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Rendez-vous des artistes égyptiens

May Sélim, Lundi, 15 juin 2015

La 37e édition de « L’exposition générale » regroupe 235 artistes au Palais des arts. Cette année, l’événement est marqué par une inspiration sociale et politique.

Rendez-vous des artistes égyptiens
Les marionnettes de Emad Adel Tewfiq. (Photo:Bassam Al-Zoghby)

L’exposition générale ne peut guère passer inaperçue. Et sa 37e édition n’échappe pas à la règle. Avec notamment la participation de 235 artistes égyptiens, toutes tendances confondues, elle constitue un panorama de l’art contemporain local. Cependant, la sélection effectuée cette année par un comité présidé par le critique et ex-ministre de la Culture, Chaker Abdel-Hamid, et le commissaire de l’exposition, Mohamad Talaat, est loin de faire l’unanimité. Les candidats dont les oeuvres ont été écartées mettent en question l’objectivité du comité et les accusations fusent de partout.

Mêmes les artistes participants n’ont pas hésité à exprimer leur mécontentement quant à la disposition et à l’agencement de leurs oeuvres. Le peintre Khaled Sourour, à titre d’exemple, a retiré sa peinture du Palais des arts, le jour du vernissage, en signe de protestation contre l’endroit choisi pour exposer sa toile. Difficile donc de plaire à tout le monde !

Le commissaire Mohamad Talaat, à l’origine responsable d’une galerie privée et ex-directeur du Palais des arts, a été lui-même la cible d’une guerre qui a éclaté sur les réseaux sociaux, mettant en doute ses intentions et ses choix.

On reconnaît tout de suite les quatre grandes sculptures en bronze de Moustapha Abdel-Morti, à l’entrée de la salle d’exposition. L’artiste y reprend ses motifs géométriques : un triangle, une lame tranchante, une pyramide, symbole de l’au-delà, ou un cercle représentant l’homme à la recherche d’un monde nouveau. Puis l’on reconnaît également les thèmes folkloriques des tableaux de Helmi Al-Touni qui a recours aux chats fantaisistes, afin de faire allusion aux hommes.

La politique s’impose
Les sculptures de Khaled Zaki Deux Filles d’Alep montrent deux portraits de jeunes femmes, aux regards égarés. Tristes et éperdues, elles reflètent l’état où se trouve la Syrie. L’actualité politique s’impose.

Ahmad Abdel-Karim lance un message direct au public, à travers son Champ de blé, évoquant les ambitions de l’époque nassérienne : il faut absolument cultiver le blé pour maîtriser son destin.

Le drapeau égyptien s’avère un motif récurrent chez Rabab Al-Nemr, Ali Azzam et pas mal d’autres artistes. C’est la peur ou l’amour de la patrie qui prend le dessus, durant cette phase critique de son histoire.

Moustapha Ramzi, 89 ans, a opté lui aussi pour le drapeau égyptien sur lequel il a inscrit : Vive l’Egypte. Puis, il le cadre de mini-sandales pour enfants, dans un style naïf qui a fait couler beaucoup d’encre. Certains l’ont accusé de porter atteinte à la patrie, tandis que l’artiste a simplement répondu dans la presse : « Les sandales symbolisent les enfants, l’avenir du pays ».

La baignoire au sang
Les vidéos et les installations, notamment celles des jeunes participants, ont attiré l’attention de par leur fraîcheur. Ces disciplines contemporaines se veulent plus provocatrices. Ayman Lotfi présente une installation-vidéo intitulée Purification : une jeune dans une baignoire, toute couverte en noir, tente de se purifier ... après le bain, elle file une tunique blanche, lorsqu’une couleur rouge sang emplit la baignoire. L’Egypte s’épure, mais non sans victimes, a-t-il envie de dire. Il y a beaucoup de sang qui coule, malheureusement.

La société conservatrice qui accable les jeunes est assez présente dans l’oeuvre de Emad Adel Tewfiq. Elle nous réduit à des marionnettes dont on tire les ficelles au loin. D’où ces figurines accrochées aux murs, avec des pancartes ressassant les préjugés faisant monnaie courante.

Hossam Darrar participe avec une installation sur l’eau du Nil. Il s’agit de jarres cassées, dispersées par terre, tandis que d’autres tiennent dessus portant les étiquettes de marques d’eau minérale. « L’exposition générale dresse un peu l’état des lieux et de l’art contemporain ainsi que des problèmes de la société. Nous cherchons à briser les tabous, tout court », conclut le commissaire de l’exposition annuelle.

Jusqu’au 30 juin, de 10h à 14h et de 20h à 22h (sauf le vendredi) au Palais des arts, terrain de l’Opéra, Al-Guézira.

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