Le choc est encore bien présent. Malgré deux ans de souffrance, les fans du compositeur Ammar Al-Chérei pensaient qu’il vaincrait la maladie. Pourtant au début de la semaine, Al-Chérei, maître de la musique contemporaine égyptienne, nous a quittés à l’âge de 64 ans pour retrouver finalement le repos dans sa ville natale de Samalloute, au gouvernorat de Minya. Tout au long de sa carrière, Al-Chérei était ce type de créateur innovateur et révolutionnaire.
Sur le plan personnel, il a pu vaincre sa cécité et s’adonner aux études musicales. Il est passé d’un simple joueur d’accordéon à un maître d’orgue et de luth. Ses compositions musicales traduisaient souvent un air euphorique, rythmé et moderne. Même ses compositions les plus mélancoliques sont marquées d’un jeu d’arrangement instrumental élaboré qui reflète sa variété et sa richesse, voire sa modernité.
Al-Chérei a puisé dans toutes les sources de la musique du monde et ne s’est jamais limité aux frontières du monde arabe.
Sa carrière comporte la composition musicale de plus de 60 films, 200 feuilletons télévisés et 10 pièces de théâtre. Ses émissions de la radio Ghawas fi bahr alnagham (plongeur dans la mer des mélodies) et Sahra Chérei (soirée Chérei) ont servi à introduire aux auditeurs les différents modes-clés et nouvelles tendances de la musique arabe avec simplicité et subtilité. Ce fut aussi le cas avec ses programmes télévisés donnés à succès sur les chaînes satellites. De plus, les plus belles compositions des chansons des stars arabes, telles Latifa, Abdallah Al-Rouayched, Ali Al-Haggar, Angham et Medhat Saleh, témoignaient de son potentiel et sa créativité. La collaboration avec Al-Chérei constituait pour ces chanteurs un tournant important dans leur carrière artistique.
Pendant longtemps, Al-Chérei a célébré les fêtes nationales de l’Egypte. Lors de toutes les occasions officielles, ses compositions servaient à donner un air vivace à ces cérémonies régulières et traditionnelles. Pourtant au cours des dernières dix années, Al-Chérei s’absentait de ce genre d’événement.
A sa manière, ses notes refusaient le régime. Le révolutionnaire s’est éveillé en lui pendant le soulèvement du 25 janvier 2011. Lors d’une intervention téléphonique dans une émission de télé, il a appelé Moubarak à démissionner. Sur la place Tahrir, porté sur les épaules des révolutionnaires, il célébrait avec eux la chute du régime. Son esprit révolutionnaire l’a poussé à déclarer aussi ces derniers temps sa méfiance à l’égard de l’ascension des Frères musulmans. Malgré sa disparition, ses propos et ses mélodies vont encore résonner et encourager les Egyptiens à continuer leur révolution.
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