Il faut l’admettre, l’égyptologie et l’ère pharaonique resteront pour Hollywood un sujet charmant, donnant vie à un grand nombre de longs métrages durant les quelques dernières décennies. Cependant, Kings of Egypt (les rois d’Egypte) peut être considéré parmi les plus faibles et les plus bancals de cette catégorie de fiction.
Ayant pour titre Gods of Egypt (les dieux d’Egypte), mais distribuée et projetée en Egypte et dans le monde arabe sous le titre commercial de Kings of Egypt (les rois d’Egypte), par souci d’échapper à la censure, cette nouvelle fiction ou plutôt science-fiction américaine signée Alex Proyas peut être facilement classée comme film d’action, de suspense ... bref, tout sauf une oeuvre historique. On y suit le conflit entre les anciens rois de l’histoire pharaonique, dits dieux, une simple occasion pour présenter aux spectateurs toute une série d’aventures et de combats avec le mal sur un fond pharaonique, pris de la fameuse légende de transmission du pouvoir et du règne d’Osiris, Rê, Horus et Set.
Interprété par un nombre de comédiens euro-américains, sans aucun acteur égyptien ni même arabe, les événements de ce film d’aventures se déroulent à une époque ancestrale durant laquelle les dieux des légendes pharaoniques vivaient parmi les hommes et où la paix régnait. Mais Set — connu dans l’histoire pharaonique sous le nom de dieu du désert — qui aspire au pouvoir, assassine le roi et condamne Horus à l’exil, jetant le Royaume d’Egypte dans le chaos. C’est l’intervention d’un jeune voleur, Bek, poussé par son amour pour Zaya, la beauté du Nil, qui réussit à faire libérer Horus de sa prison. Ensemble, ils se lancent dans une aventure épique qui va donner lieu à une guerre sans précédent, afin de regagner le trône.
Nourrie de cette histoire pharaonique et de ce monde légendaire et mystique, encore et toujours promoteur de choix visuels et fictifs, tant pour les cinéastes que les spectateurs, la trame se perd toutefois dans un film d’aventures et d’action exagérées.
Il faut malheureusement l’avouer : on s’attendait à un peu mieux, mais avec un sujet si vaste et une oeuvre toute prétentieuse, il ne fallait pas s’attendre à des miracles. Le résultat devient cependant assez démesuré, digne d’un jeu vidéo.
Dénué de toute crédibilité
Dès le début du film, on est en pleine ambiance pharaonique trop graphique. Sarcophages, temples, pyramides et, bien entendu, des rois, des reines et des dieux antiques. C’est presque tout pour dessiner l’ambiance de l’Egypte, un tout dénué cependant de toute crédibilité.
Sur le fond : outre les prétentions et le manque de certitude historique, nécessaires pour ce genre de drame, le film abonde d’aspects et concepts tant fictifs qu’historiques. On peut trouver les deux rois-dieux rivaux, Set et Horus, se transformant toutes les deux minutes pour devenir des dragons ou des Aliens, rien que pour suivre l’idée générale du métrage : les anciens dieux pharaoniques avaient la capacité de se transformer en des animaux et créatures légendaires, tout en portant des allures d’hommes, avec de l’or fondu dans leurs veines au lieu du sang ! Des procédés dramatiques qui pourraient donner plus de succès sur le plan des événements, s’ils étaient dans les mains d’un scénariste plus doué et créatif, ou plutôt qui vise à se servir de ces procédés et les mettre au service de l’histoire plus que celui de l’imagination.
Sur la forme, la mise en scène d’Alex Proyas est correcte pour une oeuvre qui s’est voulue trop artificielle et imaginaire. Il s’amuse bien avec les décors pharaoniques, ou ceux de l’au-delà où les rois-dieux se rencontraient. Le tout avec un travail numérique plein d’effets spéciaux, dont la majorité est bien exécutée.
Avec, entre autres, Gerard Butler, Nikolaj Coster-Waldau, Rufus Sewell, Geoffrey Rush, Chadwick Boseman, Courtney Eaton et la Française Elodie Yung, l’interprétation vient dans le film sans grand défaut, mais aussi sans grand éblouissement.
La photographie paraît assez travaillée sans être trop sophistiquée, étant donné que la composition visuelle dans le film est presque toujours née des effets graphiques, ce qui donne pourtant une allure assez homogène avec les décors, sans donner aucunement le sentiment du naturel. On est plongé jusqu’au nez dans le graphique, comme si nous suivons un Avatar ou un Star Wars à la pharaonique. Reste à souligner également la bande musicale signée Marco Beltrami, ample par son arrangement orchestral, mais qui joue toujours sur le goût Arabian, genre Sindbad ou Aladin.
Pour conclure, rien de nouveau sous le soleil de ce genre de films portant sur la civilisation et l’histoire pharaonique, sauf une haute technique visuelle. On est face donc à un énième métrage qui a cherché à se donner une teinte assez mystique en se servant gratuitement de la légende et des décors pharaoniques dans une production hollywoodienne de science-fiction, dont le tout oscille dans l’imaginaire occidental. Une oeuvre à ne pas manquer, ne serait-ce que pour ajouter un film sur la liste de l’égyptologie mal commercialisée.
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