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Ben Kraiem : « Groove, rythmes tribaux, jazz, le tout porte ma voix »

Névine Lameï, Lundi, 29 juillet 2013

Avec sa voix rauque et suave, la Franco-Tunisienne Nawel Ben Kraiem joue avec trois langues et des émotions portées par une musique tribale et contemporaine. Son nouvel album Nawel promet d’être une fusion sans compromis sur la situation en Tunisie. Entretien.

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( Photo: Bassam Al-Zoghby)

Al-Ahram Hebdo : Pouvez-vous nous parler de votre parcours en tant que chanteuse et auteur-compositeur après une formation de comédienne ?

Ben Kraiem : J’ai commencé en autodidacte à l’âge de 19 ans, à Paris, en 2003, lorsque j’ai décidé de poursuivre mes études en théâtre à l’Université Jussieu et à l’hypokhâgne du lycée Claude-Monet. C’est à Paris que j’ai fait connaissance avec le groupe Cirrus, c’était ma première expérience professionnelle dans le domaine du chant, de l’écriture et de la composition.

En 2008, j’ai sorti mon premier album Mama please (Iris Music/Harmunia Mundi) qui a obtenu le prix RMC doualiya, décerné par RFI. Très vite, j’ai été sollicitée par le groupe électronique Orange Blossom. Néanmoins, il ne m’était pas encore possible d’écrire les textes de mes chansons, ce qui était frustrant.

Après une tournée avec Blossom, en 2009, j’ai décidé de revenir à Cirrus. Et c’est avec la collaboration de Rémy Laurent, guitariste de Cirrus, que j’ai continué ma recherche acoustique dans un univers personnel, onirique et métissé, aussi bien par les textes que par les sons. Des sons chauds mêlés à des ambiances électroniques et des textes poétiques où résonnent plusieurs langues : l’arabe, le français et l’anglais.

— Votre voix, « rauque et suave » comme disent certains, joue entre trois langues, l’intime et le social, dans des sonorités tribales autant qu’actuelles …

— J’ai grandi en Tunisie avant de m’installer à Paris et de vivre de ma musique. Dans mes chansons sur l’expansion du port du voile, les réfugiés de Lampedusa, la révolution, je mélange le français, l’arabe et l’anglais pour créer des ponts entre les deux rives, l’Orient et l’Occident. Rythmique groove, guitariste aux riffs tribaux et progressifs, contrebassiste aux influences jazz et world, touches électroniques … le tout porte ma voix.

Ma fusion musicale électro pop/rock revisite les standards de la chanson arabe. J’aime écouter Fayrouz comme des DJ électro arabes, Soap kills de Ziad Hamdan, Noir Désir et les Britanniques Bonobo et Pj Harvey. Le pop c’est le populaire, et donc c’est la simplicité et l’accessibilité. Alors que le rock c’est le comble de l’énergie que j’aime transmettre dans ma musique.

— Votre double culture est aussi nourrie par les événements que traverse la Tunisie …

— Ma double culture me permet de garder une certaine distance pour mieux voir les choses et me libérer de tout ce qui peut entraver la parole. C’est vrai qu’actuellement, je réside plus à Paris qu’en Tunisie. Cependant, cela ne m’empêche pas de rester connectée à tout ce qui se passe politiquement dans mon pays natal. C’est une matière riche pour mon projet de fusion musicale. Un projet soutenu par le dispositif « itinérances », la SACEM et l’ADAMI, au Festival de Cannes dans le cadre des jeunes talents, pour la B.O du film Yasmine et la révolution de Karin Albou, en 2011.

De même, j’ai participé au projet de sensibilisation et d’appui au processus électoral en Tunisie, sous le titre d’Enti essout (tu es la voix). Cette chanson, créée par un collectif d’artistes talentueux et volontaires, a été enregistrée à l’initiative du Programme des Nations-Unies pour le Développement (PNUD). Le but de cette chanson est d’inviter les jeunes à se mobiliser pour leur avenir et à s’impliquer pour la Tunisie de demain.

— Vous avez collaboré avec l’Algérien Tony Gatlif dans son film Indignados, sorti en 2012, sur le mouvement des indignés. Cela vous a-t-il donné envie de continuer dans cette voie ?

— Tony Gatlif vient d’un cinéma indépendant et libre. De quoi répondre à mon goût artistique. En octobre prochain à Paris, je jouerai dans Les Démineuses de la metteur en scène libanaise Milka Assaf. Les événements de cette pièce de théâtre se déroulent au Liban. Il s’agit de six femmes qui déminent des bombes au sud du Liban. Et en avril prochain, je lancerai mon nouvel album Nawel, avec une chanson phare : Tunis, sur la révolution tunisienne .

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