Les habitants se mobilisent pour défendre leur cause écologique.
Bab Al-Charqi est le nom de l’une des 7 portes de la capitale syrienne. Le quartier est connu pour abriter l’ancienne Damas, celle qui grouillait, avant le déclenchement de la révolution, de bazars, de touristes et d’échoppes en tous genres.
Parler de l’ancienne Damas, c’est également évoquer le métissage ethno-religieux dont la réputation a fait le tour du pays. Seulement voilà, au lendemain de la révolution qui a divisé le pays entre sympathisants et opposants au régime, on entend désormais parler dans cet endroit de la ville d’histoires de scission politique au sein même des familles.
L’histoire de Bab Al-Charqi tourne autour de ces divisions familiales. Le scénariste, qui s’est inspiré de la vie des ruelles de ce quartier zoome sur le quotidien de deux frères jumeaux que beaucoup de similitudes unissent, mais qui ont frôlé le fratricide à cause de leurs penchants politiques.
Si, aux yeux de l’un, Bachar Al-Assad est le garant de la Syrie libre et indépendante, l’autre ne lésine pas sur les qualificatifs pour décrire la sauvagerie du président et son manque de scrupule.
Pour le réalisateur et producteur égyptien du film, Ahmad Atef, « s’il est vrai que l’actuelle révolution syrienne est un sujet politique, voire le sujet politique du moment, Bab Al-Charqi se veut humain et social avant toute chose. J’ai puisé l’ossature du film dans la houleuse bataille des révolutionnaires syriens contre le régime de Bachar. J’ai tiré les scènes et les dialogues dans les expériences qui m’ont été relatées par des Syriens faisant partie des deux camps. Le choix de l’endroit, lui, n’a pas été fortuit. La vieille Damas, recroquevillée au coeur de son immense portail, jadis connue pour sa tolérance et son dialogue ethno-religieux, est aujourd’hui connue pour ses histoires à couper le souffle ».
Le film est le premier long métrage à s’être penché sur une question qui relève de l’atrocité, à savoir celle d’un pays qui se divise et s’entretue dans une guerre qui ne semble avoir d’issue.
Pour Farhan Matar, artiste syrien qui a incarné le rôle d’un supporter inconditionnel du régime de Bachar dans le film : « L’idée est de braquer les regards sur la citoyenneté qui est une réalité que les médias ne réussiront jamais à cacher. Quoi que l’on dise, le peuple syrien ne cessera jamais de vouloir retrouver sa stabilité d’antan. Et ce n’est que grâce à des films insistant sur le caractère sacré de la citoyenneté que la révolution syrienne pourra aboutir à ses fins ».
Jouant le rôle du père des jumeaux, l’acteur syrien démontre que la quasi-totalité des Syriens qui ne jurent que par le président Assad bénéficient d’un poste de haut placé ou d’une prospérité financière qui dépasse la moyenne. Ceux-ci réussissent, aidés par leurs discours persuasifs, à convaincre leurs proches de soutenir Al-Assad et les « Chabbihs », les féroces gardiens du régime. Favoritisme social et opportunisme des classes seraient donc les mots-clés de ce film.
Chemin faisant, les scènes du film tissent les tenants et aboutissants d’un quotidien digne du parcours du combattant. Les opposants au régime et ses hommes de main sont assimilés à d’indomptables rebelles, voire à des êtres qui menacent l’opulence de la bourgeoisie syrienne, très proche du régime de Bachar.
« L’idée d’opter pour des phrases et scènes crues et de zoomer sur le quotidien d’une famille réunie par le sang et séparée par les tendances politiques permet de parler d’une manière directe aux spectateurs. De même, le choix de ne pas prendre position dans le scénario n’est pas sans but. Ceci permettra au public du film de choisir librement son camp », ajoute le réalisateur Ahmad Atef, qui a également réussi à assassiner le président syrien … dans son film !
Réfugiés en Egypte
Ahmad Atef nous trace également l’itinéraire de ces réfugiés syriens — souvent activistes — qui ont trouvé refuge en Egypte. Ceux-ci, comme l’illustrent plusieurs scènes du film, jurent fidélité à la sacro-sainte révolution de leur mère patrie. Pays qu’ils ne quittent pas par lâcheté, mais par dignité, en attendant d’y retourner lorsque les conditions le permettront.
Le montage du film tourné entre la Syrie et l’Egypte, lui, nous joue des tours. En effet, le décor et le tournage sont tellement bien tissés qu’ils se dissipent et se fondent dans des scènes et des situations semi-réelles.
Réalisée et produite par des fonds indépendants, la première oeuvre cinématographique à avoir daigné se plonger dans le massacre syrien a brillé sous les feux des projecteurs lors du Festival panafricain FESPACO de Ouagadougou.
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