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La diva fait peau neuve

Yasser Moheb, Lundi, 07 mars 2016

Après sept ans d’absence, la chanteuse Samira Saïd revient sur scène avec un nouvel album, Ayza Aïch (je veux vivre), qui est depuis des semaines le numéro un des ventes sur le marché. Des titres énergiques et un come-back réussi.

La diva fait peau neuve
Samira Saïd, une femme caméléon.

Il s’est fait attendre ! Le nouvel album de la chanteuse d’origine marocaine, Samira Saïd. Cette dernière a mis sept ans avant de refaire surface. Car effectivement, son dernier album Ayam Hayati (les jours de ma vie) date de 2008.

Abordant des thèmes variés mais toujours personnels, les 12 titres du nouvel album permettent d’écouter une Samira Saïd très en forme, maîtrisant sa voix à merveille, alternant vigueur et émoi. Les auteurs et les compositeurs sollicités ont pour la plupart réussi à créer un ensemble assez riche avec une bonne technique. Ce CD toujours fidèle à la voix brillante de la diva surprend par l’apport de nouveaux rythmes et paroles auxquels nous n’étions pas habitués.

La chanteuse a décidé de faire peau neuve. On le remarque dès la première chanson. L’album commence sur un ton fort avec le titre Hawa Hawa (ô vent), chanson écrite par Chadi Anouar, composée par Bilal Sorour et arrangée par Hani Yaacoub. Loin de toute platitude ou répétition, ce premier opus est, à lui seul, un grand moment d’innovation pour la cantatrice. Le refrain pousse les limites d’une voix toujours plus fine, pendant que les arrangements — essayant de présenter différemment le rythme oriental du maqsoum — font sauter et danser certains. Bref, du pop parfait.

Le titre éponyme de l’album, Ayza Aïch (je veux vivre), est écrit et composé par le jeune Mahmoud Al-Esseili. Du genre disco-transe, cette chanson reste fidèle au style de son auteur : des paroles au rythme haletant et de la mélodie un peu tirée par les cheveux pour convenir aux paroles.

Le troisième titre du tube, Ensana Masöula (femme responsable), s’annonce comme la mélodie reggae la plus directe et éclatante du CD, écrite par Nasreddine Al-Tagui et composée par Chérif Qotta. Les paroles paraissent de plus en plus bizarres et révolutionnaires. « Je ne suis pas un livre que tu lis et que tu déposes par la suite sur une étagère de ta bibliothèque. Je ne suis pas une simple peinture accrochée au mur (...) je ne suis pas un chat que tu peux enfermer sous prétexte d’en prendre soin (…) Je suis une femme responsable, qui n’accepte pas de vivre sous surveillance ». Les paroles assez défiantes sont mises habilement en musique par Ahmad Ragab, lequel excelle à montrer la flexibilité de la voix de Samira Saïd. Guitare, percussions et piano donnent l’ambiance Pink Panther, berçant entre les goûts blues, jazz, et surtout reggae.

La chanson suivante, Madmanch Nafsi (pas sûre de moi), se présente comme le premier grand slow de l’album, un auto-aveu de la confusion et des maux endurés loin du bien-aimé. De quoi marquer une rupture avec l’état d’âme prévalant sur les trois chansons précédentes. Celle-ci est plus calme, plus douce et plus orientale de par sa musique et son arrangement. Elle commence simplement mais amplement par la voix de Samira Saïd, suivie d’une guitare, enveloppée par la mélodie des violons. Le talentueux Walid Saad illustre les paroles de Nader Abdallah, de la manière la plus simple, sans grande sophistication. On peut entendre la cantatrice pousser un soupir, dans un instant calme sans musique, concrétisant l’état de chagrin et de déséquilibre sentimental.

Une diversité à toute épreuve
On peut bien le constater : Samira Saïd n’a jamais été aussi révolutionnaire et différente que sur ce morceau, Mahasalch Haga (rien ne s’est passé). On aurait pu s’en douter, puisqu’elle travaille là avec un groupe de jeunes artistes qui l’ont aidée à concevoir quelque chose de totalement frais et inattendu. Le trio, regroupant le parolier Chadi Anouar, le compositeur Bilal Sorour et l’arrangeur Hani Rabië, offre ici à Samira l’opus le plus fou artistiquement de tout l’album. Encore une histoire d’amour indocile, une idylle incomplète, rendant la chanteuse assez nonchalante envers le bien-aimé, malgré sa souffrance. Après un rythme claquette au début de la chanson, les percussions se mêlent à la trompette, dans une cadence assez vive, avant de laisser la scène libre à l’accordéon au milieu de la chanson. Cela n’est pas sans rappeler la musique jouée dans les rues parisiennes, une femme triste qui retrouve assez vite ses esprits.

Puis, il y a un retour bien mesuré au slow, avec la chanson Ehtemal Wared (fort probable). Ecrite et composée par Nader Abdallah, elle vient atténuer la violence et la vivacité de ce qui précède. Sans rien d’original, les paroles expriment les sentiments troublés d’une femme, sur des airs de tango où le piano et le violon rivalisent ensemble. Ensuite, la voix de la diva revêt des tonalités à la mélodie espagnole, mais un peu répétitive, dans Ya Latif (ô mon Dieu), qui trempe dans une sauce techno.

L’album s’achève par Hob (amour), écrite et composée par Mohamad Rahim, arrangée par Mino. Une musique jazz pour clore, laissant l’auditeur toujours sur sa faim. Samira Saïd reste une voix remarquable, à même de s’adapter à tous les styles. Tout lui va, en fait. Elle ne cesse de le confirmer.

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