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La ville en marche

Névine Lameï, Mardi, 11 juillet 2017

Trois artistes suisses, Alessandra Respini, Jan Bachmann et Lorenz Rieser, nous font découvrir leur manière de voir Le Caire, au terme d'un atelier artistique de six mois, organisé par Pro Helvetia.

La ville en marche
Miroir en main, le visiteur de la galerie découvre les dessins, sur le plafond, représentant la ville.

Alessandra respini, Jan Bachmann et Lorenz Rieser sont trois artistes suisses qui exposent à la galerie Machrabiya, à l’issue d’un atelier de six mois organisé par la fondation culturelle suisse Pro Helvetia. Sous le titre J’ai un estomac sensible !, elles montrent des dessins en noir et blanc, plutôt proches de la bande dessinée, tous collés au plafond. Ainsi, les visiteurs reçoivent un petit miroir en entrant, leur permettant de découvrir les dessins agencés sur le plafond, sous la forme d’une chèvre. Ils opèrent ainsi une sorte de ballade interactive, guidée par des flèches indiquant le sens de la visite, afin de mieux suivre les changements de la ville, dessinés par les trois artistes-femmes. En fait, il s’agit d’innombrables histoires fantaisistes disjointes lesquelles disent long sur la ville, de manière ironique.

Les trois artistes suisses ont tout d’abord étudié le plan de la galerie Machrabiya, afin de mieux exploiter la surface. « Nous avons choisi de représenter la ville sous la forme d’une chèvre. Car celle-ci est un animal gourmand, qui se trouve aussi bien en Suisse qu’en Egypte. Il peut tout digérer, mange un peu le tout et il est d’une nature sociable et indépendante », explique Lorenz Rieser, qui dessine surtout une chauve-souris, revêtant l’allure d’un super héros (Batman) ou d’une femme portant le voile intégral. Et parfois, il dessine un poulet, nous faisant suivre les diverses phases de sa cuisson et de sa digestion, comme pour symboliser les métamorphoses de la ville, passant elle aussi par plusieurs phases jusqu’à son anéantissement. A un moment donné de la visite, on se trouve juste au-dessous de l’estomac de la chèvre, celui qui digère tout, qui intègre tout, à l’image de la ville. Les dessins sont de plus en plus nombreux, denses, ils abondent en personnages caricaturaux qui marchent, flânent, traversent les rues, trottinent, vagabondent ... De quoi donner corps à la ville. Une ville grouillante, constamment en marche.

Parvenir au jardin exotique

« Mes dessins ne sont pas des études sociologiques sur la ville. Ils sont davantage une perception générale de ce qu’elle est à mes yeux. Au long de mes séjours cairotes, j’ai fait ces dessins qui racontent des histoires que l’on peut interpréter chacune à sa manière, selon sa perception », déclare Alessandra Respini. Cette dernière place l’homme au centre de ses dessins et conçoit l’espace urbain comme étant un espace anthropologique, incrusté de symboles, de métaphores et de rhétoriques. Ses protagonistes sont souvent emprisonnés dans des cadres nuageux, désorientés, perdus en ville, en quête de liberté. En continuant la visite guidée par l’oeil de ces trois artistes étrangères, on atteint la dernière phase de l’exposition, celle revêtant la forme de la queue d’une chèvre. « Nous avons choisi de colorier cette dernière phase en dessinant directement sur le mur au lieu de recourir aux dessins sur papier collé », souligne Rieser.

La ville renaît, se renouvelle constamment en intégrant ses citadins. C’est d’ailleurs la phase la plus gaie de la ballade en ville qui se livre en couleurs. Une fois la ville a tout digéré, les déchets se transforment en plantes vertes et fleurs, c’est le « jardin exotique », comme l’appellent les artistes.

Jusqu’au 13 juillet, à la galerie Machrabiya, de 10h à 20h. 8, rue Champollion, centre-ville.

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