En fait, ces décisions interviennent deux jours après le décret présidentiel en faveur d’une suspension des cours scolaires et universitaires et des activités sportives pour une durée de 15 jours à partir du 15 mars. Conformément à ce décret, le président Sissi a consacré 100 milliards de L.E., soit 6,4 milliards de dollars, pour financer la stratégie anti-coronavirus et les mesures de précaution. « Nous passons par des circonstances exceptionnelles. Cette somme vise à faire face aux éventuelles répercussions du nouveau coronavirus », a déclaré le porte-parole de la présidence, Bassam Radi. Dans un rapport publié par Bloomberg, intitulé « L’Egypte participe aux efforts internationaux de lutte anti-coronavirus », l’agence américaine valorise les plans globaux de financement adoptés par l’Egypte, les Emirats arabes unis et l’Arabie saoudite, pour endiguer ce virus. Les contributions de ces trois grandes économies du Moyen-Orient dans la lutte contre le coronavirus ont atteint au total 47 milliards de dollars, « ce qui donne un élan aux efforts internationaux déployés pour contenir les craintes des marchés, soutenir les perspectives de croissance économique et permettre aux pays touchés d’éviter davantage de pertes », dit Bloomberg.

La Banque Centrale d’Egypte (BCE) a décidé lundi de réduire ses taux directeurs de 300 points. Ceux-ci passent à 9,25 pour les dépôts et à 10,25 pour les prêts. La BCE a décidé également de reporter de six mois le remboursement des prêts. La Banque Centrale d’Arabie saoudite a dévoilé début mars que 50 milliards de rials (13,3 milliards de dollars) seront débloqués pour soutenir les entreprises privées, peu après que son homologue des Emirats arabes unis eut annoncé un programme de 100 milliards de dirhams (27,2 milliards de dollars) pour aider ses clients. L’Egypte a déclaré qu’elle allouerait 100 milliards de livres (6,4 milliards de dollars) pour lutter contre le coronavirus.

Pourquoi l’Egypte a accéléré ces mesures contre la pandémie ?

L’Egypte passe aujourd’hui à la deuxième phase de son plan national de lutte contre le coronavirus. Celui-ci consiste à freiner la propagation du virus. Au début de la crise, le ministère de la Santé a mis en place un plan d’alerte à trois niveaux. La première phase consiste à freiner l’introduction du virus dans le pays. La troisième phase, la plus dramatique, marque le début de la vague épidémique. « Nous suivons la situation jour après jour, l’Egypte figure toujours parmi les pays qui enregistrent le taux le plus bas de personnes infectées », dit Madbouli. Et d’ajouter : « Compte tenu du caractère évolutif de la diffusion du virus Covid-19, nous avons décidé d’agir tôt et de prendre des mesures décisives comme la suspension des cours, puisqu’on compte environ 22 millions d’élèves dans les écoles et 3 millions d’étudiants dans les universités, ce qui représente 25 % de la population ».

Dans un entretien accordé à la chaîne d’information américaine CNN, John Jabbour, représentant de l’OMS en Egypte, a salué la gestion de la crise du coronavirus en Egypte, en soulignant que l’Egypte et Oman sont les seuls pays de la région à disposer « d’un solide système de contrôle et de surveillance ». « L’Egypte a bien travaillé depuis le déclenchement de la crise et l’émergence de symptômes chez les touristes. Elle a intensifié les mesures de contrôle afin d’éviter la propagation du virus à grande échelle », a-t-il affirmé.

A chaque ministère son plan de lutte

Quel plan de lutte anti-coronavirus sera adopté au cours des deux prochaines semaines ? Dans le cadre du plan de soutien des forces armées aux institutions de l’Etat dans leur combat face au virus, le lieutenant-général Mohamad Farid, chef d’état-major de l’armée, a inspecté la semaine dernière le commandement général des forces armées ainsi que les mesures de prévention mises en place. Selon le plan du ministère du Tourisme, tous les hôtels et attractions touristiques du pays seront stérilisés au cours des deux prochaines semaines.

Malgré la suspension des vols, les touristes sont autorisés à poursuivre leurs programmes touristiques et à partir aux dates prévues. Le ministre du Tourisme et des Antiquités, Khaled El-Enany, a estimé lundi qu’après les nouvelles mesures, les pertes pourraient s’élever à 1 milliard de dollars par mois.

