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Festival TransDance : la résistance par les corps et par les âmes

May Sélim, Lundi, 28 octobre 2013

Pour sa sixième édition, le festival TransDance a opté pour la résistance. Malgré le contexte politique, les artistes y ont affirmé leur présence à travers des oeuvres militantes et engagées.

TransDance
SUM,de Sama Waly.(Photo : Bassam Al-Zoghby)

La sixième édition de TransDance marque un tournant par rapport aux précédentes. Elle résume les défis qu’ont dû affronter les organisateurs pour créer une édition hors des sen­tiers battus.

« TransDance 2013 aurait pu ne pas voir le jour vu les nombreuses difficultés économiques et politiques qui ont eu lieu durant l’été en Egypte. Tout cela a déstabilisé les moyens de financement et la possibi­lité de tenir une programmation internationale. Pourtant, l’insis­tance des artistes nous a poussés à tenir cette édition et à nous interro­ger sur l’art et la danse en temps de guerres et de révolutions », explique Adham Hafez, directeur du festival.

La 6e édition a donc pour thème « L’oubli et la résistance ». Faut-il tout oublier ? Faut-il répondre aux exigences des forces de l’ordre et nous effacer ou continuer à mettre en avant une présence artistique et à chercher dans l’art des moyens de résistance ? Durant dix jours, le fes­tival a tenté de répondre à ces ques­tions.

Contrairement aux éditions pas­sées, Adham Hafez a cette année choisi de s’éloigner des centres culturels étrangers et des théâtres pour les locaux du centre Arc.Hive au centre-ville. Arc.Hive, lancé en avril dernier, est un centre de recherche et de documentation pour les arts de performance, dirigé par Adham Hafez sous le nom de Haraka (mouvement).

C’est dans une ambiance intimiste que cette édition a accueilli des per­formances arabes et égyptiennes dans un contexte politique où était mis en avant le rapport du corps à la danse et à la résistance.

Vidéos d’amour et de combat

Les installations vidéo témoi­gnent aussi de cette volonté : Chaïmaa Aziz, dans sa vidéo intitu­lée « Danse d’amour », retrace l’histoire d’un couple qui découvre son corps. L’homme et la femme tentent de communiquer dans cette société étouffée par le trafic auto­mobile. Sa vidéo est une série de sketchs présentée à travers la tech­nique du stop motion. Découvrir, communiquer est une manière de se trouver soi-même et de résister.

Une autre vidéo « Nuovo Cinema Paradiso » signée Lana Al-Sennawi fait défiler différentes scènes de baisers tirées des films classiques égyptiens. Al-Sennawi a réalisé son film fin 2011. « C’était une manière de répondre aux Frères musulmans qui étaient au pouvoir à l’époque et qui ont cherché à censurer les scènes d’amour dans le cinéma égyptien ».

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Moataza Abdel-Sabour et Adham Hafez, lecture dramatique de la poésie d’Etel Adnan. (Photo : Bassam Al-Zoghby)

Al-Sennawi visait à choquer pour affronter une sombre mentalité. « Les films classiques sont souvent diffusés à la télévision. Les enfants ont l’habitude de les regarder avec leurs parents. On n’a jamais trouvé ces scènes immorales. Exprimer l’amour est une attitude normale au cinéma et dans la société », estime l’artiste.

La lecture dramatique faite par Adham Hafez et Moataza Abdel-Sabour du poème de la Libanaise d’expression anglaise Etel Adnan « Au temps de la guerre » favorise elle aussi l’idée de résistance. Les cris, le jeu d’intonation et l’impro­visation renforcent l’instabilité de l’actualité politique décrite dans le poème.

In Situ est un spectacle chorégra­phié et dansé en solo par la Tunisienne Amira Chebli. Mais, faute de visa, elle n’a pas pu venir en Egypte. Elle a donc filmé sa per­formance et l’a envoyée au festival. Le spectacle s’est donc transformé en une projection vidéo sur les dif­férents aspects de l’enfermement.

Pour la même raison, l’artiste libanaise Rima Najdi n’a pu venir. Pourtant, son spectacle Qui sont-ils et qui sommes-nous ? a bien été donné. Basé sur l’interaction avec le public — voir la manipulation du public — le spectacle parodie les émissions radio d’autrefois. Dans une ambiance comique le public suit avec intérêt la radio et obéit aux ordres des interlocuteurs qui parlent de révolution et de patriotisme. Impossible de ne pas répondre aux ordres. L’artiste résume l’absurdité politique : une performance où le rire, le mouvement et le jeu ne sont jamais gratuits.

L’Egyptienne Sama Waly a donné SUM : un rythme musical en sans­krit marqué par la répétition. Waly est allongée dans un bassin bercée par un rythme vocal qui se répète. A première vue, elle est presque immobile, mais en suivant le rythme, son corps commence à bou­ger lentement. Son souffle s’accen­tue et le mouvement de la tête devient plus clair. « La répétition régulière peut engendrer à un cer­tain moment un mouvement sponta­né du corps », estime l’artiste. En ce qui a rapport avec le corps, la répé­tition n’est jamais machinale. Au cours de la performance, une fois que le mouvement spontané devient clair, Waly sort du bassin d’eau. Elle s’insurge. La performance résume un état de révolte inné.

Les mois prochains, le festival se déplacera en Europe et aux Etats-Unis.

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