« Quand on est en Egypte, il faut se livrer à une visite approfondie de ses trésors ». C’est ce que l’écrivain britannique Ian Lancaster Fleming a dit pour faire l’éloge de l’Egypte, mais aussi pour accentuer sa beauté. Ainsi, l’été 2023 bat son plein en Egypte, offrant aux classes moyennes du pays une période de détente bien méritée.
Alors que les températures grimpent, le Sahel « al-cherrir » (maléfique, autrement dit qui coûte cher) est pris d’assaut car c’est le lieu de prédilection des estivants. Là, les familles des classes moyennes doivent trouver des astuces spéciales pour passer leurs vacances avec un petit budget. Une tournée s’impose pour connaître leurs expériences, leurs aspirations et les défis à relever en famille quand le budget vacances est serré.
Sahel aimable vs Sahel maléfique
Les Egyptiens ont l’embarras du choix pour profiter de leurs vacances sans trop dépenser. Il y a ceux qui apprécient le Sahel tendanciel, ceux qui recherchent le calme et la beauté de la nature, mais il y a d’autres alternatives, moins connues et plus économiques.
Jana Hany devant une oeuvre artistique dans la galerie « Maison 69 » à Zamalek.
Tout d’abord, les familles de classe moyenne préfèrent passer leurs vacances au Sahel « al-tayeb » (aimable, qui ne coûte pas très cher) en louant un chalet. Selon Booking. com, pour un séjour de deux jours au village de Lotus, le tarif de location d’un chalet ne dépasse pas les 4 000 L.E. pour une famille de 3 ou 4 personnes. C’est ce que confirme Mohamad Ismaïl, chef de famille. « Nous sommes une famille composée de 5 personnes, ma femme, mes trois enfants et moi. Cet été, et après avoir économisé de l’argent à l’avance, on a fini par louer ce chalet au Sahel aimable à 5 000 L.E. et pour deux jours seulement. Outre la location, il y a aussi les frais de nourriture pour deux jours et d’autres dépenses sur la plage. Ce séjour m’a coûté environ 6 500 L.E. Sachant qu’un jour passé là-bas englobe des activités maritimes, sans compter qu’il faut goûter au plateau de fruits de mer frais, sans oublier les gaufrettes fresca vendues sur la plage », dit-il. Un article écrit par le journaliste Soliman Gouda et publié dans le journal Al-Masry Al- Youm le 2 août 2022 donne une définition du Sahel égyptien. Il note que ce Sahel est divisé en deux parties : le Sahel aimable où les prix sont plutôt abordables et donc accessibles aux familles de classe moyenne, et l’autre partie surnommée le Sahel maléfique où tout est cher.
Destinations moins fréquentées en été
Autre destination. Autre possibilité. Il existe d’autres lieux plus accessibles, tels que les destinations balnéaires moins fréquentées durant l’été, à l’exemple de Charm Al-Cheikh et Hurghada le long de la mer Rouge, ou bien les sites historiques les plus emblématiques de Louqsor et Assouan tout le long du Nil. Prenant l’exemple de ces deux dernières villes, les jeunes aiment faire le trajet par train pour s’y rendre. Un voyage culturel prisé par les jeunes Egyptiens, sachant que Louqsor est le plus grand musée du monde à ciel ouvert et avec seulement une somme de 1 000 L.E. comme nous l’indique le site de Al-Rahala.com. Ce que d’ailleurs Mohamad Al-Cheikh tient à nous confirmer, après avoir passé un séjour à Louqsor avec un petit budget. Il cite : « Je suis allé avec mon école à Louqsor pour un voyage éducatif, mais aussi de divertissement. Et malgré la chaleur, presque tous les endroits sont climatisés. Le séjour de trois jours m’a coûté 1 500 L.E. ! Ce fut un voyage inoubliable ! Et même pour les activités, les prix étaient abordables. On a visité le temple d’Abou-Simbel dont le billet d’accès valait 10 L.E. ».
(Photo : AFP)
Pour un séjour sur la mer Rouge, les prix commencent à 2 000 L.E. Prenons l’exemple d’un séjour de deux personnes dans un hôtel à Neama Bay, le prix s’élève à 2 327 L.E. comme l’indique le site de Tripadvisor.com. Mohamad Ismaïl raconte son expérience en mer Rouge l’année dernière. Il dit que cela lui a coûté environ la moitié du prix d’un séjour au Sahel.
Autre expérience, celle de Rasha Helmy qui a passé quelques jours avec sa famille composée de 5 personnes et ses cousins à Marsa Matrouh (ouest), sur la Méditerranée. Elle raconte : « Ma famille, mes cousins et moi avons l’habitude de passer nos vacances ensemble. C’est pour l’ambiance, mais ceci a aussi un atout économique. Cette année, nous avons décidé d’aller à Marsa Matrouh, dans l’une des plus belles plages égyptiennes ! C’est en quelque sorte les Maldives égyptiennes ! Nous étions au total 9 personnes à occuper un chalet, dont la location a coûté environ 7 000 L.E. pour 5 jours. Grâce à une gaméïya, nous avons pu nous offrir ce beau séjour », raconte Rasha. Et d’ajouter : « Marsa Matrouh a échappé un peu à l’inflation qui pèse sur la plupart des lieux de vacances. En dehors du loyer, les produits alimentaires et les activités de loisirs y sont payants, comme le Banana Boat que mes garçons ont essayé. Au total, nous avons dépensé entre 3 000 et 4 000 L.E. Et si on partage le prix de la location entre nous et nos cousins, c’est plus rentable, car après avoir ajouté les autres frais, les 5 jours nous ont coûté environ 7 500 L.E. ».