Les écoles et les universités vont profiter également de cette pause pour stériliser les classes et mettre en place un plan pour « l’enseignement à distance ». « La décision de suspendre les études dans les écoles et les universités est intervenue après la découverte de 6 cas dans les écoles et un cas à l’université », a précisé le ministre de l’Education, Tareq Chawqi. « Nous ne sommes pas en vacances, mais nous sommes en train de substituer la présence dans les écoles par l’enseignement à distance pour réduire les rassemblements et nous protéger contre ce virus ». Et d’ajouter : « Le ministre de l’Education dispose d’un riche matériel numérique pour les deux cycles secondaire et préparatoire ». Concernant les universités, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Khaled Abdel-Ghaffar, a affirmé que le contenu des cours quotidiens serait téléchargé sur les réseaux sociaux ou Youtube sous une forme simplifiée. « L’Université du Caire a posé un plan intégral afin de poursuivre les programmes d’enseignement en ligne pendant la suspension de 15 jours », a rassuré le chef de l’université, Mohamad Al-Khocht.

Par ailleurs, le ministère des Télécommunications et des Technologies de l’information a lancé plusieurs initiatives visant « à soutenir le processus éducatif et les méthodes d’enseignement à distance » pendant la période de suspension des études dans les écoles et les universités. Il s’agit de fournir un accès gratuit aux sites Web dépendant des ministères de l’Education et de l’Enseignement supérieur et d’augmenter la capacité de téléchargement à domicile à 20 %.

Les activités sportives ont été également suspendues dans tout le pays pendant deux semaines. Les gymnases ont fermé leurs portes. Dans un communiqué de la Fédération égyptienne de football samedi, les matchs de toutes les divisions seront suspendus à partir de lundi afin de contenir la propagation des infections. « Conformément aux instructions du premier ministre et du ministre de la Jeunesse et du Sport, et après avoir examiné les recommandations de la commission médicale de la fédération, nous avons décidé de suspendre les matchs de football pendant 15 jours à compter de lundi », a indiqué la fédération dans un rapport. « La décision s’applique à toutes les divisions des compétitions locales ». Concernant les clubs sportifs, le club de Zamalek a fermé ses portes pour une durée de 7 jours, alors que le club d’Ahli a décidé de réduire la durée du travail pour fermer ses portes à 20h.

Quels scénarios après 15 jours ?

Que se passera-t-il après la fin de deux semaines : prolongement ou retour à la normale ? « Tout est possible. L’évolution de la situation continuera à être évaluée jour par jour », assurent les responsables. Mais le grand défi reste l’inconscience du danger. Entre panique et nonchalance, la rue égyptienne est divisée. La foule redoutant une pénurie s’est ruée sur les supermarchés. Le premier ministre a enjoint les Egyptiens à « ne pas prendre les choses à la légère » et à « rester à la maison autant que possible ». « Il ne faut pas paniquer, il n’y aura pas de pénuries », a rassuré le premier ministre. « Il faut modifier nos comportements. Gouvernement et citoyens, chacun à une responsabilité à assumer », conclut Madbouli.

Congés payés et travail à distance

Dans un communiqué publié lundi 16 mars, le premier ministre égyptien, Moustapha Madbouli, a décidé une réduction du nombre de fonctionnaires sur leurs lieux de travail par mesure de précaution pour empêcher la propagation du coronavirus. D’après la décision ministérielle, plusieurs catégories de fonctionnaires ont droit à un congé payé de deux semaines, dont notamment ceux souffrant de maladies chroniques, les femmes enceintes, les mères d’enfants de moins de 12 ans, les fonctionnaires provenant d’un voyage à l’étranger, ou ayant été en contact avec une personne infectée. Cette décision qui concerne la fonction publique fait exception des « secteurs vitaux » comme les transports publics, les services médicaux, les ambulanciers, les services de l’eau et de l’électricité. Le gouvernement encourage, dans les limites du possible, les employés à effectuer leur travail depuis leur domicile, à se relayer pour assurer des permanences, en fonction des besoins de chaque organisme. Il enjoint les responsables de chaque organisme à prendre les dispositions nécessaires pour la protection de ses employés et du public.