Le 16e forum international de Greenaccord sur la sauvegarde de la nature s’est tenu du 10 au 12 octobre sous le thème « Construisons l’avenir, ensemble nous pouvons ». Ce forum, consacré aux journalistes, a vu la participation de quelque 50 journalistes environnementaux venant d’Egypte, de France, du Maroc, d’Espagne, de Roumanie, du Canada, d’Inde, de Bulgarie, du Mexique, d’Uruguay, d’Ukraine, de Macédoine du Nord, des Pays-Bas, d’Amérique latine, des Etats-Unis et d’Italie.
En 2024, la Journée mondiale de la liberté de la presse a mis en lumière le rôle crucial du journalisme et de la liberté d’expression face à la crise environnementale mondiale. Cette même année a marqué le retour du Forum Greenaccord, un événement dont les participants sont des journalistes spécialisés dans les questions environnementales et ce, après quatre ans d’interruption en raison de la pandémie de Covid-19.
Du sport à la transition écologique
Le premier jour du forum a eu lieu à Rome, au centre sportif du Comité national olympique italien (CONI), et les deux autres ont eu lieu au Centre Jean XXIII entièrement gérés par la Congrégation des prêtres du Sacré-Coeur de Jésus, à Frascati, commune située à 20 km de la capitale italienne.
Alfonso Cauteruccio, président de Greenaccord Onlus, une association non gouvernementale italienne dont la mission est de servir l’environnement, a ouvert les débats en rendant hommage à la contribution essentielle des femmes au progrès mondial, soulignant leur créativité et leur générosité dans des domaines comme l’activisme, la recherche scientifique et la politique. Le 10 octobre, le sport a également été mis à l’honneur, avec un focus sur son rôle dans la durabilité environnementale et l’importance du journalisme sportif pour sensibiliser le public. Le 11 octobre à Frascati, les discussions ont porté sur la « transition écologique », question considérée comme politique avant tout. Le forum a exploré le rôle crucial des institutions, de l’économie et de la finance dans cette transition, tout en insistant sur la nécessité de repenser les modes de vie et de développer une communication inclusive pour faire de la transition écologique une priorité.
« C’est un véritable privilège d’écouter les récits captivants de ces journalistes internationaux spécialisés dans le climat et le développement durable, rassemblés ici à Rome par Greenaccord », commente Joellen Russell, océanographe et climatologue américaine, spécialisée dans l’étude des changements climatiques et des océans. Selon elle, les journalistes jouent un rôle essentiel dans la lutte contre le changement climatique en partageant, à travers le monde et dans toutes les langues, des informations cruciales sur la science, ses impacts, et les solutions possibles pour améliorer la vie sur notre planète.
Russell, professeure de biogéochimie et de modélisation climatique à l’Université d’Arizona aux Etats-Unis, a fait une présentation lors de la session consacrée à la contribution des femmes. Elle est convaincue que la connaissance scientifique sera vaine « si nous ne parvenons pas à mieux informer le grand public sur les choix et les actions qui nous sont offerts ».
Témoignage d’une journaliste ukrainienne
L’un des moments forts du forum cette année a été l’intervention de la journaliste ukrainienne Alla Sadovnyk. « C’était ma première participation au Forum international sur la sauvegarde de la nature. En tant que journaliste d’investigation, c’était un événement entièrement nouveau pour moi, n’ayant pas encore eu l’occasion d’explorer en profondeur les questions environnementales. Pourtant, cette expérience s’avère déterminante pour mon avenir professionnel, car l’année prochaine, le radiodiffuseur public ukrainien, où je travaille, lancera un grand projet sur l’environnement. Ce projet abordera les répercussions de la guerre en cours, ainsi que les problématiques environnementales qui continuent à affecter l’Ukraine, malgré l’invasion russe », a dit Sadovnyk.
En effet, le forum offre une occasion unique d’acquérir une nouvelle perspective sur les défis environnementaux que rencontrent certains pays, tout en observant comment les journalistes abordent ces enjeux. « Certaines interventions, en particulier celles sur les pays en développement, m’ont particulièrement marquée. J’ai ainsi découvert que 14 millions de baguettes en bois sont utilisées chaque jour en Chine, un chiffre révélateur de l’impact environnemental des habitudes de consommation, un sujet auquel je n’avais jamais vraiment prêté attention auparavant », dit Sadovnyk.
La gestion des déchets a également capté l’attention. « L’été dernier, en raison de la guerre, de nombreux villes et villages n’avaient accès à l’électricité que quatre heures par jour. Ces défis autour de l’énergie sont particulièrement pertinents pour nous en Ukraine », a ajouté Sadovnyk.
« Certains des thèmes abordés au forum m’ont offert une perspective nouvelle et inattendue, notamment la contribution des femmes et du sport à la lutte contre le changement climatique », confie, pour sa part, Suzy El-Gueniedy, rédactrice en chef adjointe de la revue égyptienne Al-Ahram Al-Arabi.
Pour elle, le rôle des journalistes est essentiel dans la sensibilisation du public aux effets dramatiques du changement climatique. « L’intensification des vagues de chaleur, la montée des océans, les inondations, tout cela affectera la production agricole et entraînera une pénurie d’eau potable dans les années à venir. Ces bouleversements auront un impact direct sur les générations futures », affirme Suzy El-Gueniedy qui estime que la sensibilisation du public est un levier puissant pour inciter les institutions politiques et économiques à adopter des politiques plus engagées en faveur de la lutte contre le changement climatique.
Cependant, couvrir ces sujets dans le monde arabe n’est pas sans défis. Souvent, on ne saisit pas l’importance des enjeux climatiques. « Il faut redoubler d’efforts pour sensibiliser la presse à ces questions cruciales », souligne-t-elle. Et d’ajouter : « Avec la COP29 prévue en novembre à Bakou, en Azerbaïdjan, il y aura plus d’opportunités pour aborder ces sujets essentiels ».
Pour Andrea Masullo, directeur scientifique de Greenaccord, l’humanité fait face à une crise environnementale sans précédent, avec le changement climatique qui s’accélère et la biosphère en pleine dégradation. Les actions politiques sont trop lentes et inefficaces, et nous pouvons manquer les objectifs cruciaux de la décarbonation, tandis que les populations les plus vulnérables subissent les effets les plus destructeurs. Dans ce contexte alarmant, les journalistes ont un rôle-clé à jouer en sensibilisant le public et en mettant la pression sur les décideurs politiques pour des mesures audacieuses et immédiates.
Les responsables du forum espèrent que cette collaboration internationale aidera à surmonter les défis, en changeant les comportements face aux enjeux environnementaux et en renforçant les relations humaines grâce à une meilleure compréhension mutuelle.
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