Ahmed Kaabour : La mer est à moi !
« Je n’ai plus de port, mais quand même j’ai la mer. Ils ont bombardé le port, mais ne peuvent pas cibler la mer. Beyrouth demeure vivante », a souligné le chanteur, compositeur et comédien Ahmed Kaabour dans les médias, pour évoquer l’idée de son récent album Ma Endi Mina (je n’ai plus de port), diffusé sur les plateformes musicales. Il s’agit du titre de la chanson phare de l’album, faisant part de la nostalgie subtile de l’auteur-compositeur après la destruction du port de Beyrouth.
Il y parle de sa ville et de la résistance libanaise, qui sont parvenus à dépasser les guerres, ainsi que les multiples attaques et crises. Il y déplore le sort de tous et déclare son amour pour la mer et pour la ville. Puis, il résume ses sentiments en disant : « Je n’ai pas de port, mais j’ai la mer, Je n’ai pas de bateau, mais j’ai la rivière ».
Sorti en mai dernier, l’album compte 10 chansons écrites, composées et interprétées par Kaabour lui-même. Ce dernier a commencé à travailler dessus en 2019, puis ont suivi les séquelles de la pandémie de coronavirus et celles de l’effondrement bancaire et financier du Liban.
La ville revient de nouveau dans la chanson « Wa am nessäl ya Beyrouth » (On s’interroge, Ô Beyrouth). Kaabour y aborde le sens de la ville, rejetant son assujettissement actuel.
Le clip de la chanson Ma soeur Amira.
La ville récalcitrante
L’interprète engagé défend Beyrouth, la ville qui a toujours ouvert ses bras à la liberté et aux poètes, dramaturges et cinéastes, chassés de leurs pays, pour avoir protesté contre l’ordre établi. Il nous offre une chanson d’amour dédiée à la ville dans laquelle il vit et annonce son affiliation à toutes les villes qui lui ressemblent.
Puis, il aborde un sujet différent dans la chanson Okhti Amira (ma soeur Amira) dont le vidéo-clip a fait un tabac sur les réseaux sociaux. Kaabour y évoque le célibat d’une femme — sa soeur Amira — qui a tout sacrifié pour prendre soin de ses proches et, en fin de compte, elle s’est retrouvée seule. Avec une grande finesse, l’auteur met en relief son côté solitaire.
Ajel, Taa (Allez ! Dépêchez-vous, venez) est une autre chanson d’amour, développant la vie d’un couple dont les rêves ont été emportés par la guerre. Les deux partenaires ont découvert trop tard combien de rires et de moments de joie leur ont échappé, alors, ils ont décidé de célébrer chaque instant passé ensemble, avant que ce ne soit trop tard.
Man Talab Al-Ola (ceux qui cherchent la gloire) est l’unique chanson que Kaabour n’interprète pas de sa propre voix, cédant sa place à la troupe Four Knights (les quatre chevaliers). Quatre jeunes hommes chantent alors les pauvres, ces mendiants orgueilleux qui achètent leurs vêtements dans les magasins de friperie, qui restent très dignes.
Par ailleurs, Kaak Al-Abbass (les gâteaux d’Al-Abbass) est une chanson portant sur la cause palestinienne, chère à l’artiste engagé. Kaabour estime que la route vers la Palestine ne passe pas par Jounieh au Liban, ni par Al-Qalamoun en Syrie, mais par la grande porte de la dignité et de la liberté. Les paroles sont directes et la musique vivace : « Fais-moi goûter les gâteaux Abbass, je n’ai rien à faire avec le nucléaire. Les opprimés ont droit au pain, à la dignité et à la liberté. Seule celle-ci peut nous mener en Palestine ».
Comme d’habitude, Kaabour présente des chants de résistance, en adoptant des styles musicaux variés, allant de la valse au tarab léger et moderne proche des maîtres du genre tels l’Egyptien Zakariya Ahmad et le Libanais Philémon Wehbe.
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