D’autres alternatives moins chères existent aussi, telles que les vacances subventionnées par les institutions gouvernementales. Exemple : une annonce sur Facebook du ministère de la Jeunesse et du Sport indique la possibilité de se rendre pour une semaine à Marsa Matrouh pour 450 L.E. Ce type de voyage est parrainé aussi par les clubs sociaux, comme le fameux club d’Al-Seid. Par ailleurs, il existe également des séjours d’un jour, ce qui donne la possibilité aux familles de choisir les destinations les plus proches pour jouir de cette période estivale tout en réduisant les coûts au maximum. Prenons l’exemple des annonces pour un séjour d’un jour à Porto Al-Sokhna, sur la mer Rouge, qui coûte seulement 500 L.E. par personne.
La famille de Mohamad Ismaïl sur la plage du Sahel « aimable ».
Autres alternatives
Les difficultés économiques contraignent les Egyptiens, tout comme les populations de la plupart des pays du monde, à faire face aux conséquences d’une inflation économique mondiale persistante. La flambée des prix des denrées alimentaires, de l’énergie et d’autres produits de première nécessité continue de frapper durement les ménages de la classe moyenne, ce qui réduit leur pouvoir d’achat. Pour faire face à cette situation, certaines familles sont contraintes à réduire leurs dépenses de loisirs et de vacances. Estce que cette inflation a empêché les classes égyptiennes de passer de bonnes vacances ? Absolument pas !
L’Egypte offre de nombreuses activités touristiques, pas nécessairement liées à la plage. C’est ce que Jana Hany, une étudiante de 19 ans en sciences informatiques à l’Université de Hélouan, révèle : « Le Caire est immense ! Il y a toujours quelque chose à faire. Moi, par exemple, je consacre ma période estivale pour explorer tous les beaux quartiers du Caire. Je viens de visiter certaines galeries à Zamalek en prenant le métro. Pour le trajet, j’ai payé 7 L.E. ! J’ai visité plusieurs galeries dont l’accès est gratuit ! Prenons l’exemple de Maison 69, qui m’a surprise par sa particularité ». Et ce n’est pas tout. Il faut également profiter de l’été pour visiter les célèbres pyramides de Guiza, faire une croisière sur le Nil, se balader en ville ou se promener dans le célèbre marché de Khan Al-Khalili et vivre l’atmosphère animée de cet endroit chargé d’histoire, se rafraîchir dans les piscines, se rendre dans les parcs aquatiques et les jardins, etc. Il ne faut surtout pas oublier de s’attabler dans les cafétérias traditionnelles du Caire, toujours aussi animées. Jana cite : « J’ai commandé un thé noir dans une cafétéria traditionnelle se trouvant sur le Nil à Mamcha Ahl Masr, à l’autre rive de Zamalek. Cela m’a coûté 10 L.E., et pour cette sortie, j’ai dépensé en tout 24 L.E., y compris le ticket de métro pour le retour ».
(Photo : AFP)
Les pages des réseaux sociaux pourraient en effet servir de guide pour ce genre de balades. L’une des pages les plus importantes sur Instagram vise à encourager les sorties au Caire, en promouvant ces lieux agréables. Cette page a un très grand impact, notamment à l’échelle internationale, avec le modèle américain Fai Khadra qui a reposté l’un de ses messages : on parle de uniquegypt. En plus, il existe une autre alternative qui se rapproche de l’expérience balnéaire : les day use dans les hôtels du Caire. « Un day use coûte 600 L.E. avec chambre double, disponible de 10h à 18h. Et si vous ne voulez pas réserver de chambre, vous pouvez opter pour l’utilisation de la piscine dont le tarif est à 250 L.E. par personne et par jour de 10h à 18h ».
Les pique-niques sont aussi un phénomène célèbre en Egypte, car la plupart des Egyptiens durant le week-end prennent leurs repas pour se rendre dans le parc d’Al-Azhar et profiter des espaces verts et de l’air frais. Bref, d’après la sociologue Sandrine Gamblin, les activités égyptiennes ne se résument pas seulement aux activités maritimes. Elle cite : « L’Egypte évoque le plus souvent (...) les pyramides, les pharaons, les splendeurs d’une civilisation ancienne. A ce titre, c’est une destination (...) particulièrement prisée (...) : une croisière sur le Nil, du Caire à Abou-Simbel, en felouque ou en dahabiya, (...) ». Cette citation de la sociologue met l’accent sur de nombreux loisirs en Egypte, ce qui ne limite pas le citoyen à quelques destinations, voire manières pour passer ses vacances. Au contraire, la multitude d’activités en Egypte élargit le concept des vacances chez les Egyptiens n’ayant aucun lien avec le mot vacances et la mer en général. Et d’autres alternatives qui peuvent être encore plus amusantes, mais aussi plus économiques.
Visites au fameux temple d’Abou-Simbel.
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