Rami, Bachar et Marcel Khalifé, un trio sans leader.
(Photo : Ati Metwaly)
Al-Ahram Hebdo : Votre projet le plus récent est celui que vous venez de présenter en Egypte. Vous vous produisez avec vos deux fils Rami et Bachar qui sont eux aussi musiciens. D’où vient l’idée de ce trio ?
Marcel Khalifé : Rami et Bachar sont des musiciens qui ont leurs projets musicaux indépendants. Un jour, ils m’ont proposé de faire quelque chose ensemble. Ce trio est justement une belle occasion de se rencontrer et de faire quelque chose en commun. C’est un trio qui présente la musique acoustique et électronique, avec Rami au piano et Bachar aux percussions, en plus de ma propre musique. Un échange d’idées. En jouant avec Rami et Bachar, j’ai retrouvé beaucoup de jeunesse. En même temps, ils revivent la musique qu’ils écoutaient à la maison quand ils étaient petits. Cette coopération est donc basée sur les souvenirs. C’est plutôt une histoire d’amour. « Ya Police Al-Charie » (police de la rue) ou « Passeport » par exemple sont des chansons que Rami et Bachar ont écoutées quand ils étaient petits.
Le trio joue aussi des oeuvres que Rami et Bachar ont composées eux-mêmes. Bref, ce trio nous permet d’entamer une nouvelle voie pour la création artistique.
— Trois musiciens indépendants. Cette coopération fut-elle facile pour vous ?
— Non, ce n’est pas facile. Il n’y a pas de « leader » dans ce projet. Nous sommes tous les trois chefs, de quoi rendre parfois le travail difficile. Il faut que nous nous écoutions beaucoup, et que chacun apprenne de l’autre. Mais à la fin, on arrive à résoudre tous les problèmes et à créer une oeuvre ensemble.
— A part cette coopération « familiale », vous encouragez aussi d’autres jeunes musiciens. Récemment, vous avez développé une relation artistique avec l’Egyptien Mohamad Mohsen, lequel a chanté une chanson de Sayed Darwich, lors de votre concert au Caire...
— J’ai rencontré Mohamad Mohsen à Beyrouth. C’est un jeune Egyptien intéressant, un musicien qui a commencé à créer et à s’exprimer ces dernières années à travers la musique et la chanson. L’été dernier, il m’a accompagné durant plusieurs concerts au Liban.
— Vos chansons touchent les coeurs des auditeurs arabes et parlent aussi aux Occidentaux. Vous joignez l’amour au nationalisme, en exprimant l’angoisse face à l’injustice. Mais vous composez aussi pour le cinéma et la danse qui sont des formes artistiques où l’inspiration vient d’un élément visuel. Vous aimez aussi la musique instrumentale qui est générée sans matériel écrit (poèmes) ou visuel (film, danse). Quelles sont vos préférences ?
— Je préfère avoir un papier blanc et y mettre mes notes. Les paroles me guident vers un chemin tout à fait différent que la musique instrumentale. Il n’est pas toujours facile de lier une image à la musique, mais il y a une autre richesse dans le processus même. J’aime beaucoup la chanson, j’aime aussi les génériques de films, les spectacles de danse, mais je préfère être libre avec ma musique. La musique instrumentale c’est une musique à elle seule. Il y a une relation pure entre elle et moi en tant que compositeur.
— Vous soulignez toujours que votre mère a joué un rôle important dans votre développement...
— Ma mère m’a initié. Elle a planté la graine de ce que je suis aujourd’hui. C’était elle qui a insisté pour que mon père m’achète un instrument de musique. C’était elle qui m’a poussé à étudier la musique. Même si elle n’a pas vécu jusqu’à voir ce que j’ai pu réaliser, elle avait déjà pressenti mon parcours artistique.
— Vos chansons— et toute votre oeuvre— n’ont ni frontières géographiques ni musicales …
— Je suis contre les frontières. La musique est un langage universel, même si l’on crée des choses personnelles. La musique— et l’art en général— est ouvert à tous. Je viens d’une ville située au bord de la mer et la mer est grande. Ainsi est la musique.
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