
Le projet « Film d’une minute », qui a réuni des femmes autour de l’apprentissage basiquede la réalisation de courts métrages.
C’est dans l’une des rues sinueuses et étroites du vieux quartier Daher que se trouve l’association Al-Nahda, créée en 1998 grâce à l’initiative des pères jésuites et de quelques personnalités publiques. Dans le bâtiment datant de 1937, qui est à l’origine un studio de cinéma connu sous le nom de studio Nacebiane, s’agitent surtout des jeunes sous la houlette du père William Sidhom qui, du haut de ses soixante-dix ans, s’active depuis des années pour concrétiser les objectifs de l’association. Celle-ci abrite, en plus des activités cinématographiques, une école de théâtre de rue et de dessins animés. « J’ai un coeur de 16 ans mais le corps ne suit plus », lance-t-il joyeusement. C’est un lieu qui se veut d’abord espace de liberté et de créativité, et l’intérêt pour le cinéma vient du fait que pour Al-Nahda, l’art visuel est le meilleur vecteur pour sonder la société. « C’est une association pauvre, mais elle est bâtie sur le volontariat », lance père William lors du lancement de la revue Al-Film (le film). Cette dernière initiative de la revue non périodique est très significative dans la mesure où il n’y a pas en Egypte de revue de cinéma à proprement dit. Et il a fallu que cette dernière paraisse grâce aux efforts d’une ONG. « Le cinéma en Egypte est un grand marché et une industrie qu’on tue », affirme Fathi Embabi, romancier de renom que l’équipe d’Al-Nahda a choisi pour être le rédacteur en chef de la revue. « Et ceux qui dominent sont les plus mauvais », ajoute-t-il.

La couverture de la revue Al-Film.
La revue Al-Film a deux intérêts, le cinéma et la photographie. « Al-Nahda s’est toujours intéressée à l’Amérique latine, et c’est pourquoi nous avons consacré dans ce numéro un dossier au cinéma Novo au Brésil, qui a vu le jour dans les années 1950 et s’est étendu jusqu’aux années 1970. Il est question de s’ouvrir aux expériences de ce continent et de voir comment ils ont passé le cap des troubles politiques et des dictatures », commente Hassan Chaarawi, président du ciné-club.
Ciné-club depuis 1950
Le clou de l’association Al-Nahda est justement son ciné-club qui projette régulièrement depuis 2009, tous les samedis, des films de toutes les nationalités et qui est devenu le phare des cinéphiles. C’est de ce club qu’est née l’idée de cette revue se distinguant par une superbe mise en page et des photos choisies avec pertinence. « Ce ciné-club ne date pas d’hier. Il faut revenir aux années 1950. A cette époque, l’école des jésuites proposait dans sa salle de cinéma des films aux habitants du quartier de Daher aux abords de l’école. Cela s’est ensuite transformé en ciné-club avec un débat autour du film dans la salle de projection », écrit Hassan Chaarawi dans son article intitulé Le Ciné-club jésuite, un espace de libération, publié dans Al-Film. Ce ciné-club historique est entré ensuite dans les activités de l’association après sa création, avec comme philosophie « Regarder, discuter, se libérer ».
En 2008, l’association Al-Nahda s’est dotée d’une école de cinéma. Un cinéma alternatif. « C’est une bourse d’étude qui a pour but de donner la chance d’aborder des études en cinéma avec toujours le même leitmotiv, à savoir l’espace de liberté, en offrant aux étudiants des cours intensifs sur une année. Cette école du cinéma indépendant est devenue l’un des plus importants centres du cinéma numérique en Egypte », explique Youssef Ramez, directeur d’Al-Nahda.
Pour revenir à la revue Al-Film, la question est de savoir comment Al-Nahda compte en financer la publication ? Le premier numéro ayant été publié grâce au volontariat. « Nous avons réussi, suite à la publication de ce premier numéro, à obtenir un financement pour 4 numéros trimestriels. La machine est lancée et nous comptons continuer en recourant aux jeunes et à leur créativité », relève Ramez. L’aventure de la revue est donc assurée pour encore un moment ! .
Lien court: