Lors d’une rencontre avec la presse gouvernementale au siège de l’Autorité nationale de la presse, sous la direction de son président, Abdel Sadek El Shorbagui, la ministre de la Planification, du Développement économique et de la Coopération internationale, Rania Al-Mashat est revenue longuement sur le plan d’action 2024-2025 de son ministère, qui a vu le jour après le dernier remaniement ministériel en juillet dernier après le fusionnement des portefeuilles de la Planification et de la Coopération internationale.
La ministre a commencé par décortiquer les concepts de « développement économique » et de « coopération internationale ». Le développement économique étant un objectif et la coopération internationale étant l’outil qui permet d’attirer différents types de financements à l’attention des investissements publics et privés pour répondre aux exigences de l’économie.
En effet, le travail du ministère est basé sur deux cadres stratégiques, à savoir la Vision Egypte 2030 et le programme national de réformes structurelles. Selon la ministre, le développement économique est un objectif global qui résulte de l’amélioration des niveaux de vie d’une part, et du renforcement des capacités productives de l’autre. « Par définition, le développement économique est un concept large qui ne se limite pas à la seule croissance économique, mais regroupe un ensemble d’efforts et d’initiatives interconnectés à plusieurs niveaux », a expliqué Rania Al-Mashat. Il y a d’abord le développement humain qui se focalise sur l’éducation, la santé et le renforcement des compétences humaines, ensuite il y a le développement industriel qui s’oriente vers la production en créant des emplois, ce qui donne une impulsion aux Petites et Moyennes Entreprises (PME). Le troisième niveau est celui qui englobe tous les secteurs qui font l’objet d’échanges commerciaux comme l’industrie, l’agriculture et le renforcement des capacités compétitives. En d’autres termes, la diversification de la structure.

(Photo: Ahmed Refaat)
« Les réformes structurelles qui visent à réaliser le développement économique se font de manière continuelle et vont de pair avec les évolutions à la fois locales et régionales. Elles visent à améliorer l’environnement des affaires et à encourager le secteur privé », a déclaré Rania Al-Mashat.
La ministre a expliqué que les réformes macroéconomiques sont fondamentales, mais pas suffisantes et que la réalisation de la vision du ministère doit être assurée à travers la formulation de politiques publiques axées sur le développement au sens large en s’appuyant sur des données certifiées et une meilleure utilisation des ressources, afin de combler les lacunes du développement sectoriel et réaliser une croissance qualitative et durable. Le montant total des investissements dans le plan 2024-2025 devrait atteindre 2 000 milliards de L.E., dont 1 000 milliards alloués aux investissements publics et 987 milliards aux investissements privés.
L’arme de la diplomatie économique
La réalisation des objectifs du développement économique se fait à travers l’arme de la diplomatie économique, comme l’appelle la ministre, qui signifie « le recours à différents types de financement ». Parmi lesquels viennent en priorité les financements au service du développement, afin de mobiliser les ressources nécessaires aux secteurs prioritaires et ce, à travers les partenaires internationaux du développement. « C’est le cas par exemple des institutions internationales de financement et des banques multilatérales de développement, comme l’European Bank for Reconstruction and Development (EBRD), la Banque asiatique de développement, la Banque allemande pour la reconstruction, ainsi que les agences de développement comme l’Agence Française de Développement (AFD) et l’Agence allemande (GIZ) entres autres », a affirmé la ministre.
Les outils de financement englobent les crédits et les prêts, le mécanisme d’échange des dettes, le blended finance (financement mixte), qui est l’utilisation des financements au développement et des fonds philanthropiques pour mobiliser les flux de capitaux privés et soutenir les Objectifs du développement durable. Il y a aussi le soutien technique aux capacités humaines et institutionnelles et les investissements alloués aux projets stratégiques dans l’infrastructure, le développement humain et industriel.

