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Entre noir et blanc

Lamiaa Alsadaty, Mercredi, 18 novembre 2020

A l’occasion de la 5e édition du salon du Noir et Blanc, organisé au centre Guézira des arts, 395 artistes tentent de dialoguer ensemble, rien que par ces deux couleurs et leurs dégradés.

Entre noir et blanc
Une famille, scène de tous les jours, par Walaa Bédeir.

Pas de couleurs voyantes, mais uniquement du blanc, du gris ou du noir. Les oeuvres exposées, qu’elles soient classiques ou modernes, figuratives ou abstraites, font honneur à la monochromie. Une manière de prouver que chez les artistes les contraintes se trans­forment souvent en force créatrice.

Dans ses deux oeuvres intitulées Trêve 1 et 2, Amira El-Tabey cherche à esquisser, à l’encre de chine, la psychologie féminine. Le sujet l’a intéressée particulièrement ces derniers temps et elle en a fait un nouvel axe de recherche, paral­lèlement à son travail d’illustra­trice. D’ailleurs, son identité d’il­lustratrice se révèle à travers sa façon d’aborder le rapport entre volume et espace. Elle entreprend un cheminement audacieux, où l’in­terrogation du volume l’amène à explorer un univers formé d’ombres, de lumières et de transparences dans le noir et le blanc.

« J’ai abordé au cours de mon travail de thèse le sujet du contraste chromatique et son aptitude à exprimer le clair-obscur dans les oeuvres artistiques ainsi que son effet psychologique. Avec le confi­nement, puis à la suite de l’annonce du maintien du salon, j’ai trouvé que le monochrome est un bon choix pour représenter cet état de trêve féminine, une trêve émotion­nelle, spirituelle, etc. », explique El-Tabey.

A l’aide d’un crayon, et parfois au fusain, Walaa Bédeir trace trois figures masculines de face et une figure féminine de côté. Celles-ci représentent une famille, comme prise en photo en une scène ordi­naire de tous les jours. « L’idée m’est venue au moment où j’étais en train de visionner une vidéo ancienne de ma famille villageoise. La scène esquissée n’est en réalité qu’un assemblage de plusieurs scènes vidéo », souligne Bédeir dont l’expressionisme ne passe pas inaperçu. « Je veux que ceux qui regardent mes dessins aient l’im­pression qu’ils ont quelque chose à dire », ajoute-t-elle.

L’histoire de Qaïs et Leïla

Zeinab Habib, avec ses deux tableaux, semble vouloir introduire le public dans un autre monde plus époustouflant, celui des miniatures. A travers une compilation de motifs ottomans, de calligraphies persanes, de costumes mongols, Habib esquisse l’une des histoires d’amour les plus populaires du monde isla­mique, de l’Asie centrale à l’Afrique du Nord, en passant par l’Inde, la Perse et l’Arabie : l’histoire de Qaïs, un poète bédouin fou amou­reux de sa cousine Leïla.

Le dialogue s’instaure, non seule­ment entre le noir et le blanc et les motifs, mais aussi entre les deux tableaux dont l’un incarne Qaïs adressant son poème d’amour à Leïla, et l’autre où Leïla qui semble lui répondre. « Le défi ici était de travailler des miniatures en noir et blanc alors qu’elles sont connues pour leurs couleurs éblouissantes », raconte Habib.

Une autre forme de dialogue est mise en place par Asmaa Elemawy. A travers ses deux toiles en acrylique, représentant les grandes lignes d’un visage, le public peut avoir l’impression d’être en face de l’effet positif et l’effet négatif d’une même photo. « Les deux toiles sont complémentaires. Elles ne pour­raient être conçues qu’à travers une vision circulaire qui commence dans l’une et se termine dans l’autre, et ainsi de suite », précise-t-elle.

Le dialogue chez Huda Ashraf a commencé avant même l’élabora­tion des deux oeuvres qu’elle expose. « Mon grand-père m’a demandé de tailler son portrait. J’ai accepté, à condition de le faire à ma guise. Et du coup, je me suis mise à esquisser sa chambre à cou­cher en me servant de tissus et de couleurs acryliques et gouaches ». En effet, l’intérieur dépeint une personnalité très ordonnée, ayant son propre monde.

Sur l’un des tableaux, l’oeil obser­vateur détecte un lit bien fait, et une commode sur laquelle sont déposés un réveille-matin et une cassette. Sur l’autre, une coiffeuse dont le grand miroir reflète la chambre sous un autre angle.

Pour découvrir tous ces talents et déchiffrer leurs dialogues, n’hésitez pas à venir faire un tour dans cette exposition.

Jusqu’au 26 novembre, au centre Guézira des arts, 1 rue Al-Marsafi, Zamalek, à côté du Marriott. De 10h à 14h et du 17h à 21h, sauf les vendredis. Tél. : 27373298.

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