Edouard et ses enfants expriment leurs choix pendant le confinement.
L’art trouve toujours sa voie, même et surtout en période difficile. Ainsi, c’est le déluge sur les plateformes vidéo et de streaming: des titres d’artistes méconnus inspirés par le coronavirus inondent les plateformes en parallèle avec des chanteurs ou des personnalités de renom, cherchant tous à assumer une certaine responsabilité à l’égard de la société en ce moment de crise, et qui n’hésitent pas à s’exprimer pour guider et/ou simplement détendre et faire plaisir.
En réponse à l’appel du gouvernement incitant les gens à rester chez eux, le jeune écrivain et parolier Omar Taher a posté sur son compte Facebook sa nouvelle chanson intitulée La Quarantaine. Interprétée par une chorale et arrangée par Youssef Adel, la chanson est inspirée d’une ancienne chanson folklorique intitulée Sallam Alay (salue-moi). Celle-ci avait déjà inspiré pas mal de chanteurs et de chanteuses dont Leïla Mourad et Nagate Al-Saghira. Elle est donc reprise par Taher qui a inventé de nouvelles paroles prônant la distanciation sociale et louant la quarantaine. L’arrangement de Youssef Adel semble, toutefois, modeste. Il joue la note principale au clavier, en ajoutant les rythmes de la batterie.
Le comédien Edouard, accompagné d’un tabla, s’est filmé chez lui avec sa fille au clavier et son fils à la guitare et a posté sur sa page Facebook une chanson pour raconter, avec beaucoup d’humour, leurs choix pendant le confinement: être positif et revoir ses priorités, être passif et choisir de ne rien faire ou être indifférent et poursuivre sa vie normale.
Le journaliste Gaber Al-Qarmouti a décidé, lui aussi, de donner de la voix pour contenir le virus. Inspiré par les mélodies de la chanson folklorique Raqsette Al-Magnouna (la danse de la folle), il a chanté avec une chorale les consignes relatives au Covid-19 à destination de son large public qui suit son talk-show quotidien Al-Kalam Ala Eih ? (de quoi parle-t-on?), diffusé sur la chaîne satellite égyptienne Al-Hayat. Parabole de la quarantaine sanitaire, la chanson invite également à se laver les mains, à éviter de se toucher le visage ou de fréquenter les lieux bondés.
Dans la même veine, un groupe de jeunes chanteurs anonymes a lancé sur YouTube une parodie de plusieurs chansons très connues du public comme Atsa Ghariba (un éternuement bizarre), parodie de la chanson de Abdel-Halim Hafez Haga Ghariba (une chose bizarre) ; ou encore Virus Number 1, parodie de la chanson de Mohamad Ramadan Number 1. Pleines d’humour, les paroles reviennent sur les nouvelles habitudes— bonnes ou mauvaises— et les nouveaux codes sociaux induits par le coronavirus.
Des marionnettes qui chantent pour conseiller
Avec beaucoup d’humour, Dr Alfons, marionnette qui représente un vieux coureur de jupons, présente ses conseils sur les rythmes d’électro-pop. Il a réussi à gagner une crédibilité auprès d’un large public composé essentiellement de jeunes.
Ainsi il a lancé sur Facebook sa chanson Ana Mich Batéedi (impossible que je sois infecté). Grâce à une musique flamboyante avec des mélodies accrocheuses et des rythmes fortement conditionnés par l’utilisation d’instruments synthétiques comme la boîte à rythme et le synthétiseur, la chanson a cumulé en deux jours un million de vues.
Quant à l’image, la caméra effectue des zooms avant et arrière avec un plan plutôt travelling (la caméra se déplace dans l’espace). Dr Alfons commence sa chanson au balcon, puis le traverse pour entrer dans la salle de bains pour nous exposer les désinfectants qu’il a achetés. Il fait le tour de son appartement comme pour nous montrer qu’il est en confinement. A travers des paroles qui ne manquent pas d’humour comme d’habitude, Dr Alfons énumère les précautions à prendre pour éviter l’infection et raconte ce qu’il avait fait avec son amie qui avait les symptômes. En refrain, il insiste sur le fait qu’il ne saurait en aucun cas contaminé.
En outre, Abla Fahita, marionnette représentant une veuve ludique devenue un phénomène sur les réseaux sociaux, a suivi le mouvement. Très connue du public égyptien, elle revient avec une chanson publiée sur sa page Facebook abordant la souffrance de la quarantaine. En compagnie de stars qui se sont filmées chez elles comme les comédiens Amr Youssef, Kinda Alouch ou le scénariste Tamer Habib, Abla Fahita énumère les effets psychologiques de la quarantaine, mais dans un langage humoristique: la frustration et l’ennui liés à l’isolement, ce qui implique la perte des contacts avec autrui, y compris son partenaire et ses enfants, à tel point que l’on rejette son entourage, ses voisins, ses collègues ou les membres de la famille à cause de la suspicion. Légères et faciles à retenir, les mélodies ne sont qu’une reprise de la chanson Tayer ya Hawa (l’amour est dans l’air), interprétée en 1970 par Mohamad Rochdi et composée par le célèbre Baligh Hamdi.
Les plateformes défient le confinement. Plus besoin de louer un studio et de trouver une maison de disques. Désormais, un morceau peut être écrit, composé, enregistré et diffusé en quelques heures, et très vite devenir « viral » grâce aux plateformes. Mais tous ces morceaux laisseront-ils une trace? Pas sûr .
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