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L'Egypte trois fois lauréate à Dubaï

Mohamed Atef, Lundi, 21 décembre 2015

Le Festival international du film de Dubaï a pris fin la semaine dernière, avec la projection de 134 films de 60 pays différents, dont 55 premières mondiales. L'Egypte était présente à cette 12e édition, tenue sous le slogan « Images sans frontière ».

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Nawara.

L’Egypteétait très présente, à la 12e édition du Festival cinématographique de Dubaï, qui a pris fin le 16 décembre dernier. Elle a d’ailleurs récolté trois prix à la cérémonie de clôture. Menna Chalabi a reçu le prix de la meilleure comédienne pour son rôle dans le film Nawara, de Hala Khalil, projeté en compétition officielle. Le documentaire Abadane Lam Nakone Atfalane (on n’a jamais été des enfants) de Mahmoud Soliman a décroché le prix de la meilleure réalisation. Et son métrage a été primé comme étant le meilleur film du genre. Chose inattendue, car celui-ci reprend le thème des marginaux, comme dans son film tourné en 2008, Yaïhichoune Baynana (ils vivent parmi nous). Le métrage primé à Dubaï raconte la détresse d’une mère, abandonnée à son sort avec ses 4 enfants, après son divorce. Chacun de ces derniers se livrera à un travail informel, pour aider sa mère à joindre les deux bouts. D’où le titre du documentaire, On n’a jamais été des enfants. En 102 minutes, Soliman passe d’une année à l’autre, parcourant la vie de la famille en question, adoptant un type de narration très romanesque. La caméra se faufile dans les ruelles, entre dans un magasin de jeu de billard ... à la recherche des enfants protagonistes. Puis, le réalisateur nous montre l’un de ces derniers en train de faire la vaisselle, au fond du magasin. De même, il nous promène parmi les rangs d’une école et subitement l’on reconnaît la petite protagoniste en train de balayer la classe. Ce sont des enfants privés de leur jeunesse et de leur innocence, voilà ce qui est décrit de manière très délicate par Mahmoud Soliman et qui lui a valu ses prix.

Deux mondes, deux visions

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Abadane Lam Nakone Atfalane (on n’a jamais été des enfants).

Nous promenons toujours dans les méandres de la société égyptienne, la fiction de Hala Khalil, Nawara, relate l’histoire d’une fille, du même prénom, issue d’un milieu défavorisé. La réalisatrice, étant également l’auteure du film, excelle à dévoiler le monde des démunis, à travers un texte bien ficelé, un vocabulaire bien propre à ces gens, des détails soignés et des dialogues sans factice. L’héroïne bouge entre le quartier informel où elle vit et le compound ou quartier résidentiel à la mode où elle travaille. Chacun des deux milieux a ses valeurs esthétiques, sa nature, sans que l’un semble mépriser l’autre. Il n’y a pas de regard de dédain entre les deux classes distinctes, mais l’on sent quand même la souffrance des pauvres.

La belle Nawara, sincèrement interprétée par Menna Chalabi, est satisfaite de son sort. Elle caresse le chien des gens chez qui elle travaille comme servante ; elle lui donne à manger, le nourrit de viande, alors qu’elle même n’y goûte pas très souvent. Quand les choses basculent au lendemain de la révolution de 2011, ses employeurs quittent leur maison, fuyant le pays en insurrection. Quant à Nawara, elle perd ses épargnes ; elle fut accusée de vol, et l’argent qu’elle économisait depuis fort longtemps, afin de se marier, sera confisqué par la police. Elle finira en prison, poussant un cri de révolte, comme bien d’autres Egyptiens.

Des villas du quartier résidentiel de Hala Khalil, son compatriote Mohamad Khan nous en emmène à d’autres, dans un resort hôtelier de la Côte-Nord égyptienne. Et ce, à travers son long métrage, Qabl Zahmet Al-Seif (avant le tohu-bohu de l’été), projeté aussi en compétition officielle. Peu de personnages traînent, hors saison, dans la station balnéaire de luxe. Ils sont épiés par le jardinier-coursier travaillant pour eux, de quoi nous révéler le regard que porte le réalisateur sur la petite bourgeoisie. Le film opère, tout comme Nawara, des va-et-vient entre deux classes sociales, deux mondes ... mais sans grande éloquence, ni fraîcheur particulière.

Dernier film égyptien, présenté à Dubaï : Har Gaf Sayfane (chaud et sec l’été) de Chérif Al-Bendari. Ce court métrage, se déroulant en un seul jour, passe en revue l’expérience d’un Egyptien atteint d’un cancer, et qui mène une lutte pour l’espoir et la survie, à l’image de son pays peut-être.

Ambitions du Golfe
Le cinéma émergent des pays du Golfe était présent cette année au Festival de Dubaï. En effet, les organisateurs du festival ont fait de la promotion du cinéma arabe, notamment du Golfe, leur cheval de bataille. Quatre films émiratis se distinguent dans la production des pays du Golfe cette année. Il y a d’abord le film Al-Zénzana (la cellule) de Magued Al-Ansari, qui a inauguré la section Nuits arabes. Ce thriller, dont les événements se déroulent essentiellement entre un commissariat de police et une cellule de prison, met en scène des comédiens qui incarnent avec brio le gendarme et le meurtrier, à savoir Saleh Bakri et Ali Soliman, offrant aux spectateurs l’un des meilleurs drames venus jusqu’ici des pays du Golfe.

Les trois autres films sont Fi Sirat Al-Maa wal Nakhl wal Ahl (récit de l’eau, des palmiers et des siens) de Nasser Al-Zahéri, Omniya (voeu), court métrage d’Amna Al-Noweiss, et Sayer Al-Ganna (droit au paradis) de Saïd Salémine. Les trois ont valu des prix à leurs créateurs, de quoi encourager les cinéastes du Golfe à récolter encore plus de trophées.

D’ailleurs, cette année, la direction du festival a lancé une nouvelle compétition intitulée Al-Mohr Al-Khaliji (la jument du Golfe), pour désigner le meilleur court métrage de la région, racontant l’histoire des pays du Golfe selon une optique contemporaine. Le coup d’envoi de cette compétition a été donné avec la projection du film Les Mille et une invention d’Ibn Al-Haïssam, une coproduction émirati-britannique en anglais. Le film incluant la dernière apparition de Omar Sharif à l’écran peu avant sa mort a été chaleureusement accueilli.

Promotion du cinéma du Golfe mais aussi du cinéma tout court, puisque le Souk cinématographique de Dubaï, lancé en 2006, est devenu l’une des activités incontournables du Festival, au même titre que la cinémathèque. Le Festival de Dubaï lorgne sur le statut du nouvel Hollywood de l’Orient .

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