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Le Symposium d’Assouan perd son mentor

Lamiaa Al-Sadaty, Lundi, 08 juin 2020

Le sculpteur et peintre égyptien de renom Adam Hénein s’est éteint au Caire, le 22 mai dernier, à l’âge de 91 ans. Hommage au fondateur du Symposium international de la sculpture d’Assouan.

	Le Symposium d’Assouan perd son mentor

« La scène artistique égyptienne a perdu l’une de ses figures symboliques, un génie », a déclaré la ministre de la Culture égyptienne, Inès Abdel-Dayem, dans un communiqué de presse, annonçant la disparition d’Adam Hénein, qui a rendu l’âme au Caire, le 22 mai dernier. Le relief, la perspective, le génie, l’authenticité, l’engagement, l’intégrité, l’humilité sans égale, une capacité d’abstraction ahurissante, l’imagination fertile, la patience … Ce sont des mots qui peuvent, à peine, résumer les caractéristiques de ce sculpteur et peintre hors pair.

Né au Caire en 1929, au sein d’une famille d’orfèvres et de bijoutiers originaire d’Assiout (en Haute-Egypte), il développe très tôt un attrait pour la sculpture, modelant à l’âge de huit ans son premier portrait en argile du roi Ramsès II, pharaon de la XIXe dynastie (1301-1236 av. J.-C.). Dans la continuité de sa fascination pour le patrimoine pharaonique, Hénein étudie la sculpture aux beaux-arts du Caire. Une fois diplômé en 1953, il part pour Munich, en Allemagne, afin de parachever sa formation. Ensuite, il vit à Paris pendant plus de 20 ans, avant de rentrer définitivement en Egypte.

Ayant étudié la sculpture pharaonique, de point de vue forme et technique, il participe, dans les années 1990, à la restauration du Sphinx, sur le plateau de Guiza. Et depuis, il n’a jamais quitté les lieux, puisqu’il a habité dans les environs, dans une maison à l’architecture très égyptienne qu’il a transformée en musée en 2014. Celui-ci abrite plus de 4000 oeuvres, variant entre sculptures et peintures, résumant son parcours artistique qui s’est étendu sur plus de 70 ans.

Adam Hénein s’est forgé son propre style, tout en restant prudent de ne pas tomber dans le piège de l’imitation du sculpteur Mahmoud Mokhtar ou des statues de l'Egypte Ancienne. Pourtant, celles-ci étaient pour lui une grande source d’inspiration. Son objectif était de reproduire son Egypte à lui, selon une perspective personnelle, qui puise dans le patrimoine. Ainsi, il a sculpté des femmes assises à même le sol, un hibou qui pleure, un oiseau vigile, un aigle courant sur pattes… ce sont là des thèmes privilégiés par le sculpteur. Parfois, ses oeuvres avaient des formes colossales, d’autres étaient réalisées en petits formats, suscitant toujours des émotions fortes et dévoilant les origines de l’artiste.

Du local à l’international

En 1996, il a décidé de fonder le Symposium international de la sculpture d’Assouan, devenu un lieu de rencontre, un rendez-vous annuel, réunissant des artistes du monde entier. Grâce à cet événement, Hénein participe à la formation de nombreux jeunes talents de partout, en leur apprenant des techniques inédites, concernant la légèreté et la durabilité des sculptures. Ayant consacré la plus grande partie de sa vie à la sculpture, il s’est intéressé de temps en temps à la peinture, réalisant des oeuvres abstraites, dont les unes ressemblaient à des parchemins ou des papyrus anciens. Elles partageaient, avec ses sculptures, le même langage poétique, le même cachet très égyptien.

D’ailleurs, ses oeuvres, exposées en Egypte mais aussi en Europe et ailleurs dans le monde, lui ont valu de nombreuses distinctions, dont le Prix national du mérite dans le domaine des arts en 1998 et le Prix Moubarak en 2014. En 2017, la fondation Adam Hénein lance un prix annuel pour récompenser des jeunes sculpteurs prometteurs, en leur consacrant une exposition, mettant leurs travaux sous les feux de la rampe.

Modeste et passionné, Hénein s’est imposé comme l’un des plus grands sculpteurs de l’Egypte contemporaine. Un message publié par le président de l’Institut du Monde Arabe (IMA), Jack Lang, a rendu hommage à l’artiste disparu, en disant: « J’ai appris avec une grande tristesse le décès d’Adam Hénein (…) Ses travaux en pierre ou en métal témoignent d’une recherche de pureté et d’absolu. En deux ou trois dimensions, il a poursuivi jusqu’à ses derniers jours son travail — dont nous conservons des pièces dans les collections de l’Institut du monde arabe— dans son atelier au pied des pyramides. C’est une personnalité très attachante, humaine et simple, qui s’est éteinte » .

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