Une panoplie de films et une centaine d’invités … le Festival de Louqsor propose une semaine de découvertes au bonheur des spectateurs de la Haute-Egypte. Et ce, malgré les conditions difficiles que vit l’Egypte et à cause desquelles cette deuxième édition a été reportée à maintes reprises. «
Nous visons à en faire une vraie fête artistique, à travers laquelle on découvre des cinématographies différentes, tant en fictions qu’en documentaires. Et ce, outre les films d’auteurs qui apportent au public des informations sur d’autres sociétés », a souligné Magda Wassef, présidente du Festival.
Courts et longs métrages, documentaires, cinéma expérimental et d’animation, plus de 62 films entre indépendants et classiques sont au programme, dont 17 films européens et 27 courts métrages.
Ce qui caractérise cette cuvée 2014, c’est encore une fois cette ouverture sur les nouvelles productions et les diverses thématiques.
Les huit films, proposés en compétition des longs métrages, s’inscrivent pour la plupart dans une démarche sociale engagée. Commençons par le film russe A Long and Happy Life (une vie longue et joyeuse) réalisé par Boris Khlebnikov. Il relate l’histoire d’un jeune paysan qui décide d’aider ses voisins villageois afin de protéger leur terre contre les ambitions dominatrices de l’Etat. Une mission qui le mène dans plusieurs aventures gênantes. De même, le film suédois, Eat Sleep Die (mange, dors et meurs), de Gabriela Pichler met en lumière la société suédoise contemporaine, à travers l’histoire d’une jeune ouvrière active, Rasa. Suédoise, musulmane et d’origine balkanique, celle-ci affronte la vie sans jamais se laisser escroquer ni contrefaire, jusqu’au jour où elle perd son travail et se retrouve face au chômage. Sans diplôme ni travail, cette jeune obstinée se retrouve aux prises avec une société dévorante et un labyrinthe de bureaucratie, sans perdre ses valeurs et sa patience en quête d’une opportunité.
Autre aspect d’engagement social : le film géorgien, In Bloom (en épanouissement), de Nana Ekvtimishvili et Simon Gross. En 102 minutes, le long métrage dresse le portrait de deux jeunes adolescentes, et amies presque inséparables, Eka et Natia, qui vivent à Tbilissi en Géorgie, après la chute de l’Union soviétique. Ayant quatorze ans, elles vivent le quotidien des jeunes filles de leur âge, dans la rue, à l’école, avec les amis ou la famille. Confrontées à la domination des hommes et le mariage précoce, les deux filles luttent pour leur liberté. Les personnages principaux sont interprétés par des acteurs non professionnels.
Les hommes, eux aussi, sont présents dans cette panoplie de films engagés. Le réalisateur, José Padilha, participe avec le film grec, The Enemy within, évoquant le courage d’un père visant à protéger sa vie familiale. Des truands masqués pénètrent dans sa maison, attaquent sa famille et violent sa fille avant de partir avec l’argent et sa voiture. Bien que sa famille le supplie de passer à autre chose, le père souffre du fait qu’il n’a pas pu protéger les siens.
Une oeuvre, quoique portant sur le thème récursif de la vengeance, s’intéresse essentiellement aux contraintes et forces qui peuvent vaincre les gens, et finissent par mettre une arme dans la main d’un homme civilisé et pacifiste de la classe moyenne.
Quant au film roumain, Roxanne, de Valentin Hotea, il aborde la manière dont le passé communiste de la Roumanie continue à hanter son présent. Et ce, à travers le personnage d’un lycéen qui, une nuit en 1989, et avant la Révolution, appelle la radio nationale pour dédier la chanson de Sting, Roxanne, à sa petite amie au prénom de Roxana. Un geste complètement illégal dans la Roumanie communiste, ce qui vaut au jeune Tavi d’être arrêté par la police. Vingt ans plus tard, en consultant le fichier établi sur lui par la police, le jeune homme se rend compte qu’il a peut-être un fils de sa bien-aimée, Roxana, dont il s’est séparé subitement après sa triste expérience avec les autorités. Agité par l’idée qu’il est peut-être père, il décide de partir à la recherche de Roxana, mariée à un médecin et mère de trois enfants.
Un jury de marque
Côté jury, la direction du Festival a choisi cette année le cinéaste russe Vladimir Menshov — auquel cette édition rend hommage — pour tenir la houlette du président. Ce dernier est entouré du producteur belge, Jacques Laurent, l’Estonienne Kadi Lokk, directrice du Festival européen des films indépendants, la comédienne grecque Katerina Didaskalou, la productrice française Lise Fayolle, le comédien, réalisateur et scénariste italien Tonino Zangardi et finalement le directeur de la photo égyptien, Saïd Chimi. Le Russe Menshov a donc la lourde tâche de choisir la perle parmi une sélection de huit longs métrages en compétition, renfermant les premiers films.
Par ailleurs, le Festival offre sa présidence d’honneur au grand poète, Abdel-Rahman Al-Abnoudi dont la carrière renferme deux scénarios : Chayë men al-khawf (une certaine terreur) de Hussein Kamal et Al-Tawq wal eswera (le collier et le bracelet) de Khayri Bichara.
Côté courts métrages, ces nombreuses oeuvres sont peut-être le reflet le plus diversifié du Festival, qu’il s’agisse du film estonien 95 de Hardi Keerutaja, de Bizness du Belge Manu Coeman, de la production française Shopping réalisée par Vladilen Vierny ou encore de l’Egyptien Scarf (écharpe) d’Ahmad Emad. Ils font tous écho aux tracas autour d’une Europe en ébullition et d’une Egypte encore agitée depuis 3 ans.
L’Allemagne est à l’honneur cette année avec un panorama sur son nouveau cinéma, avec des noms tels Fatih Akin, Yasemin Samderel, Wolfgang Becker ou Florian Henckel von Donnersmarck. Un autre hommage est dédié au comédien égyptien Nour Al-Chérif … Du coup, une sélection de ses films est projetée durant le Festival.
Une édition riche de projections, qui nous invite à une balade passionnante sur les grands écrans de Louqsor, avec de beaux moments de découvertes et d’échanges, dans des monuments antiques de cette ville mythique .
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