Chaker Al-Idrissi, avec les gens du sahara.
Maha georges, Sahar Al-Amir et Chaker Al-Idrissi, lesquels exposent actuellement à la galerie
Art Corner, à Zamalek, considèrent la toile comme une «
arène », un «
espace » où il est question d’agir.
Femmes qui étouffent, par Maha Georges.
Les trois sont des expressionnistes abstraits et privilégient le mouvement pictural. Ils adhèrent aux idées de ce courant qui s’est développé à New York, peu après la Deuxième Guerre mondiale. Ses fondateurs avaient jugé à l’époque que les conditions économiques, politiques et artistiques suscitent une nouvelle manière de peindre et de voir les choses. Probablement, le contexte actuel en Egypte a dû lui aussi pousser les trois artistes de la galerie Art Corner dans le même sens: vouloir donner une vision différente de la réalité et agir sur la toile.
A l’entrée de la galerie, les peintures colorées de Sahar Al-Amir dressent un monde chaotique. C’est le quotidien cairote, ne respectant pas les règles de la perspective et des dimensions. « Recourir à de nombreuses possibilités d’assemblages visuels de collage de tissus, de papiers colorés, de pointillisme sur des couches pâteuses d’acrylique. Le tout enrichit mes toiles de grand format », indique le peintre, qui reprend les thèmes de la ville, avec ses lanternes, ses cafés populaires, ses drapeaux, etc. Le tout baigne dans une atmosphère abstraite, donnant un air de tous les jours.
Le chaos de la ville, par Sahar Al-Amir.
Le « patchwork » de Maha Georges se prête, lui, à un jeu carnavalesque. Elle présente la ville dans un esprit plus enfantin, avec des femmes en mouvement, dans divers états d’âme, à travers différentes périodes de l’Histoire. Une fillette, une poupée, une jeune mariée, une paysanne, une sainte sur une icône copte, ou encore La Joconde, sur fond de paysage montagneux. « Les multiples motifs populaires qui entourent mes protagonistes femmes, dans l’espace et le temps, étouffent leurs ambitions », nous dit Maha Georges.
Ses protagonistes sont toujours coincées quelque part sur la toile; les détails du quotidien pèsent sur l’ensemble. L’artiste s’inspire de l’art de la « courtepointe », dit aussi le Quilt Art. « C’est un art textile qui traverse les continents et les époques. Son exemple le plus ancien a été découvert dans une caverne en Mongolie. Et il a aussi existé chez les pharaons », précise Georges.
Côté masculin
Chaker Al-Idrissi puise lui aussi dans le Quilt Art, mais il s’adonne en plus à la technique du « dripping », laquelle consiste à laisser couler sur la toile des taches de couleurs assez spontanées.
Il offre des paysages grandioses et jaunâtres, à la couleur du désert égyptien dont est issu Al-Idrissi. « Envoûté par la splendeur du désert blanc et celle des villes bédouines où je suis né, j’aime reproduire leur beauté et les faire voir à ma manière. C’est une ambiance très expressive, l’action des personnages qui appartiennent tout à fait aux lieux peut se poursuivre même en dehors des cadres. Cela dit, on peut imaginer leur quotidien et d’autres détails de la vie là-bas, sans y être, rien que parce que j’ai réussi à donner idée du rythme de la vie dans les oasis », évoque l’artiste, dont les formes abstraites esquissées au crayon noir revêtent quelques silhouettes taillées à la légère. Des hommes en action durant la moisson, des nuits de noces... Tous bougent dans une légèreté infime.
Jusqu’au 15 septembre, de 11h à 23h (sauf le dimanche), à la galerie Art Corner. 12, rue Sayed Al-Bakri, Zamalek.
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