Yasmine ali, 7 mois, est hospitalisée dans le service de pédiatrie pour la surveillance d’un traumatisme crânien avec perte de connaissance. L’accident est survenu suite à une chute de l’enfant de son transat, posé sur une table. La mère s’est éloignée l’espace d’un instant pour répondre au téléphone. Dans sa cuisine, Rania Mostafa sort un bol de lait du four à micro-ondes, alors que son fils de 3 ans lui passe entre les jambes et la déséquilibre. L’enfant reçoit la totalité du lait sur le crâne, le visage et son torse nu. Résultat : brûlure au deuxième degré sur une surface importante du corps. Un autre cas similaire, celui de Yasser Karim, âgé de 2 ans, il a été brûlé avec de l’huile bouillante. L’huile étant plus visqueuse, elle coule moins, donc brûle plus longtemps. Hazem Samir, un enfant de 3 ans, prenait son bain avec son frère de 10 ans, qui a voulu rajouter de l’eau dans la baignoire. Sans le vouloir, il a fait couler de l’eau chaude sur son petit frère, qui était assis sous le robinet. Le temps que son frère crie suffisamment fort et que l’aîné comprenne ce qui se passe, le mal était fait, une grosse brûlure au deuxième degré. Quant à Mariam Hicham, sa vie a été complètement chamboulée à l’âge de 5 ans, lorsqu’elle a pris feu en jouant avec une boîte d’allumettes. Effrayée, elle a tenté d’éteindre la flamme qui s’est rapidement propagée à sa veste. Bien que la maman soit parvenue à éteindre l’incendie avec une couverture, le corps de sa fille a été déjà brûlé à 80 %. Mariam a été hospitalisée pendant 9 mois et a dû subir de nombreuses chirurgies avant de pouvoir rentrer à la maison.
« Une brûlure, c’est toujours grave. Plus généralement, de telles blessures conduisent les victimes dans un service hospitalier dédié aux brûlures, avec plusieurs mois de traitement », lance Dr Haytham Mohamed, pédiatre urgentiste, tout en ajoutant qu’en bas âge, le comportement de l’enfant n’est pas modifiable. « La prévention doit s’appuyer sur l’environnement humain, en informant le parent sur les facteurs de risques en adéquation avec le développement de son enfant », assure-t-il. Selon lui, la scène de la mère affairée à la préparation de la cuisine, laissant le manche de la poêle, dans laquelle mijotent des oignons, tourné vers l’extérieur, est courante. Cette « petite » erreur d’inattention peut avoir de graves conséquences.
« Tous ces drames que les familles vivent, souvent en silence, peuvent parfaitement être évités si on prend les précautions nécessaires », affirme Dr Mohamed, qui ne manque pas de rappeler l’histoire de Rayan, cet enfant marocain de 5 ans qui n’a pas survécu à sa chute dans un puits et dont le décès a ému le monde entier.
Les cinq principaux accidents domestiques sont les chutes, les brûlures, l’étouffement, l’intoxication et les noyades.
Une fraction de seconde et le pire est fait
Chute, brûlure, coupure, étouffement, etc. Autant d’accidents domestiques et les risques ne manquent pas. En effet, la maison est l’un des endroits les plus dangereux pour l’enfant, notamment ceux en bas âge, quand la vigilance de la maman n’est pas de mise. Autrement dit, ces accidents ne sont pas dus au hasard, mais résultent plutôt de la négligence des parents et de leur manque d’information sur les comportements à risques. Chaque année, des milliers d’enfants à travers le monde perdent la vie à cause des accidents domestiques. Et d’autres encore sont gravement blessés et certains restent handicapés pour la même raison.
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), les accidents domestiques représentent l’une des principales causes de mortalité chez les enfants de moins de 15 ans. Plus de 10 millions d’enfants dans le monde sont hospitalisés chaque année à cause de ces accidents qui sont 3 à 4 fois plus fréquents chez les familles issues de milieux défavorisés. Et ce, en raison des contraintes d’espace et du manque ou de l’absence des équipements de sécurité et des outils de protection.
Cependant, il est difficile de donner des chiffres concernant les accidents domestiques chez les enfants en Egypte, bien qu’ils soient très fréquents non seulement à cause du manque d’études, mais aussi parce que les familles n’ont pas l’habitude de déclarer ce genre d’incidents. « Chez les enfants, 3 accidents sur 4 ont lieu à la maison. Ces accidents domestiques peuvent apparaître à tout moment dans la vie de l’enfant et cela dès sa naissance. Au fil des mois, l’enfant grandit, acquiert de l’autonomie dans ses gestes et ses déplacements, développe sa curiosité, son désir d’imiter les grands », explique Dr Ahmed Abdel-Azim, médecin au service d’urgence de l’hôpital Al-Qasr Al-Aïni. Selon lui, les accidents domestiques les plus fréquents chez les enfants sont les chutes, les brûlures, l’électrocution et les noyades dans le bain. Un bébé peut facilement se noyer dans 20 cm d’eau. Les accidents domestiques n’excluent pas une main coincée dans l’embrasure d’une porte ou aussi les incidents causés par la présence d’animaux domestiques, comme une morsure de chien par exemple. Sans oublier l’intoxication et l’empoisonnement lorsque l’enfant commence à ramper ou à marcher et à attraper les petites choses par terre pour les mettre dans sa bouche. Certains enfants avalent une petite pièce du jeu qui s’est détachée ou une pile bouton, tout ce qui traîne, ou encore les produits ménagers stockés dans des bouteilles aux couleurs attrayantes, comme les pastilles de lave-vaisselle qui ressemblent à des bonbons. « L’ingestion d’un corps étranger peut d’ailleurs être fatale. Je me souviens d’un garçon, âgé de 4 ans, qui est arrivé dans un état très grave entre la vie et la mort, après avoir avalé une pile ronde. C’est ce qu’on appelle une fausse route, lorsqu’un aliment, un petit objet ou un liquide passe par la trachée ou le larynx (voies respiratoires) plutôt que par l’oesophage (voie digestive). Cette erreur de parcours peut étouffer la victime (l’aliment ou le liquide bloque les voies respiratoires). La mort peut survenir si le corps étranger coupe totalement la respiration. Grâce à Dieu, l’enfant a été sauvé à la dernière minute », souligne Dr Abdel-Azim, qui ne compte plus les enfants qui tombent de la fenêtre parce qu’ils ont poussé une chaise pour regarder dehors ou ceux qui tombent d’un lit superposé.
Ce sont les enfants de moins de 5 ans qui sont les plus exposés aux dangers domestiques. Une des raisons : leur corps est disproportionné et présente une tête beaucoup plus lourde que le bas du corps. Un enfant qui fait une longue chute, se retourne et tombe la tête la première. Il ajoute : « Les accidents domestiques constituent environ 30 % de l’ensemble des consultations et 16 % des hospitalisations à l’unité des urgences du service de chirurgie pédiatrique. Les patients d’âge préscolaire sont les plus touchés. Les accidents domestiques surviennent principalement dans la cuisine (mixeurs, fours, couteaux, gaz, plaques bouillantes), ainsi que dans les escaliers où la chute est le principal mécanisme de survenue. Leurs conséquences sont souvent légères, mais peuvent être plus dramatiques, voire mortelles ».
Anticipation et vigilance quotidienne sont donc les meilleurs alliés pour éviter le pire.
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