Al-Ahram Hebdo : Vous avez tou-jours décrit la communauté bédouine du Sinaï, dont vous êtes issu, dans vos oeuvres litté-raires. Avez-vous des projets littéraires notamment après la révolution et la situa-tion qu’a connue le Sinaï ?Mossaad Abou-Fagr : Je dois préciser que j’ai toujours eu recours à l’écriture pour exprimer les aspirations et les voeux de ma communauté. L’écriture était pour moi un moyen de m’exprimer. Je n’ai jamais pensé à écrire pour vendre ou pour être connu. De nos jours, les moyens de communication sont divers. J’utilise actuellement Facebook et Twitter pour exprimer mon opinion sous forme de commentaires. Je ne sens pas le besoin de publier un roman ou une nouvelle, car je dis ce que je pense à travers la Toile.
— Vous êtes également journaliste et vous vous exprimez à travers des articles hebdomadaires, n’est-ce pas ?
— Oui, j’écris un article hebdomadaire dans le quotidien Al-Tahrir. Je tiens à préci-ser que je ne suis pas un chercheur. J’écris sur des sujets qui, d’après moi, intéressent le lecteur. Je me suis exprimé auparavant sur la question du Sinaï et comment cette pénin-sule est menacée sur le plan géographique, car certains plans affirment que la Jordanie va récupérer la Cisjordanie et l’Egypte reprendra la bande de Gaza. J’ai parlé égale-ment du patrimoine culturel de cette région qui est en danger. La négligence touche tous les domaines au Sinaï.
— Dans vos oeuvres, vous avez décrit la société bédouine marginalisée du Sinaï. Que pensez-vous du premier tour du réfé-rendum sur la Constitution ?
— Pour moi, ce référendum n’a aucune valeur. Malgré la négligence de l’Etat, les gens au Sinaï tout comme à Marsa Matrouh, au nord-ouest du Caire ou encore à Sohag, au sud de l’Egypte, ne savent pas dire « non » dans des référendums pareils. Même s’ils souffrent de l’oppression de l’Etat. Sous l’ancien régime, c’était pareil. Les bédouins dans ces régions peuvent boycotter les élections, mais quand ils y participent, ils disent « oui ». Je peux vous assurer qu’ils appellent le gouvernement le petit Dieu ! Raison pour laquelle, les bédouins ne se révoltent pas, ils se mettent en colère. Mais cette colère doit être prise en compte.
— Comment expliquez-vous donc les cas d’assassinat et d’agression contre les policiers et les soldats ?
— Ce ne sont pas les habitants du Sinaï qui tuent les soldats et les policiers, mais ce sont les trafiquants de drogue et les djiha-distes qui ne sont pas originaires de cette région. Ce sont des gangs organisés. Le citoyen du Sinaï bloque les routes pour exprimer sa colère. Le Sinaï souffre de la « culture de pauvreté », et de la « pauvreté culturelle ». Pour éradiquer ce mal, il faut combattre le régime fasciste qui domine le pays. La lutte pour la liberté doit se dérouler au Caire.
— Que pensez-vous de l’avenir de l’Egypte en général et du Sinaï en particu-lier ?
— Je dois dire que le fascisme doit être combattu par la patience. Le peuple égyptien mène une guerre contre le système répressif en Egypte. Les Egyptiens sont convaincus aujourd’hui que les Frères musulmans ne vont résoudre aucun problème ni en Egypte, ni au Sinaï. L’Egypte a vaincu les Tatars et aujourd’hui elle va vaincre le despotisme allié des Américains et des Israéliens. Les femmes sont au premier rang, comme nous les avons vues lors du dernier référendum. Elles vont défendre leurs droits et les droits de tous les Egyptiens. Sous le régime actuel, je pense que le peuple va gagner son combat dans quelques mois. Il va éradiquer la cor-ruption, la pauvreté et sauver son patrimoine culturel et naturel. Et ce combat doit être au Caire et dans les grandes villes comme Alexandrie et Mahalla. Il faut poursuivre la lutte jusqu’au bout.
Lien court: