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Une pionnière raconte

Dina Bakr, Lundi, 26 mai 2014

Walaa, 28 ans, circule toujours à vélo. Elle tente ainsi de faire changer les mentalités à l’égard de la femme. Elle est l’auteur d’un livre intitulé Le Quotidien d’une citoyenne à bicyclette.

Une pionnière raconte

C’étaient les vacances d’été, Walaa faisait du vélo au bord de la mer. « Je me suis dit : ce n’est ni interdit, ni illicite de circuler à vélo, pourquoi donc ne pas en faire mon moyen de transport ? », dit-elle. Elle a alors décidé de lancer des appels sur Facebook, pour inciter filles et garçons à venir la rejoindre en groupe sur leurs bicyclettes. Walaa est membre fondateur du groupe Go Bike, qui encourage à l’exercice physique au moins une fois durant le week-end.

Si en 2011 la bicyclette était son meilleur compagnon, c’est en 2012 qu’elle a décidé de ne plus s’en séparer. Walaa Al-Hawary, 28 ans, architecte, relate son expérience dans un ouvrage intitulé Yawmiyat mowatena ala bisceletta (le quotidien d’une citoyenne à bicyclette). Cette jeune femme milite pour son droit à utiliser un moyen de transport de son choix, pas cher et pratique, lors des heures de grande affluence.

Dans son livre, elle condamne le fait de considérer la femme comme responsable de tout harcèlement. « La société a une vision péjorative à l’égard de la femme. Grâce à Dieu, personne ne m’a tripotée alors que je conduisais mon vélo. Mais j’ai eu droit à des remarques insolentes, pire encore, certains ont eu des gestes irrespectueux envers moi », dit Walaa.

Affronter toute difficulté

C’est à cause de cette animosité et ce regard méprisant lancé à son égard alors qu’elle se promenait à vélo dans les rues de la capitale qu’elle a décidé de relever ce défi en incitant les femmes à en faire autant. « A chaque fois que l’on m’importunait dans la rue, je décidais d’allonger mes promenades à bicyclette. J’ai commencé à choisir des quartiers éloignés de mon domicile à Héliopolis », dit-elle.

Aujourd’hui, Walaa arrive à parcourir 80 km par jour à bicyclette. Dotée d’une forte personnalité, Walaa sait qu’elle est capable d’affronter toute difficulté. « C’est à la femme de forger son image. Elle doit prouver qu’elle est un élément important et refuser d’être traitée comme un objet », poursuit-elle.

Pieuse, portant un voile à la mode, Walaa a sa propre vision des choses. « Tant que ma conduite est irréprochable, je n’ai peur de personne. Je ne fais plus attention aux regards des gens du moment qu’il n’est pas mentionné dans la religion qu’une femme ne doit pas monter à bicyclette ». Walaa est heureuse d’avoir un père qui la comprend et qui l’encourage à faire ce qu’elle veut, car il a confiance en elle. « Le seul souci de mon père est celui concernant les rues qui ne sont pas conçues pour les trajets à bicyclette. Il me demande toujours de faire attention, car il a peur pour moi », ajoute-t-elle.

Elle se souvient du jour où en se rendant pour le quartier de Doqqi au Caire, elle s’est retrouvée par hasard dans un quartier populaire. « Ma réaction a été d’accélérer pour effrayer les gamins, leur faire comprendre que je pouvais leur foncer dessus. J’ai tenu également à lancer des grossièretés pour qu’ils pensent que je suis issue d’une même classe que la leur », Walaa est fière d’avoir dupé ces gamins par cette réaction inattendue.

Dans son livre, elle relate avec dérision les différentes situations auxquelles elle a été confrontée en se baladant à vélo. « J’habite à Héliopolis, et chaque jour, je me rends au travail qui se trouve au centre-ville à bicyclette. J’arrive en pleine forme, prête à une journée de labeur », raconte Walaa, qui ne prend sa voiture que lorsqu’elle doit porter une robe et des talons.

Un casque sur la tête, des gants aux mains pour éviter la transpiration et des protège-genoux sont les accessoires indispensables qu’elle enfile avant de monter à bicyclette. C’est même dans ses virées que Walaa a rencontré son fiancé.

Aujourd’hui, cette jeune architecte est fière de constater que son idée a porté ses fruits et qu’elle a contribué à changer un peu les mentalités. « J’ai rencontré des filles de quartiers populaires, certaines portaient même le khimar (voile long) ; elles m’ont appris avoir commencé à circuler à vélo après la lecture de mon livre », conclut Walaa, qui considère cette évolution comme un premier tour de roue .

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