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Des films pour sauvegarder la mémoire

Saad El-Qerch, Mardi, 23 avril 2019

Le Festival international des courts métrages, des documentaires et des films d’animation d’Ismaïliya s’est achevé le 16 avril. Plus de 80 films de qualité y ont été projetés, dont plusieurs explorent l'histoire et la mémoire collective.

Amal Ramsis a décroché le prix du jury de la Fédération internationale des critiques de films.
Amal Ramsis a décroché le prix du jury de la Fédération internationale des critiques de films.

Ismaïliya,

De notre envoyé spécial —

Il est évident que le jury de la 21e édition du Festival des courts métrages, des documentaires et des films d’animation, qui s’est tenu du 10 au 16 avril à Ismaïliya, avait un penchant particulier pour les films qui cherchent à reconsti­tuer la mémoire. Parmi les films primés, il y a eu ceux qui ont essayé de capter un moment pré­cis et de le restituer, ceux qui ont rendu hommage à des pionniers de l’art et ceux qui ont creusé dans la mémoire collective pour mettre en exergue certains détails et histoires extrêmement humains.

Le coup d’envoi du festival a été donné par le film d’ouver­ture, le documentaire anglo-amé­ricain We Are Not Princesses, des réalisateurs Itab Azzam et Brigitte Auger. En 75 minutes, celui-ci relate le drame des réfu­giées syriennes à Beyrouth, qui tentent de raconter leurs espoirs et leurs vies en montant la pièce classique Antigone. Et ce, via la participation à un atelier organi­sé par la fondation Open Art.

L’harmonie entre le critique Essam Zakariya, président du festival, et le directeur du Centre national du cinéma, Khaled Abdel-Galil, a mené à une édi­tion réussie et variée. Plusieurs cinéastes et critiques ont pris part aux divers activités et colloques du festival. La publication d’ou­vrages sur la critique cinémato­graphique était l’un des événe­ments attendus du festival : Ossama Fawzi, l’homme qui a vécu deux fois, Saïd Al-Chimi, l’oeil voyant, Borhan Olwéya, récit d’exil, et Attiyate Al-Abnoudi, l’ambassadrice des pauvres.

76 films ont participé aux com­pétitions différentes: courts et longs documentaires, films d’animation et courts métrages de fiction. Il y avait également 12 films projetés hors compéti­tion, à travers la section Panorama, dont Ikhwan Al-Nazi (les frères du Nazi) de Géhane Yéhia. Celui-ci retrace les liens entre Adolf Hitler et Hassan Al-Banna, le fondateur de la confrérie des Frères musulmans, expliquant que les noms d’Al-Banna et du cheikh Amin Al-Husseini, le grand mufti de Jérusalem, figuraient sur les listes d’accusation du procès de Nuremberg, mais ont été rayés à la dernière minute. Car, dit la documentariste, les puissances colonialistes avaient besoin des organisations religieuses de droite pour dissoudre l’unité nationale dans leurs pays.

Où est allé Ramsès ?

Saïd Al-Chimi.
Saïd Al-Chimi.

Le prix du meilleur long docu­mentaire a été décerné au film égyptien de Amr Bayoumi, Ramsis Rah Fein ? (où est allé Ramsès ?). Le film explore le lien qu’ont tissé les Egyptiens, au fil des ans, avec la statue colossale de Ramsès, placée pendant plus de 50 ans devant la gare centrale du Caire. La place, face à la gare, continue de s’appeler la place Ramsès, même si la statue n’y est plus depuis août 2006. Le comité du jury a trouvé que le documen­taire avait réussi à évoquer l’his­toire collective du pays à travers de petits récits personnels.

Il en est de même pour le docu­mentaire de 80 minutes de la réa­lisatrice égyptienne Amal Ramsis, qui a décroché le prix du jury de la Fédération internationale des critiques de films (FIPRESCI) et le prix de l’Union africaine, avec son film Taätoune Min Baïd (vous venez de loin), qui a déjà récolté plusieurs prix un peu partout dans le monde. Au bout de dix ans de recherche autour de la guerre civile espagnole et le rôle des brigades arabes qui y ont partici­pé, la réalisatrice a choisi de cen­trer son histoire autour du person­nage d’un intellectuel palestinien de gauche, Najati Sedqi (1905-1979), dont le parcours est très peu connu. Celui-ci cherchait à défendre la liberté dans l’absolu, à Jérusalem où il est né, ou en Espagne où il a lutté contre Franco avec les Républicains. En racontant l’histoire privée de la famille de Sedqi, membre du parti communiste, elle parvient à nar­rer l’histoire plus générale de plu­sieurs militants qui ont payé cher le prix de la liberté.

Al-Gahim Al-Abyad (l’enfer blanc), des réalisateurs égyp­tiens Ahmad Assem, Mahmoud Khaled et Omar Chach, a reçu le prix spécial de la compétition des documentaires courts. Il aborde les conditions de vie des ouvriers qui taillent les pierres en pleine montagne contre 50 L.E. par jour et souffrent de graves problèmes de santé. D’un film à l’autre, le festival est ainsi parvenu à dessiner des tranches de vie, dont l’ensemble restitue le cadre plus large de notre mémoire collective.

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