La distribution de prix à l'Opéra du Caire.
Lancé il y a 14 ans, le prix littéraire Sawirès est devenu un rendezvous culturel incontournable. Vendredi 25 janvier, le hall principal de l’Opéra du Caire a reçu quelque 1 300 invités, venus tous assister à la cérémonie de distribution des prix récompensant les meilleurs romanciers, auteurs de nouvelles, scénaristes et dramaturges, et ce, dans deux catégories : talents prometteurs et auteurs confirmés. « Je suis très heureuse d’avoir reçu le prix du roman pour mon oeuvre Misk Al- Tall (le musc de la colline), ex aequo avec la ravissante Nadia Kamel avec son oeuvre Al-Mawlouda (la nouveaunée). Nous sommes les héritières de toutes ces femmes qui ont livré des combats il y a 100 ans, afin de paver le terrain pour d’autres femmes créatrices », a déclaré l’écrivaine et académicienne Sahar Al-Mougy. Le roman primé de cette dernière reprend trois personnages mythiques de la littérature universelle, formant une galerie intéressante de portraits qui cohabitent ensemble dans une autre vie. Ainsi, Amina, la femme au foyer et mère débonnaire de la trilogie de Naguib Mahfouz, rencontre Virginia Woolf, la rebelle, et Catherine Earnshaw, protagoniste principale de Wuthering Heights d’Emélie Brontë. Et à Sahar Al-Mougy d’ajouter : « Quand j’écris, je ne pense jamais aux prix. Mais j’apprécie l’idée que l’un de mes livres parvienne à amener les lecteurs à s’interroger sur leur vie. En revanche, lorsque je reçois un prix, je sens que l’on me tapote l’épaule pour m’encourager à aller de l’avant. Je comprends également que le roman sera lu par plus de lecteurs et atteindra une plus grande partie de la population, tout en les incitant à mettre leurs choix en question. Car Misk Al-Tall parle des choix que l’on fait et du sens de la vie ».
Un premier ouvrage primé
La réalisatrice Nadia Kamel a, elle, été récompensée pour son premier ouvrage, Al-Mawlouda (la nouveaunée), qui s’inspire de l’histoire de ses parents, notamment de sa mère, une juive d’Egypte de mère italienne qui a épousé un journaliste de gauche. L’auteure raconte, à travers le parcours de ses parents-militants, l’Egypte du début du siècle dernier, un pays plus cosmopolite et pluriel, qui ne ressemble guère à celui de nos jours. La principale narratrice est sa mère, Mary Ely Rosenthal, qui figurait également dans le film de Kamel réalisé il y a quelques années Salata Baladi (salade verte). Celui-ci avait provoqué un vif débat lors de sa projection et la réalisatrice s’était vue accusée d’appeler à la normalisation avec Israël. En effet, une partie de la famille de sa mère est partie vivre dans l’Etat hébreu. Sa mère était allée leur rendre visite après de longues années.
« Mes parents ont passé toute leur vie sans savoir que leur histoire serait racontée de la sorte et bien appréciée par autant de gens », a déclaré Nadia Kamel, née au Caire en 1961 et qui a travaillé comme assistante à la réalisation avec plusieurs metteurs en scène de renom, notamment Youssef Chahine. D’aucuns ont eu du mal à classer son oeuvre Al-Mawlouda, qu’elle décrit elle-même comme suit : « Ce n’est pas une fiction, mais une simple documentation de la vie de mes parents. Je n’ai rien inventé ». N’empêche qu’il s’agit d’un témoignage très poignant de toute une époque qui n’est plus.
Le meilleur recueil de nouvelles de l’année, pour la catégorie écrivain confirmé, est allé à Ahmad Abou-Khneigar, pour son ouvrage Machahed Abéra Li Ragol Wahid (des scènes frivoles dans la vie d’un homme seul). Il s’agit du deuxième prix Sawirès remporté par Abou- Khneiguer, qui avait déjà reçu le prix du meilleur roman en 2006. Le jeune Mohamad Al-Haj, également cinéaste, a, quant à lui, reçu le prix du meilleur recueil de nouvelles pour son ouvrage La Ahad Yorsi Qétat Al-Madina (personne ne plaint les chats de la ville). C’est son premier recueil, mais son film Villa 69 avait eu beaucoup d’échos positifs lors de sa projection. Par ailleurs, Hala Khalil et Wessam Soliman ont reçu, ex aequo, le prix du meilleur scénario cinématographique, respectivement pour leurs films Salet Al-Mahaba (le hall de l’amour) et Banat Rosa (les filles de Rosa) .
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