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Une révolution très douce

Névine Lameï, Lundi, 21 décembre 2015

Sur ses toiles, l'artiste-peintre, Hossam Dirar, invite toutes les femmes à voyager très loin, au-delà des contraintes sociales. Ses femmes à vélo brisent les tabous ... à la galerie Artalks.

Ame rêveuse
Ame rêveuse

A travers sa dernière exposition à la galerie Artalks, Invitation au voyage, l’artiste-peintre égyptien, Hossam Dirar, 38 ans, a recours aux thèmes de la femme et de la bicyclette, afin de parler de la liberté et de l’émancipation, sans choquer ni porter atteinte aux us et coutumes. « Mes peintures n’ont rien à voir avec le féminisme. C’est avec tact et élégance qu’elles dénoncent tout ce qui peut restreindre les libertés », affirme Hossam Dirar, qui dépeint des femmes rêveuses et vagabondes, qui aspirent à aller au-delà de tout ce qui est charnel ou trivial. Elles incarnent la beauté contre la laideur, offrant un mélange de sensations, d’émotions et de douce quiétude.

Sur les toiles, toutes les femmes de Dirar sont à vélo. Fragmentées, parce qu’elles sont en quête de liberté. Elles ont l’allure émancipée et portent des vêtements échancrés, de petites robes, des jupes volantes ou des pantalons. Les cheveux détachés, ses protagonistes se prêtent au jeu de l’illusion optique ; elles vous font tourner la tête. Sur ce, l’abstraction prend le dessus. Et les toiles sont « parfumées » de couleurs assez gaies et vivaces, se détachant sur un fond grisâtre. « C’est la vie telle que je la conçois », lance Dirar qui use du couteau et des couches superposées d’huile et de résine très fluide et dense, rappelant les couleurs de l’arc-en-ciel et offrant un beau contraste de matière et de masse. Ces couches superposées ou cette texture complexe et multicolore rappellent en quelque sorte la situation compliquée de la femme d’aujourd’hui. D’ailleurs, chaque femme sur les toiles révèle une identité qui lui est propre. L’une se veut inaccessible, l’autre imprévue, etc. Dirar creuse dans sa mémoire, afin de donner corps à des femmes anonymes qui visent à incarner toutes les femmes. L’artiste convoque des femmes qu’il a rencontrées par hasard, lors de ses multiples déplacements, partout dans le monde, dans un café, dans la rue ou dans un aéroport … « Que la pratique du vélo se démocratise ! Ce ne sera qu’un début qui conduira à la concrétisation d’autres aspirations, encore plus ambitieuses. Je rêve d’un monde arabe plus libre. Et au lieu de me livrer à des critiques acerbes, de livrer bataille contre les tabous et la pensée réactionnaire, j’ai voulu véhiculer l’image de femmes moderne et autonomes, qui rejettent les impostures sociales ou religieuses », souligne Dirar vivant à cheval entre deux mondes : l’Orient, notamment son pays natal l’Egypte, et l’Occident, précisément l’Europe où il voyage beaucoup.

Spleen
« L’exposition Invitation au voyage de Dirar nous renvoie, de manière délicate, au fameux poème L’Invitation au voyage, faisant partie des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire. Il nous rappelle donc le spleen baudelairien où le moi poétique prend le dessus. Chez Dirar, c’est le moi artistique qui l’emporte, cherchant à dire aux femmes qu’il aimerait bien les accompagner dans un voyage imaginaire, vers un pays idéal quoiqu’illusoire », commente Faten Moustapha, propriétaire de la galerie Artalks.

Il suffit donc de s’approcher des femmes à vélo de Dirar, de les contempler de près, dans leur silences et leur sérénité, afin de partager la détresse de toutes les femmes actuelles dont le sort est dominé par la fragilité, la fugacité, la solitude et la laideur. Pourtant, elles luttent, refusant de se faire avoir .

Jusqu’au 11 janvier à la galerie Artalks, de 10h à 20h. 8, rue Al-Kamel Mohamad, Zamalek.

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