L’auteur de l’étude en question, Dr Réda Al-Agouz, observe au début que l’Egypte et la Corée du Sud ont de nombreux points communs. Les deux pays sont en voie de développement et ont connu des violations graves des droits de l’homme au cours de ces dernières années. La Commission nationale des droits de l’homme en Corée du Sud et le Conseil national égyptien pour les droits de l’homme ont été créés à peu près en même temps. L’auteur souligne que la comparaison entre les institutions de défense des droits de l’homme dans les deux pays est importante pour plusieurs raisons.
En premier lieu, la communauté internationale et des organisations internationales majeures, telles que les Nations-Unies, s’intéressent de plus en plus à la problématique des droits de l’homme. En outre, les chartes et les traités internationaux que l’Egypte a signés exigent que les ONG indépendantes de défense des droits de l’homme soient présentes sur son territoire. De telles institutions permettent en effet de limiter le comportement parfois despotique de certains régimes politiques, notamment dans les pays en développement. De plus, ces institutions indépendantes, qui sont présentes dans de nombreux pays, coopèrent tant sur le plan régional qu’international. Elles se consultent ainsi régulièrement pour faire face plus efficacement à leurs problèmes et établir des stratégies coordonnées pour accroître leurs efficacités respectives.
L’étude se concentre sur la période 1995-2015. Cette période est particulière puisque les autorités des deux pays ont dû faire face à l’émergence d’importants mouvements politiques et populaires en ayant recours à la manière forte.
Dans ce contexte, l’étude mesure l’efficacité des institutions des droits de l’homme coréennes et égyptiennes dans l’exercice de leurs trois rôles principaux, à savoir : l’éducation et la sensibilisation, la surveillance et la législation.
Concernant l’éducation et la sensibilisation, les expériences coréennes et égyptiennes sont très différentes. Ainsi, le président sud-coréen a publié un décret ayant force de loi ainsi que des règlements exécutifs exigeant des comptes à de nombreuses institutions. Le ministre de l’Education et le ministre des Ressources humaines ont, quant à eux, convenu de travailler conjointement avec la Commission nationale des droits de l’homme, afin d’intégrer les valeurs et les principes des droits de l’homme dans les programmes scolaires du cycle primaire et dans les concours de la fonction publique.
Absence de coopération
En Egypte, les 14 missions du Conseil national des droits de l’homme sont définies par l’article 3 de la loi qui l’a créé. Dix de ces missions sont liées à l’éducation et à la sensibilisation du public, mais limitent l’action de l’institution. Elle ne peut ainsi qu’exprimer des opinions et soumettre des suggestions ou des recommandations. Aucun fonds spécifique n’a été créé pour permettre son fonctionnement. L’activité du conseil repose donc entièrement sur le financement public de l’Onu et des institutions de l’Union européenne ou encore sur celles, privées, provenant des Etats-Unis et d’Europe. L’étude déplore l’absence de coopération entre les institutions étatiques et le Conseil des droits de l’homme. Elle nous apprend notamment que, par exemple, le ministère de l’Intérieur « ne donne aucune donnée statistique permettant d’évaluer le bien-être des prisonniers et des détenus ». Il n’y a pas non plus d’évaluation de l’enseignement des droits de l’homme au sein de l’Académie de la police. Concernant les tâches législatives des institutions, la loi coréenne impose à la Commission des droits de l’homme et aux autorités concernées de participer au processus législatif de manière détaillée et transparente. Le mandat de la commission lui donne des pouvoirs précis, notamment en matière de contrôle. Les pouvoirs du Conseil national égyptien des droits de l’homme sont, quant à eux, quasi inexistants, puisqu’il ne peut qu’émettre des suggestions et exprimer des opinions. Le Conseil égyptien n’a ainsi qu’un rôle consultatif et privé de véritable efficacité.
Dans ses conclusions, l’étude appelle entre autres à la modification de la loi régissant le conseil et la modification de son règlement. Cette modification devrait aller dans le sens de plus de transparence des autorités vis-à-vis du conseil, en lui permettant par exemple l’accès à l’information et en lui permettant d’enquêter sur les plaintes. L’étude propose également que le Conseil des droits de l’homme ait le droit d’engager des poursuites et de visiter les prisons et les centres de détention afin de vérifier que les normes internationales y sont respectées l
Al-Mouässassat Al-Wataniya Li Hoqouq Al-Insane – Dirassa Mouqarana Li Halatay Misr Wa Korea (les institutions nationales des droits de l’homme – une étude comparative de l’Egypte et de la Corée) par Dr Réda Al-Agouz, Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, 2016.
Lien court: