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Il n’y a que le coeur qui voit

Névine Lameï, Lundi, 28 septembre 2015

Associant musique classique, chant lyrique, poésie et danse, l’opéra Les Jours et les Nuits de l’Arbre Coeur, de Tarik Benourka, se donne pour la première fois à l’Opéra du Caire. L’oeuvre est dédiée à l’orchestre égyptien Al-Nour Wal-Amal, de femmes non-voyantes.

Il n’y a que le coeur qui voit
Les sentiments se tissent doucement sur scène grâce aux talents de l’orchestre Al-Nour Wal-Amal.
« Aux confins de l’espace, il était une aire de paix bordée seulement par le vide. Là-bas s’élevait solitaire et majestueux, un arbre en forme de coeur sensible et battant : « l’Arbre Coeur », aux pou­voirs et aux vertus si grands que la nature voulut les cacher. Un jour, annoncé par la naissance d’une étrange lumière, étaient venus … Nour, hésitant et désorienté, et Amal, perdue et craintive ». C’est ainsi que le compositeur Tarik Benourka pré­sente son oeuvre.
Nour et Amal, deux âmes soeurs célestes qui, à sentiments douce­ment tissés et attirés par « L’Arbre Coeur », se découvrent, se perdent, puis enfin se retrouvent. Deux êtres, homme et femme, dont chacun a besoin de l’autre pour exister. Voici l’histoire des deux protagonistes de l’opéra Les Jours et les Nuits de l’Arbre Coeur, donné actuellement, et pour la première fois en Egypte, à l’Opéra du Caire. Il s’agit simulta­nément d’un petit opéra, d’une oeuvre symphonique et d’un spec­tacle instrumental lyrique, poétique et dansant, d’une durée d’une heure trente minutes.
Composé par le multi-instrumen­tiste franco-algérien, Tarik Benourka, compositeur internatio­nal, orchestrateur symphonique et créateur d’opéras, Les Jours et les Nuits de l’Arbre Coeur est produit par la compagnie française Production 21-21, sous mise en scène de Gilbert Désveaux, scéno­graphie d’Alain Lagarde (France), avec une chorégraphie signée Adriana Mortelliti (Italie). D’ailleurs, Les Jours et les Nuits de l’Arbre Coeur est dédié à l’orchestre Al-Nour Wal-Amal (organisation sans but lucratif), l’unique au monde de femmes égyptiennes non-voyantes. Avec ses 41 musiciennes, cet orchestre sera accompagné par la chorale cérémoniale du Caire, ayant à sa tête deux grandes voix égyptiennes de renommée interna­tionale : la soprano Dalia Fadel, incarnant le rôle d’Amal, et le ténor Ragaaeddine, dans le rôle de Nour. Le duo est également incarné par les danseurs Fanny sage (France) et Utku Bal (Turquie). Et ce, avec un conteur en langue arabe : Assem Nagati et un ballet classique contemporain.
Aux sentiments « doucement » tissés sur scène, la narration dans l’opéra Les Jours et les Nuits de l’Arbre Coeur devient le vecteur d’une quête philosophique, d’une exploration intérieure, de multiples états d’âme humains, avec, au coeur du récit, « l’Arbre Coeur », arbre de l’amour, du partage, de la mémoire, de la conscience, et surtout de la connaissance qui symbolise la « médiation vers la Sagesse ».
Un monde que chacun
porte en soi
« Les Jours et les Nuits de l’Arbre Coeur est né il y a un an et demi, en France, suite à une rencontre artis­tique et humaine initiée par le par­rain de l’orchestre d’Al-Nour Wal-Amal, le ténor égyptien Georges Wanis. Cette oeuvre, dont l’orches­tration a été créée spécifiquement pour les musiciennes d’Al-Nour Wal-Amal, au charisme unique et émouvant, est une légende tendre et pleine d’espérance qui évoque avec passion l’amour de la vie et le regard intérieur … compagnon intime de chaque être », évoque Tarik Benourka. « Dans mon opéra, l’Arbre Coeur évoque ce monde que chacun porte en soi, bien sûr diffé­rent pour chaque être, mais qui trouve tout son sens dans le partage et l’harmonie. D’ailleurs, pour moi, les non-voyants ne sont pas les musi­ciennes d’Al-Nour Wal-Amal, les non-voyants sont nous-mêmes. Car, pour moi, il n’y a que le coeur qui voit. J’invite le public de l’Arbre Coeur à voyager dans son intérieur, à la recherche de soi, dans un monde de révolution numérique, atomique et internaute qui conquit à nos jours, les territoires humains », ajoute Benourka dont le talent s’exprime du classique aux musiques actuelles et de la musique de film au spectacle vivant.
Ce compositeur rare façonne un univers musical, aux multiples cou­leurs teintées d’Orient et d’Occident. Quelques exemples de ses dernières créations : l’opéra en arabe Al-Nafas, à Alger, la musique originale de The Wyld de Thierry Mugler, pour le FriedrishPalast de Berlin, et Djamila, sur l’héroïsme et l’engagement, au travers notamment de l’indépen­dance algérienne. « Je pense arabe et j’écris français. Je suis un porteur de clé. Mon opéra allie chant opéral/lyrique, conte en langue arabe et musique symphonique aux accents romantiques et orientalistes. Il est écrit pour voyager dans le monde. Et j’ai trouvé dans l’orchestre Al-Nour Wal-Amal la capacité de mettre en valeur tous les pupitres d’instru­ments, dans un voyage à travers les tonalités et mélodies qui s’entrecroi­sent avec des méthodes et techniques spécifiques, sans lire de partition et sans l’aide de la baguette d’un maestro ».
Dans une volonté militante de transmission et de partage signée Benourka, orchestre, chanteurs, dan­seurs, conteur et scénographe sont convoqués à l’Opéra du Caire, pour raconter l’histoire éternelle et fantas­magorique de « l’Arbre Coeur ». Celle-ci se déploie sur scène, grâce à des graphismes évolutifs projetés en vidéo, sur un immense tulle, sorte de « porte entre les mondes ». Après Le Caire, Les Jours et les Nuits de l’Arbre Coeur voyagera à Saint Gaveau, à Paris le 5 novembre, puis à l’Université de la Sorbonne d’Abu-Dhabi le 13 janvier, et au Centre de la culture et des sciences, à Dubaï le 16 janvier. Durant cette tournée, tous les fonds récoltés grâce à la vente du CD des représentations de l’opéra seront reversés à l’association d’Al-Nour Wal-Amal.
Le 30 septembre, à 20h,
dans la grande salle de l’Opéra
du Caire, Guézira.
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