(Photo: Ahmed Refaat)
L’Union européenne avait alloué à l’Egypte, en mars dernier, un financement de 7,4 milliards d’euros sous forme de prêts, d’aides et d’investissements, le tout dans le cadre d’un partenariat stratégique et global. Al-Mashat a déclaré que la première tranche d’un milliard et demi d’euros a servi à soutenir les politiques macroéconomiques et que des négociations sont attendues en avril prochain autour de 4 milliards qui seront destinés au soutien budgétaire et aux réformes. « Ceci en plus de 1,8 milliard d’euros octroyés sous forme de garanties d’investissement. Ce qui veut dire que n’importe quelle entreprise qui va travailler, que ce soit avec le secteur privé ou public, aura droit à des garanties d’investissement », a précisé la ministre.
En 2024-2025, les financements fournis avec des conditions favorables par des partenaires internationaux au secteur privé ont dépassé ceux orientés destinés au gouvernement. Les financements favorables fournis au secteur privé ont atteint 14,5 milliards de dollars entre 2020 et 2024. Ils ont été orientés vers de multiples secteurs comme les start-up, la technologie et l’innovation, les industries auxiliaires, la santé, la transition verte, le transport et les services logistiques.
La plateforme nationale d’investissement dans les projets verts NWFE (tirée des 4 initiales Nexus, Water, Food, Energy), lancée comme un modèle de localisation des solutions climatiques et de transition verte, a attiré ce type de financements dans les trois secteurs stratégiques : l’eau, la nourriture et l’énergie. « La plateforme est un modèle de développement pour traiter les questions relatives au changement climatique : l’adaptation climatique et la transition verte. Dans le cadre de la plateforme, des accords d’énergies renouvelables ont été signés d’une capacité de 4 200 mégawatts jusqu’à la fin de 2024 », a expliqué Al-Mashat. Les financements provenant des entreprises du secteur privé qui exécutent ces projets ont atteint 3,9 milliards de dollars depuis le début de l’application du programme en 2022. La ministre a donné plusieurs exemples comme celui de la coalition de la mer Rouge pour l’énergie éolienne (coalition entre Orascom construction, le groupe mondial de référence dans l’énergie à bas carbone, ENGIE, et la compagnie japonaise Toyota) qui a obtenu un financement de l’ordre de 725 millions de dollars de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, alors que la Banque japonaise de coopération internationale construit le parc éolien du golfe de Suez, d’une capacité de 650 mégawatts. Egalement, le parc solaire d’Abidos, de 500 mégawatts, a obtenu un financement de 500 millions de dollars de l’International Finance Corporation et de la Banque japonaise de coopération internationale.
La gouvernance des investissements publics
Al-Mashat a également évoqué les efforts déployés par le ministère pour « maîtriser la gouvernance des investissements publics », c’est-à-dire accroître l’efficacité des dépenses et des investissements publics, afin de parvenir au développement économique souhaité. « Un certain nombre de mesures ont été prises pour réaliser la gouvernance des investissements publics et réarranger les priorités du plan d’action 2024-2025. Le plafond de ces investissements est de 1 000 milliards de L.E. », a clarifié la ministre. Selon elle, il est fondamental de procurer les investissements requis aux projets qui sont dans la phase de finalisation, ou bien ceux dont le taux de finalisation a atteint 70 % tout en écartant les nouveaux projets. « Il incombe également de prendre en compte l’impact des conditions économiques sur les coûts de l’investissement public et d’impliquer le secteur privé conformément au Document de la propriété de l’Etat ».
Selon la ministre, l’un des moyens de réaliser la bonne gouvernance des investissements publics est d’attirer le secteur privé dans les domaines stratégiques. Les objectifs étatiques sont de faire en sorte que ces investissements atteignent 50 % de l’ensemble des investissements fin 2024-2025 et de réduire les investissements gouvernementaux. « D’ailleurs, les indices qui nous proviennent affirment que les efforts du gouvernement pour favoriser la croissance du secteur privé sont sur la bonne voie, et nous projetons une croissance du PIB de 4 % au cours de l’exercice 2024-2025 », a annoncé la ministre. Les investissements privés ont augmenté de 30 %, atteignant 133,1 milliards de L.E. contre 102,3 milliards de L.E. au même trimestre en 2023-2024. En revanche, les investissements publics ont connu une baisse significative de 60,5 %, totalisant 57 milliards de L.E. contre 144,4 milliards de L.E. au trimestre correspondant de l’année précédente.

Des accords d’énergies renouvelables ont été signés, d’une capacité de 4 200 mégawatts jusqu’à fin 2024.
L’initiative présidentielle Vie décente
Cette initiative de développement global vise à opérer un changement qualitatif dans la vie des Egyptiens. C’est la plus grande initiative de l’histoire de l’Egypte du point de vue du nombre de bénéficiaires et du financement. Le nombre de bénéficiaires de la première phase du projet a atteint 18 millions de citoyens dans 1 500 villages, 68 % vivent en Haute-Egypte. Le coût de cette phase a atteint 350 milliards de L.E. 23 100 villages ont été développés avec un coût de 21 milliards de L.E
La stratégie de développement économique et social 2025-2026
La ministre a annoncé qu’une collaboration est en cours avec les différents ministères, les organismes généraux, les gouvernorats, le secteur privé et la société civile pour établir la stratégie du développement économique et social 2025-2026. « Les budgets des trois prochaines années seront déterminés par le budget général de l’Etat. Et ce, dans le cadre d’un système de planification basé sur la croissance inclusive et les critères de durabilité et d’efficacité des dépenses publiques. Il y aura des planifications à long, moyen et court termes, selon les priorités déterminées », a-t-elle conclu.
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