Amjad Abu Al-Ala ( Photos : Amal Mustafa)
Al-Ahram Hebdo : Comment êtes-vous arrivés à la réalisation du film documentaire ?
Amjad Abu Al-Ala : Je peux me présenter ? (Rires). Je m’appelle Amjad Abu Al-Ala, je suis Soudanais né et j’ai grandi aux Emirats arabes unis. En fait, j’étais dans la production et la réalisation dès mes premières années à l’université. J’ai une licence en médias et communication de l’Université de Dubaï. A la base, je suis un homme de théâtre. Ma dernière pièce vient d’être récompensée à Doha en janvier dernier. Jusque-là, je n’ai fait que des courts métrages qui ont obtenu beaucoup de récompenses et qui ont eu un assez bon écho dans des festivals arabes et non arabes. Malgré mon travail dans l’univers audiovisuel, j’ai eu un penchant exclusif vers le documentaire, je ne voulais pas tomber dans le cercle des émissions, news, téléréalité, etc. D’ailleurs, mon plus grand combat est de concilier mon instinct cinématographique et les différents contextes de l’audiovisuel. Ma première vraie aventure a démarré après avoir réalisé mon projet de fin d’études, un court métrage intitulé « Au trottoir de l’âme ».
Samouté Andrey Diarra : Je suis Andrey Diarra, je suis né en Côte d’Ivoire, avant de déménager à l’âge de 11 ans au Mali. Ma trajectoire dans la réalisation est différente. Avant de l’entamer, j’étais diplômé en économie et marketing de l’Université de Bamako. Ensuite, j’ai enchaîné des postes dans mon domaine, avant de tout abandonner et de réaliser mon rêve de créer une boîte de production musicale appelée DS Production. J’ai ensuite réalisé des clips musicaux et des films institutionnels. Je me suis vraiment mis au cinéma après avoir suivi des ateliers. J’ai intégré une formation documentaire organisée par le réseau Africadoc à Tombouctou (Mali), avant de participer au Festival international du film documentaire d’Amsterdam (IDFA) en 2007 en tant que producteur exécutif sur le film Bambara Blues de la réalisatrice hollandaise Jacqueline van Vugt. En 2010, j’ai obtenu une bourse de Master de production de documentaire de création de l’Université de Grenoble (France)
Samouté Andrey Diarra ( Photos : Amal Mustafa)
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— Comment évaluez-vous le cinéma africain et notamment le problème du financement ?
A.A.A. : Je dois vous avouer que c’est la première fois que je suis confronté au cinéma africain avec ses réalisateurs et ses scénaristes. Une découverte !! En fait, dans ma tête, il y a deux cinémas en Afrique, celui de l’Afrique du Nord et celui du Sud. Si on prend l’exemple de mon pays le Soudan, on voit clairement que le pays oscille entre identité arabe et identité africaine. Ceci s’est clairement distingué lors de la création de la République du Soudan du Sud. Moi jusque-là, je pense que mon cinéma est soudanais ! Ce qui m’a frustré c’est l’absence de longs métrages soudanais, à travers ce festival. En ce qui concerne la question du financement, je tiens à préciser que les clichés sur l’argent qui circulent à flots dans les pays du Golfe sont faux ! Les Emiratis eux-mêmes galèrent, les investissements donnent la priorité à d’autres secteurs que celui de la production cinématographique. Mes courts métrages ont été faits par mes propres moyens ou dans le cadre d’ateliers. Mais je suis vraiment ravi d’être le premier représentant du Soudan dans ce festival, j’en ressentais la nécessité.
S.A.D. : Le cinéma africain n’a toujours pas la place qu’il mérite. Il est triste de constater qu’il est encore sous l’emprise de plusieurs clichés de guerre. C’est la raison pour laquelle je me suis intéressé aux films documentaires, dans un souci de valoriser la richesse culturelle qui se perd de jour en jour. Certes, le continent africain souffre, mais c’est à ma génération de soulever le côté positif de ces peuples, ce côté coloré, musical, joyeux, ce côté d’unité, car j’estime que l’Afrique est un tout. Je n’aime pas utilisé les termes Afrique blanche/noire. Pour ce qui est du financement, il est douloureux de tendre la main au Nord pour financer nos projets. Des fois, on grignote au même guichet que nos aînés. Chez nous, il y a un proverbe qui dit : « Il pleut, il y a tonnerre, il faut se couvrir la tête », c’est ce qui nous arrive en cette période de crise que traverse l’Europe. Sur ce plan, le Niger est l’un des rares exemples à investir de l’argent des contribuables dans le cinéma. Et à mon avis, c’est le premier pas de conscience des autres pays africains.
— Est-ce que ce festival vous inspire pour les étapes à venir dans vos carrières, de nouveaux projets en perspective ?
A.A.A. : Oh que oui, après ce festival, je ferai en sorte de mettre en oeuvre mes projets de longs métrages et pourquoi pas les présenter dans les prochaines éditions ? En ce moment, deux projets sont en cours. Le premier est un long métrage intitulé « La Fantaisie du Soudan » et le deuxième est un documentaire qui suit le parcours de deux activistes soudanais et égyptien, avec un focus sur la révolution égyptienne et ses échos au Soudan.
S.A.D. : Le flot d’idées est déjà venu lors du festival de Rotterdam (rires), mais je suis plus que ravi que mon documentaire ait comme nouveau quai la compétition officielle du Festival de Louqsor. Cela m’a permis de faire des rencontres fabuleuses et très inspiratrices. Actuellement, j’ai trois projets de longs métrages en plan qui nécessitent des financements, mais aussi un travail de scénario de ma part .
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