Des musiciens français revisitant le folklore d'Egypte.
Il est 19h30 à l’Institut français de Mounira. La salle, où se déroule le concert du groupe Egyptian Project, est déjà fermée, archicomble. « C’est à cette heure-ci que devait commencer le concert ! », hurlent d’une seule voix une cinquantaine de retardataires. Les fans fidèles du groupe sont arrivés à l’avance et ont pris toutes les places disponibles. Le groupe, qui n’en est pas à son premier passage au Caire, connaît un succès fulgurant. A l’intérieur de la salle, les premières percussions du maître Ragab Sadek se font déjà entendre. Le violoniste Salama Metwally ouvre le bal sous un tonnerre d’applaudissements en sortant son rebab (instrument à deux cordes).
Face à ce climat d’émerveillement, les premiers sons de darbouka (percussions) se fondent en une symbiose réussie avec l’argoul (double clarinette égyptienne). Le tout est accompagné de quelques légères sonorités occidentales, de hiphop et de trip-hop, signées par le Nantais Jérôme Ettinger, leader du groupe, sans oublier les percussions à la batterie d’Anthony Bondu, alias Antho … de quoi donner lieu à une jonction musicale hors du commun. « Cela fait une quinzaine d’années que les sonorités traditionnelles égyptiennes m’éblouissent.
Quand j’étais plus jeune, les instruments du Delta du Nil, dont je ne connaissais même pas le nom, me séduisaient et m’ont toujours donné envie d’apprendre à les maîtriser. Aujourd’hui, j’ai réussi à monter un groupe avec l’aide de quelques artistes traditionnels, dont la réputation dépasse les frontières de l’Egypte », raconte Jérôme Ettinger, non sans joie.
« Quand il nous arrive de nous déplacer en France, le public européen est plutôt attiré par le côté exotique des instruments égyptiens, dont il ne soupçonnait pas l’existence, mais en connaissait la beauté. Lorsque nous nous produisons en Egypte, notre public cairote, alexandrin ou saïdi est surtout charmé par la fusion des sonorités égypto-européennes, mais aussi par la présence sur scène de deux musiciens français », poursuit-il. Le choix de ce métissage des mélodies et des instruments n’est pas le fruit du hasard.
Au commencement fut l’envie de se démarquer des formations musicales qui se cantonnent dans les registres habituels, monocatégories ou les groupes qui chantent pour une cause unique. Quant aux paroles et aux chants de Sayed Emam, ils renvoient tantôt aux célèbres chansons traditionnelles égyptiennes, tantôt aux chants religieux des mouleds (commémoration d’un saint). Parfois même ils nous rappellent vaguement une liberté perdue dont un peuple, assoiffé d’indépendance, ne cessera jamais de parler.
Au sein du groupe, Jérôme Ettinger n’est pas le seul Français à s’être laissé séduire par la magie des sonorités égyptiennes. Anthony Bondu jubile. Derrière sa batterie, c’est un être joyeux qui se trémousse au moindre son et à la moindre réaction d’un public enthousiaste. « L’instrument égyptien qui m’a littéralement séduit est l’argoul. Depuis que j’ai connu cette perle musicale, il y a une dizaine d’années, je ne rêve que de jouer au sein d’un groupe égyptien. C’est désormais chose faite. Aujourd’hui, je me sens chanceux d’avoir pu réaliser cette ambition qui me hantait depuis très longtemps », affirme le jeune batteur.
Langue universelle
C’est dans un langage exempt de xylolalie que Ragab Sadek nous parle de son expérience au sein du groupe. Pour le roi des mawwals (chant traditionnel parsemé d’adages populaires) : « La musique est le seul domaine au monde qui n’a pas besoin de traduction. A titre d’exemple, lorsqu’un public est incapable de comprendre la langue d’un chanteur, seuls les instruments musicaux peuvent transporter les émotions humaines des musiciens sur scène. Des sensations telles que la mélancolie, la joie, l’optimisme, le pessimisme ou le rêve, se dissipent pour donner naissance à des sonorités qui parviennent facilement aux pensées de son destinataire, à savoir le public ».
L’expérience de la formation Egyptian Project rappelle, de part son mélange égypto-français, celle du métissage musical des deux albums de « Mozart l’Egyptien ». Et quand on sait que des compositeurs comme Mozart vouaient un grand amou Quant au groupe Egyptian Project,Project, son succès auprès des habitués de l’Institut français de Mounira a été tel que les insatisfaits (ceux qui ont dû rester collés à la porte à moitié ouverte de la salle du concert) ont demandé avec insistance à la direction du centre de reprogrammer le même concert le lendemain. Et à la suite de négociations immédiates avec les membres du groupe, leur demande a été exaucée : un deuxième concert a eu lieu le lendemain. Force est de constater que la formation a du succès. C’est le moins qu’on puisse dire … .
Le 14 février, à 20h, à l’IFE d’Alexandrie.
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