Le traitement par électrochocs demeure un traitement efficace malgré le tabou.
Le parlement a approuvé la semaine dernière un projet d’amendement de la loi 71/2009 sur la santé mentale proposé par le gouvernement.
Les modifications comprennent un chapitre réglementant la pratique des psychologues qui exerceront leur activité sous la supervision d’un psychiatre, et après l’obtention d’un permis renouvelable tous les 7 ans.
Mais cette loi est surtout venue soulever un vieux débat autour de l’électroconvulsivothérapie (ECT), cette méthode de traitement par l’électricité utilisée en psychiatrie et qui consiste à délivrer un courant électrique d’intensité variable sur le cuir chevelu. La question du consentement du patient et celle des conditions, souvent aléatoires, dans lesquelles l’ECT est administrée ont longtemps été des pommes de discorde.
Selon Ayman Aboul-Ela, médecin et membre de la commission de la santé au Conseil des députés, cette nouvelle loi vise à renforcer le respect des droits des personnes atteintes de maladies mentales en leur offrant de meilleurs soins, en veillant à la formation adéquate des soignants. « Je peux résumer en trois points l’importance de cette loi. Il s’agit d’abord de définir les conditions qui gèrent le recours à l’ECT, et ensuite de réglementer l’exercice de ce métier à travers la création d’un Conseil national de la santé mentale qui sera chargé, entre autres, de la formation et l’accréditation des psychothérapeutes, afin de protéger la psychothérapie des intrus », explique Aboul-Ela.
Sur le premier point, il souligne que le texte de la loi a évité l’usage du terme « choc électrique » lui préférant l’appellation explicative de « modulation des ondes cérébrales ».
Informer le patient
La nouvelle loi rend obligatoire l’anesthésie générale lors des séances d’ECT ainsi qu’un accord écrit du patient (ou de sa famille) qui a droit à une explication de la nature de ce traitement, de ses effets secondaires et des alternatives disponibles. Au cas où l’état du patient représenterait une menace sérieuse pour sa propre vie ou pour la sécurité d’autrui, une évaluation médicale pourrait suffire pour qu’il soit amené à subir l’ECT. « Le cinéma a peut-être donné une image barbare à cette méthode thérapeutique. Or, pour certains cas, c’est un traitement efficace et ses effets secondaires ne sont pas comparables à ceux qui se manifestent après des années de traitement médicamenteux par antidépresseurs », explique Dr Medhat Thabet, neurologue.
Il apprécie le fait que la nouvelle loi a rendu obligatoire l’administration d’ECT sous anesthésie générale. « Sauf que l’anesthésie locale exige la présence d’un médecin anesthésiste. Or, c’est une spécialité rare dans les hôpitaux psychiatriques, ce qui fait que parfois, on se trouve obligé de faire l’ECT sous anesthésie locale, notamment dans les cas urgents », explique-t-il. « Ceci dit, je suis partisan de l’anesthésie générale pour éviter que le patient ressente des douleurs au cours de la séance et, plus important encore, éviter des traumatismes et des fractures dus à la crise d’épilepsie déclenchée par l’ECT. C’est pourquoi toutes les instances médicales internationales recommandent une anesthésie générale », ajoute Dr Thabet.
Commentant l’article de loi sur le consentement du patient, il explique que le plus souvent les patients qui nécessitent une séance d’ECT sont hors d’état d’exprimer leur volonté. « Mais bien entendu, le médecin discute avec la famille et obtient son permis avant de procéder à cela », dit-il. Aujourd’hui, les approches psychothérapeutiques et les différents antidépresseurs ont remplacé progressivement les électrochocs, les patients qui sont pris en charge assez tôt ne risquent pas d’en avoir besoin, estime-t-il. « Ceci dit, parmi les patients qui nourrissent des tendances agressives ou suicidaires, ou ceux qui souffrent de certaines formes de schizophrénie qui provoquent des raideurs corporelles, l’ECT demeure un traitement efficace susceptible d’agir sur la chimie du cerveau et d'améliorer la santé psychologique et mentale », conclut Dr Thabet.
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