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Un air de changement souffle sur la Croisette

Yasser Moheb, Mardi, 08 mai 2018

La 71e édition du Festival de Cannes, qui se tient du 8 au 19 mai, est placée sous le signe des nouveautés, avec notamment une modification de la grille des projections. L’Egypte participe avec Yomeddine en compétition, à côté d’une série de longs métrages arabes et africains. Tour d’horizon.

Un air de changement souffle sur la Croisette

Cannes,

De notre envoyé spécial —

Le coup d’envoi de la 71e édition du Festival de Cannes, qui se tient du 8 au 19 mai, est donné. 21 films de 15 pays sont en compétition, avec par ailleurs plusieurs surprises dans les codes et les traditions de la fête du cinéma la plus glamour au monde. Unifiant grands noms et jeunes talents du septième art, l’édition de cette année s’avère être l’une des plus riches et des plus diversifiées de l’histoire du festival.

« Faire bouger les choses », surtout à l’âge de 71 ans, tel était le souhait des organisateurs du Festival de Cannes pour cette nouvelle édition. Modification de la grille des projections, changement du calendrier, interdiction de selfies et règles strictes pour Netflix : Thierry Frémaux, le délégué général de la manifestation, vient d’annoncer une série de modifications pour raviver « l’engouement des festivaliers ».

Première modification notable, le festival a débuté cette année — et pour la première fois de son histoire — un mardi, pour se terminer le samedi. Un jour plus tôt donc. « Le mardi est un jour d’avant-premières, ce qui est parfait pour le film d’ouverture qui sort le lendemain en France et gagne ainsi une journée d’événementialité, a indiqué Frémaux.

Le deuxième changement, et aussi le plus controversé pour les professionnels du cinéma, est la fin des avant-premières presse pour les films de la sélection. Les journalistes découvrent donc les longs métrages en même temps que le public, durant leurs premières projections officielles, « afin de redonner toute leur attractivité et tout leur éclat aux soirées de gala ». Le délégué général du festival n’a pas manqué d’attirer la colère d’une grande partie des journalistes suite à cette décision.

Pas de selfie, pas de Netflix

Un air de changement souffle sur la Croisette
Every Body Knows, film d’ouverture.

Autre changement de taille : les selfies seront interdits sur le tapis rouge et les fautifs seront interdits de projection. C’est ce qu’a indiqué la direction de la manifestation. D’après les organisateurs, « on vient à Cannes pour voir et pas pour se voir ». Ce règlement a pour but de renouer avec « l’élégance » d’antan du plus grand festival de cinéma. Pour ce qui est de l’absence de films produits — ou dont les droits sont détenus — par Netflix, qui avait suscité la controverse l’année dernière en présentant deux films en compétition (films qui ont seulement été diffusés en ligne sur la plateforme du géant de la vidéo), elle est justifiée par le fait que ces oeuvres ne sont pas diffusées en salles. Cette année, tout film en compétition, selon le nouveau règlement cannois, doit sortir dans les salles françaises.

Les films produits par Netflix ou d’autres plateformes ne feront donc pas partie de la sélection, mais pourraient tout de même être projetés hors compétition, étant donné que le géant américain refuse de présenter ses films dans les salles, se contentant uniquement de leur projection dans les festivals internationaux.

L’affiche du festival offre cette année la vedette à Jean-Paul Belmondo et Anna Karina, couple mythique de Pierrot le fou, long métrage culte de Jean-Luc Godard, sorti en 1965. Alors qu’il vient de fêter son 85e anniversaire, Belmondo est parmi les stars reçues chaleureusement sur la Croisette, afin de revivre les beaux souvenirs d’antan. L’acteur français Edouard Baer a, quant à lui, été choisi une nouvelle fois par le festival pour le poste de maître de cérémonie de la soirée d’ouverture. Baer fait ainsi son retour à ce poste honorifique, occupé l’année dernière par l’actrice italienne Monica Bellucci et qu’il a déjà tenu à deux reprises, en 2008 et en 2009.

Alors que l’année cinématographique a été marquée par la lutte contre le harcèlement sexuel, notamment via le mouvement Time’s Up, et pour l’égalité femmes-hommes, Cannes s’est symboliquement choisi pour présidente une actrice engagée contre le harcèlement, qui n’est autre que la comédienne australienne Cate Blanchett. Présidé par l’actrice de Carol, acclamé sur la Croisette en 2015, le jury, composé de cinq femmes et quatre hommes, comprend les actrices Kristen Stewart (Etats- Unis) et Léa Seydoux (France), les réalisateurs Denis Villeneuve (Canada) et Robert Guédiguian (France) ainsi que l’acteur chinois Chang Chen, la scénariste américaine Ava DuVernay, la chanteuse burundaise Khadja Nin et le réalisateur russe Andreï Zviaguintsev.

De nouvelles têtes

D’autres nouveautés pour cette cuvée 2018 ? Oui. Elle est marquée par un « fort renouvellement générationnel de cinéastes, de gens dont vous avez peu ou pas entendu parler », ont prévenu les organisateurs. Si des vétérans tels le Franco-Suisse Jean-Luc Godard et l’Américain Spike Lee font leur grand retour sur la Croisette, d’autres grands noms tels Paolo Sorrentino, Jacques Audiard, Xavier Dolan, Terry Gilliam, Claire Denis ou encore Terrence Malick n’ont pas été retenus. Mais aussi des cinéastes sous surveillance dans leur pays, comme l’Iranien Jafar Panahi et le Russe Kirill Serebrennikov, sont en compétition avec des oeuvres qualifiées par les sélectionneurs d’importantes. Pour cette 71e édition, placée sous le signe de l’engagement politique, une demande a été adressée au Kremlin et à Téhéran pour permettre la venue de cinéastes, tous deux assignés à résidence dans leur pays.

Leto, de Serebrennikov, raconte l’histoire du rock à l’époque de l’URSS de Leonid Brejnev, tandis que le film de l’Iranien, Three Faces, est un road-movie serein. Parmi les noms attendus surgit celui du Turc Nuri Bilge Ceylan. Palme d’or 2014 avec Winter Sleep, le cinéaste revient sur la Croisette avec Le Poirier sauvage, l’histoire d’un homme qui rêve d’être écrivain et retourne dans son Anatolie natale. Toutefois, les dettes de son père vont fatalement finir par le rattraper. Un film qui dure plus de 3 heures, presque une habitude pour Ceylan. Par ailleurs, le Polonais Pawel Pawlikowski (Oscar du meilleur film étranger en 2015 avec Ida) est présent avec Zimna Wojyna (guerre froide), tourné en noir et blanc et produit par Amazon, alors que l’Italienne Alice Rohrwacher, l’une des trois réalisatrices femmes en lice cette année, vient pour la deuxième fois sur la Croisette, avec son film Lazzaro Felice.

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