Dimanche, 13 octobre 2024
Al-Ahram Hebdo > Arts >

Bras de fer et preuve d’innocence

Yasser Moheb, Jeudi, 22 juin 2017

Dans le feuilleton télévisé Kalabch (menottes), le comédien Amir Karara et le réalisateur Peter Mimi dépeignent la relation de plus en plus critique entre la police et la société, surtout en période post-révolutionnaire.

Bras de fer et preuve d’innocence
Amir Karara, un policier qui veut blanchir sa face.

Après avoir joué dans plusieurs feuilletons à succès, Al-Mowaten X (citoyen X), Taraf Talet (troisième partie), Hawari Bokharest (ruelles de Bucarest) et Al-Tabbal (le joueur de tambour), le comédien Amir Karara retrouve, ce Ramadan, un de ses personnages préférés : beau gosse, robuste, dynamique, et surtout un policier qui a une certaine philosophie face à la violence. Sans trop gâcher l’histoire, il s’agit ici d’un policier, Sélim Al-Ansari — interprété par Amir Karara — qui mène une vie professionnelle pleine de succès en tant qu’officier des forces spéciales, puis en tant qu’agent d’enquête, avant de faire face à des problèmes inattendus et de devenir injustement accusé de tuer un jeune étudiant en prison lors des enquêtes. La vie du policier chambarde certes, et le pousse à fuir et à devenir, du jour au lendemain, le coupable leplus recherché par la police, ainsi que par toute la société. Voilà, c’est pour le côté thriller, car en réalité, c’est bel et bien un drame social et une oeuvre d’action que nous avons sous les yeux.

Dans cet univers tendu, poursuites, scènes d’action, fusillades et assassinats successifs s’enchaînent, selon un rythme agité montant en crescendo. Le héros du film, couvert souvent de noir, aux expressions pleines le plus souvent d’amertume, aux aventures parfois involontaires et à l’allure du policier moderne par excellence, n’épargne rien afin de prouver son innocence.

Une série d’événements et de scènes d’action, tantôt raisonnables tantôt agités, prend alors place, mais sans faire oublier au spectateur le thème assez controversé et alarmant de l’oeuvre le policier aux yeux de la société égyptienne, au lendemain de la révolution. Ceux qui apprécient l’oeuvre trouvent qu’elle met en lumière l’aspect humain des agents de police, parfois innocents, même s’ils sont parfois impliqués dans des actes de violence. Et les détracteurs accusent le feuilleton de vouloir sauver l’image des policiers.

Mais comment définir et associer deux termes apparemment contradictoires : le policier héros et l’accusé marginal ? La réunification thématique pose problème, en effet. Car le policier appartient le plus souvent à une catégorie de héros vaillants, admirés par la grande majorité, alors que le marginal, jugé corrompu et abusif, reste souvent diffamé, ou au moins un électron libre. Le premier est du côté de l’ordre et des valeurs morales, alors que le second représente l’engrais du désordre et de l’immoralité. Toutefois, il ne peut y avoir de société sans héros et sans marginaux ou coupables, c’est ce que cherche à prouver et à discuter le feuilleton.

Relation toujours épineuse
Le scénariste, Baher Doweidar, signe une histoire complexe et énergique, inspirée d’une trame éditée par Youssef Hassan Youssef. Nombreuses sont les oeuvres égyptiennes et occidentales qui ont traité le thème du policier qui se transforme volontairement ou involontairement en coupable, d’où certains procédés dramatiques déjà vus à travers des personnages bien écrits dans un script prenant et bien ficelé, cadencé par de l’action et du suspense. Doweidar a créé, à partir de cette trame, oscillant entre le réaliste et le fictif, une estrade qui nous permet de voir la relation police-société, sous un angle différent. Côté interprétation, les comédiens sont presque tous convaincants, surtout Amir Karara dans le rôle du policier qui lui colle à la peau. Nous retrouvons un Karara au meilleur de sa forme et de bonnes scènes d’action, notamment celles des confrontations avec les adversaires. Il impressionne de par son physique et son attitude, tantôt sereine tantôt agressive. L’une des surprises également est Mahmoud Al- Bezzawi dans le rôle de l’investigateur de police assez humain et posé. Tout comme Mohamad Loutfi dans le rôle du voleur fugitif, mais qui garde sa bonne foi.

Le réalisateur Peter Mimi a réussi à doser violence et douceur, ou plutôt humanité. Il tombe quand même parfois dans le cliché des truands et des hommes de bras devenus à la mode dans le drame égyptien post-révolution. L’image est assez adéquate à l’intrigue, avec des plans mettant bien en valeur l’entourage et la culture des personnages. Le montage signé Ahmad Medhat et la bande musicale, composée par Mohamad Medhat, offre à l’oeuvre un rythme convenable au thriller. En résumé, un feuilleton d’action, une oeuvre qui remplit parfaitement sa mission : captivant, de l’action, quelque suspense et un héros comme on aime voir. De quoi expliquer ses records d’audimat.

Mots clés:
Lien court:

 

En Kiosque
Abonnez-vous
Journal papier / édition numérique