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Thierry Frémaux : Un festival c’est physique, c’est des rencontres. On ne peut pas faire un vrai festival en format virtuel

May Sélim, Dimanche, 05 décembre 2021

Honoré lors de la 43e édition du Festival international du film du Caire, le directeur artistique du Festival de Cannes et directeur de l’Institut Lumière à Lyon, Thierry Frémaux, s’exprime sur le rôle des manifestations cinématographiques.

Thierry Frémaux
(Photo:Ahmed Refaat)

Al-Ahram Hebdo : Que représente pour vous d’être au Festival du film du Caire ?

Thierry Frémaux: Quand je suis ici, je peux visiter des collègues, des gens qui font le même métier que moi. Etre ici c’est une responsabilité. Car tous les festivals du monde rendent le cinéma plus fort. Et plus les années passent, plus on pense aux plateformes, plus les festivals deviennent importants. Car on ne peut pas faire un vrai festival en format virtuel, un festival c’est physique, c’est des rencontres, c’est humain. Etre ici, c’est pour montrer que le cinéma est partout. C’est même plus important que d’aller dans un pays que nous accueillions beaucoup à Cannes.

— Comment le Covid-19 a-t-il influencé les festivals de cinéma de par le monde, notamment Cannes ?

— Au début de la pandémie, on parlait beaucoup du monde d’après et maintenant, on ne parle plus du monde d’après. Je crois qu’il faut revenir à ce monde d’après et que nous devons tous y réfléchir.

Le succès de Cannes est un secret que je ne connais pas. C’est une alchimie, un cas particulier qui fait que Cannes reste le plus grand festival du monde. On est au mois de décembre, on va tenir le Festival de Cannes, je l’espère, en mai. Chaque année est un recommencement, c’est quelque chose de spécial.

— Quels sont les défis de la prochaine édition ?

— Il y a des défis qui sont liés à la pandémie, il y a des défis liés à l’actualité pour montrer que le cinéma mondial est vivant. C’est facile parce qu’il y a des auteurs partout, parce qu’il y a vraiment des artistes qui réinventent le cinéma. Et puis, il y a maintenant évidemment le défi de la coexistence avec les plateformes. C’est évidemment quelque chose de très important au futur.

— Comment trouvez-vous les talents des jeunes générations arabes ?

— Il y a une nouvelle génération de cinéastes en Egypte, mais aussi dans le Maghreb, au Liban, en Palestine, dans toute cette région de la Méditerranée, il y a des gens qui veulent faire du cinéma d’auteur. Et c’est très bien. Par exemple, le film égyptien Youmeddine était une surprise. Un premier film, donc il fallait encourager le metteur en scène. Mais aussi c’est une manière de montrer qu’il y a un cinéma différent qui peut être fait. Nos choix ne sont jamais politiques. Ils sont parfois perçus comme des choix politiques, mais c’est plutôt le choix du cinéma. Ce sont les artistes qui sont politiques.

— Le cinéma égyptien peut-il faire partie de la programmation de l’Institut Lumière à Lyon que vous dirigez ?

— Oui Evidemment. La première chose que Louis Lumière a faite en 1896, un mois après avoir monté le cinéma, c’est qu’il a envoyé des opérateurs à travers le monde entier. Et où est-ce qu’ils sont allés? En Egypte. Il y avait des films formidables. L’image de l’Egypte a été des premières images de l’histoire du Cinéma. C’est normal d’être ici, je suis comme l’héritier des frères Lumière.

Je regrette les années 1950 et 1960 quand l’Egypte était un pays incroyable avec des music-halls, avec un cinéma populaire … J’aimerais qu’on puisse revenir aussi aux music-halls égyptiens.

J’ai visité l’exposition sur les divas, tenue à l’Institut du monde arabe à Paris, qui montrait l’importance du cinéma égyptien à l’époque. Un pays qui a une grande tradition cinématographique.

Le cinéma égyptien a une histoire, et nous devons faire attention à ne pas voir l’histoire toujours comme une histoire occidentale européenne. On sait qu’il y a une autre façon de chanter ou d’écrire, et il y a aussi d’autres façons de filmer; en tant que cinéphiles, nous devons connaître tout. Un film japonais n’est pas un film argentin, un film égyptien n’est pas un film américain.

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