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Danser entre Rome et Le Caire

May Sélim, Dimanche, 16 mai 2021

Le Festival indépendant des arts de performance Breaking Walls, en coopération avec l’Institut culturel italien au Caire, rend hommage à Federico Fellini à travers une série de vidéos inspirées de Roma, l’un des chefs-d’oeuvre du réalisateur italien.

Danser entre Rome et Le Caire

En 2020, la troisième édi­tion du Festival indé­pendant des arts de per­formance Breaking Walls (briser les murs) s’est adap­tée à la distanciation sociale et aux mesures de prévention hygié­nique imposées par la pandémie. Le festival, dont le but est de sor­tir les arts de la performance des salles de théâtre traditionnelles, a consacré un jour par mois à la danse dans les espaces publics et en plein air.

Danser entre Rome et Le Caire
Dans le désert, un rêve faPhotos  : Mahmoud Abdallahntaisiste s’empare des danseurs. (Photo: Mahmoud Abdallah)

Cette année, alors que le coronavi­rus bat toujours son plein, le festival offre une série de vidéos de danse à l’occasion de sa quatrième édition. Il s’agit de quatre vidéos, s’inspirant du film de Fellini Roma. Elles sont toutes chorégraphiées et mises en scène par Hazem Header, qui est choré­graphe, danseur, fondateur de la troupe de danse contemporaine Nut et directeur artis­tique du festival. Il s’agit d’une coopération entre le festival et l’Institut culturel italien, qui cherche à rendre hommage au réalisateur italien Federico Fellini (1920 -1993). « L’an dernier, le Festival du film du Caire rendait hommage à Fellini, alors les responsables de l’Institut italien m’ont contacté pour monter un spectacle de danse s’inspi­rant de ses films. J’avais déjà une expérience avec les films de Fellini en 2014. A l’époque, l’Institut italien a voulu faire le lien entre l’Egypte et l’Italie par le biais de la danse contemporaine, et ce, en commémorant Fellini. J’ai tra­vaillé sur son film Casanova. J’aime ce réalisateur et j’appré­cie son approche cinématogra­phique. L’an dernier, à cause du confinement, le projet a été reporté. Puis, en février der­nier, l’Institut italien a relancé le projet », souligne Hazem Header. Et d’ajouter: « J’ai commencé à travailler sur l’idée en février et les répétitions ont eu lieu à partir du mois de mars dernier. Je collabore avec les dan­seurs de ma troupe, mais aussi avec d’autres danseurs indépendants comme Nagham Salah Osman et Nadine Emile ».

Roma est à l’origine un film franco-italien réalisé par Fellini et sorti en 1972. En com­plète rupture avec les structures de la drama­turgie classique, le film se présente comme une suite de courts récits et de sketchs, où Fellini mêle ses souvenirs d’enfance et de jeunesse à des séquences dressant le portrait de la ville antique au XXe siècle, surtout pendant la Seconde Guerre mondiale.

Dans ses vidéos, Header tente de repro­duire le concept de la ville qui existe dans le film, tout en le rapprochant de la capitale égyptienne de nos jours. « Roma est un film sur la ville pendant la Seconde Guerre mondiale. Je trouve qu’il y a beaucoup de points communs entre Rome à cette époque et Le Caire pendant la crise du coronavirus. C’est pourquoi j’ai choisi ce film en particulier », fait remarquer Header.

Les sites de la ville antique

Danser entre Rome et Le Caire
L’espace vide et le mouvement reflètent une certaine liberté. (Photo: Mahmoud Abdallah)

Ce dernier reprend des composantes et des séquences visuelles significatives du film de Fellini et essaye de les égyptianiser. Dans une première vidéo intitulée Festa de Noantri (Zaffet Al-Manséyine ou le cortège des oubliés), il s’inspire du début du film qui se déroule dans un espace rural avant l’arrivée du héros à Rome. Partant alors de l’idée d’un espace naturel, Header opte pour le désert. « Il s’agit ici d’un rêve fantaisiste que les dan­seurs partagent au début de leur voyage avant d’arriver au Caire. Ils ont une grande liberté et se trouvent dans un espace ouvert avant la crise du coronavirus. Ils fêtent leur liberté, alors qu’ils sont seuls à cet endroit », raconte le chorégraphe.

Dans la deuxième et la troisième vidéos, Header s’inspire des sites remarquables de la ville italienne, comme par exemple une autoroute bondée. Puis, il fait le lien avec les mesures de la distanciation sociale en Egypte dues à la pan­démie. La chorégraphie stylisée exprime l’étouffement, la perte des relations et l’enfer­mement. Bref, tout ce que l’on vit jusqu’à présent.

Danser entre Rome et Le Caire
(Photo: Mahmoud Abdallah)

Dans la quatrième partie, il imite Fellini mettant en scène un festin dans un restaurant, avec des querelles parmi les clients. « Les Italiens sont un peu comme nous les Egyptiens. Je trouve que beaucoup de scènes de Roma peuvent se passer de nos jours au Caire », s’exclame le chorégraphe égyptien qui a créé ces vidéos en collaboration avec le vidéaste Mahmoud Salem. « L’année passée, j’ai tra­vaillé avec Salem en réalisant la vidéo Entre le ciel et la maison. On s’entend bien. Je lui ai précisé dès le début que je ne fais pas du cinéma et que je ne cherche pas à faire une belle vidéo. J’insiste souvent sur le fait que je fais du théâtre et j’ai recours à des techniques simples en tournage pour ne pas tomber dans le piège de la création d’une vidéo réalisée par des techniques cinématographiques sophistiquées. Je m’occupe de la chorégra­phie et de la scénographie. Et lui, il s’occupe de l’image qui va paraître sur l’écran », indique Header.

En principe, la projection des vidéos s’étend sur quatre mois, de mai à août. Une nouvelle vidéo sera mise en ligne chaque mois. « Après ces projections, j’espère tenir en présentiel au mois de septembre prochain la quatrième édition du Breaking Walls avec des danseurs de par le monde. Au cas où les vagues du coronavirus se perpétueraient, on tiendrait la quatrième édition en ligne. La projection vidéo constitue pour nous une issue de secours », explique Header qui compte mon­ter un vrai spectacle vivant, inspiré du film Roma. « Je rêve de le faire à tout prix en espé­rant que la pandémie s’achèvera. J’envisage d’accompagner les spectateurs dans une tour­née autour de la ville du Caire et de leur pro­poser de se déplacer avec nous pendant toute une journée », estime le chorégraphe. Des danseurs qui se promènent librement en ville, appelant le public à partager leur expérience.

Festa de Noantri (Zaffet Al-Manséyine) sera dispo­nible en ligne sur le site de l’Institut culturel italien et le site du festival Breaking Walls dans quelques jours.

www.italieninstitut.eg , www.breakingwalls.eg

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