Une ambiance festive à la Citadelle de Salaheddine.
Samaa, le Festival international de musique et de chants spirituels, se déroule jusqu’au 29 octobre 2020. A la surprise de beaucoup, et au moment où de nombreux événements publics ont dû être annulés, à cause des mesures sanitaires liées au coronavirus, le festival se tient, profondément vu les circonstances. « En principe, le festival vise à rendre disponibles les arts et les cultures de différents peuples, notamment l’art du Samaa et du patrimoine religieux dans ses diverses formes de manière à confirmer l’essence des religions. Une sorte d’assemblage, de fusion et d’union entre des voix variées crée un monde vaste exprimant un esprit d’amour, de tolérance et de paix. Dans cette édition exceptionnelle, nous cherchons à affirmer le pouvoir de la communication et de la cohésion humaine malgré la distanciation sociale imposée par le Covid-19. L’homme devient ainsi la patrie, et la patrie l’homme », explique Intéssar Abdel-Fattah, président et fondateur du festival.
Deux clés de l’activité festivalière ont été en principe maintenues. La première : soutenir les artistes relevant d’un genre ou d’une esthétique ; ici les musiques spirituelles du monde, particulièrement touchées par le fléau et son impact sur les mobilités. La seconde : préserver le rendez-vous annuel que le festival et son équipe auront donné à des partenaires, des publics, même en nombre forcément plus limité.
Ainsi, cette 13e édition dépend essentiellement de la participation des groupes égyptiens ainsi que celle des groupes étrangers résidents provenant de Russie, d’Arménie, de Grèce, d’Indonésie, du Liban, de Chine, du Soudan, du Soudan du Sud, de Palestine et de Syrie. Le fait d’avoir recours dans cette édition à des groupes résidents laisse penser à des groupes amateurs plutôt que professionnels ? « Ce qui compte dans ce contexte délicat est le pouvoir de créer et de maintenir le contact avec les autres. D’ailleurs, le chant religieux impose non seulement une voix forte, mais aussi une aptitude au niveau du passage d’une note à l’autre. Et, ceci est retrouvé également chez pas mal d’amateurs », souligne Abdel-Fattah qui met en évidence un souci et une volonté de poursuivre son projet qu’il avait déjà entamé il y a douze ans. Les défis sont néanmoins multiples. Tout est réduit à 50 % : le budget, les lieux de concerts, le nombre de public, et, avant tout, le fait de travailler sans avoir aucune idée de ce qui surviendra dans le futur proche n’est pas une tâche évidente, selon Abdel-Fattah.
Message de paix
A travers ce festival, Samaa, qui est à l’origine une notion propre au soufisme, et est définie en tant que formes anciennes consistant en l’écoute de chants à thème religieux et mystique, généralement accompagnés de percussion, voire d’un instrument comme un luth ou une flûte, acquiert plus de dimensions pour englober toute musique en rapport avec le spiritualisme. Intéssar Abdel-Fattah a brillamment réussi à réunir les musiques du monde à travers ce festival. « Un Egyptien pourrait ainsi découvrir un genre de musique africaine tout en étant au Caire », ajoute-t-il.
En effet, l’objectif, selon Abdel-Fattah, est non seulement esthétique mais aussi humain, puisqu’« il s’agit de communiquer un message de paix, en montrant aux peuples que malgré la différence, il reste un dénominateur commun qui nous réunit tous, un langage qui n’exige pas de traduction : la musique, notamment la musique spirituelle ».
Les honorés ont été choisis d’après leurs apports dans le domaine du chant religieux : le grand poète Ahmad Chawqi surnommé le prince des poètes, dont Nahj Al-Borda est conçu comme l’un des plus beaux poèmes de louange du prophète Mohamad, Oum Kolsoum dont l’un des chefs-d’oeuvre est Hadith Al-Rouh, Fayrouz dont de nombreuses chansons sont inspirées des cantiques tels Ajras Al-Aïd et Ya Mariam Al-Bikr, et enfin cheikh Mohamad Al-Fayoumi, le premier azharite à avoir chanté, et il a été surnommé à la première moitié du XXe siècle le cheikh des mounchidines.
Par ailleurs, le festival n’est ni un moment refermé sur lui-même ni un opérateur uniquement centré sur son entreprise. Mais, c’est surtout une étape dans un parcours, un lieu de rendez-vous, un quasi « marché » parfois. Ainsi, en marge de ce festival se tient, à la Citadelle du Caire, un marché pour les produits artisanaux populaires et traditionnels. Ce dernier est mis en place grâce à la participation du Fonds du développement culturel, le Centre artisanal traditionnel à Fostat et des associations indépendantes à but caritatif.
A la Citadelle de Salaheddine, le dôme Al-Ghouri et le Complexe des religions, le public sera au rendez-vous avec un festival atypique, à accès gratuit et dont le nombre est très limité.
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