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Le legs éparpillé d’Efflatoun

Névine Lameï, Lundi, 25 janvier 2016

L'héritage de l'artiste peintre Inji Efflatoun, disparue à la fin des années 1980, continue à intéresser un large public et les collectionneurs qui cherchent à s'approprier son oeuvre. La galerie SafarKhan expose actuellement une quarantaine d’oeuvres de l’artiste avec des thèmes, des dates et des lieux d’inspiration très variés.

Le legs éparpillé d’Efflatoun
Des villageoises laborieuses à la Injy Efflatoun.

Malheureusement, l’exposition actuelle d’Inji Efflatoun (1924-1989) à la galerie SafarKhan, à Zamalek, sera la dernière, cette saison. Car le neveu de l’artiste peintre et son unique héritier, l’ingénieur Hassan Galaleddine, a récemment vendu ce qui restait de son legs à des collectionneurs privés, notamment à la galerie SafarKhan qui gère le riche patrimoine d’Efflatoun, en organisant notamment des expositions annuelles. « Je suis ingénieur et je n’ai rien à voir avec le marché de l’art. J’ai souffert pendant de longues années de l’indifférence du ministère égyptien de la Culture, auquel j’ai offert environ 900 peintures de ma tante Inji Efflatoun, juste après la mort de sa soeur Gulpérie. Inji Efflatoun voulait que ses oeuvres soient regroupées dans un musée pour que le public ordinaire y ait accès. Mais ce voeu n’a malheureusement pas été exaucé. Nous n’avons pas pu lui attribuer un musée à Foustat, dans le Vieux-Caire. Notre demande a été traitée avec beaucoup d’indifférence par le ministère de la Culture. Et les toiles étaient donc enfermées depuis 1994, dans les dépôts du ministère. Nous n’avons réussi à les récupérer qu’après 2011 », raconte Hassan Galaleddine qui a intenté un procès, en 2001, contre le ministère de la Culture et a fini par obtenir gain de cause.

Après ce procès, le ministère a dû exposer, en 2005, 152 oeuvres d’Effaltoun, au palais de la culture de Hélouan. Un petit coin perdu et peu accessible au public. « Le manque d’intérêt et la négligence dont les responsables ont fait preuve m’ont choqué. Nous avons perdu 60 peintures, signées par ma tante, notamment celles qui avaient été faites en prison, entre 1959 et 1963. J’espère que ces oeuvres seront un jour retrou­vées, et qu’on pourra les exposer à la galerie SafarKhan », poursuit Galaledddine qui, entre-temps, a décidé de gérer son héritage, comme bon lui semble. « Mon dernier recours a été donc les amateurs et les collectionneurs, vivement intéressés par son travail, à défaut de pouvoir lui consacrer un musée ».

Par ailleurs, Hassan Galaleddine a offert, en 2011, au ministère égyptien de la Culture, 60 peintures et objets personnels d’Efflatoun : pinceaux, palette, diplômes, sketchs, articles de journaux, médaillons, etc. Et ce, pour qu’ils soient exposés au palais de l’émir Taz, géré par le ministère de la Culture. « La salle qui lui est consacrée au sein du palais est fermée la plupart du temps. Mais que faire ?! », s’interroge Galaleddine qui a également offert, en 2015, 40 autres peintures, à la Bibliothèque d’Alexandrie, afin d’y tenir une exposi­tion permanente.

La bienvenue de SafarKhan
Militante socialiste et figure de proue du mouvement féministe égyptien, Inji Efflatoun exprimait ses ten­dances dans ses tableaux. Ceux exposés à SafarKhan en disent long. Il s’agit d’une quarantaine d’oeuvres, variant entre peintures à l’huile, aquarelles et esquisses, témoignant de l’Egypte des années 1940-1980. Forte expressivité, couleurs chaudes et pointillisme marquent la phase surréaliste d’Efflatoun et son séjour en prison (elle a été emprisonnée en raison de ses penchants com­munistes). Un documentaire, projeté à SafarKhan, relate la vie et le parcours d’Efflatoun : Son enfance au quartier huppé de Zamalek, son adolescence passée au collège du Sacré-Coeur, son refus de poursuivre ses études universitaires en France, sa rencontre avec son maître Kamel Al-Telmessani, ses séjours à Assouan, à Louqsor, dans le Sinaï, à Akhmim, en Bosnie et en Suisse. La maison de campagne de sa famille à Kafr Chokr, qui lui a inspiré un bon nombre de ses peintures. Des peintures qui respirent la joie, dépeignent la cam­pagne égyptienne et le quotidien des villageoises labo­rieuses. Car, en dépit de ses origines aristocratiques, Efflatoun a choisi volontairement d’abandonner la vie de luxe, pour s’engager pleinement aux côtés des mar­ginalisés, des femmes et des petites gens.

Jusqu’au 28 janvier, de 10h à 21h, à la galerie SafarKhan (sauf le dimanche). Rue Brésil, Zamalek.

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