dans les lycées d’Alexandrie, spectacles artistiques et tables rondes—, les organisa­teurs ont voulu souligner l’infinie diversité des richesses de l’espace méditerranéen. Une diversité qui invite à continuer à vivre malgré les drames et le sang qui coule dans cette région du monde. « L’actualité, notamment politique, en Méditerranée est marquée par les violences, les difficultés et les situa­tions de misère. On s’est dit que c’était important de changer la per­ception sur cet espace en ce moment. On a voulu revenir avec quelque chose de plus réjouissant, que sont les saveurs de manière générale, et notamment la gastro­nomie. On essaie de donner des perspectives plus optimistes et de trouver une part de bonheur malgré tout ce qui se passe », explique Thierry Perret, directeur de l’Insti­tut français à Alexandrie.

Des intellectuels de renommée internationale ont été invités à cette édition, parmi lesquels Farouk Mardem-Bey, éditeur et historien franco-syrien, directeur de la col­lection Sindbad aux éditions Actes Sud, Gilles Gauthier, ancien diplo­mate, traducteur et actuel conseiller à l’Institut du Monde Arabe (IMA), Valérie Manteau, auteure, éditrice et journaliste française, lauréate du prix Renaudot 2018 pour son roman Le Sillon, In Koli Jean Bofane, romancier et éditeur kino-congolais vivant en Belgique, lauréat du prix des cinq continents de la Francophonie 2015 pour son roman Congo Inc., le testament de Bismarck, et Yahia Belaskri, roman­cier, nouvelliste, essayiste et ancien journaliste franco-algérien. Noha Baz, médecin-pédiatre et spécialiste de la gastronomie, a animé des ate­liers et des démonstrations de cui­sine et d’alliage de goûts entre toutes les cultures méditerra­néennes. L’occasion, pour les invi­tés, d’aborder différemment le thème de la Méditerranée.

Une mer plurielle

Les habitants de la Méditerranée intègrent de multiples dimensions religieuses, idéologiques, régio­nales et nationales. C’est cette richesse d’identités qui pimente les saveurs de cette région. « Je suis pour les identités plurielles. Depuis longtemps, cette région a vécu sous des empires. C’étaient des ensembles multiculturels, multicon­fessionnels et multiethniques. Cette multiplicité d’identités est très importante. Si on insiste sur une seule dimension, cela aboutit à des massacres. L’identité méditerra­néenne doit être conçue de cette façon. Elle n’est pas contre l’ara­bité, au contraire, les deux se com­plètent. L’alimentation en est un exemple. Un seul plat peut être pré­paré différemment par plusieurs cuisines méditerranéennes », assure Farouk Mardam-Bey, qui a publié La cuisine de Ziryab et Traité du pois chiche, chez Actes Sud, un voyage gastronomique et historique autour de la Méditerranée composé de citations littéraires, de références savantes, de recettes gourmandes et d’anecdotes.

Pour André Bonet, président du Centre méditerranéen de littérature à Perpignan, « quand on évoque les saveurs, on pense à la Méditerranée, bassin qui nous réunit et qui est considéré comme le centre-ville de la planète ».

Ce qui fascine dans la Méditerranée, c’est la capacité de ses habitants à garder l’espoir de vivre, malgré tout. « Les saveurs de la Méditerranée, c’est la rencontre entre les êtres de cette région. Mais c’est aussi la tragédie humaine. Le bassin méditerranéen a vu le déclin et l’épanouissement de nombreux empires: grec, romain, égyptien et arabo-musulman. La richesse de cette région consiste en cette possi­bilité de se régénérer. Au moment où l’on croit qu’elle est morte, elle revient plus forte et plus belle. On parle de la Méditerranée comme d’un cimetière, mais c’est un espace de vie fabuleux, c’est la vie vibrante et enthousiaste », souligne Yahia Belaskri, qui a signé plusieurs contributions sur les relations entre la France et l’Algérie, l’immigra­tion et le dialogue des cultures en Méditerranée.

Le 11 avril à 18h, deux tables rondes se tiennent à l’IFE de Mounira, au Caire, avec la partici­pation des deux romanciers égyp­tiens Mohamad Rabie et Mohamad Abdel-Nabi, dont les romans vien­nent de paraître en français chez Actes Sud, ainsi qu’avec Alexis Jenni, Jean Bofane et Valérie Manteau.

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