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La Tunisie cherche l'équilibre budgétaire

Gilane Magdi, Mardi, 06 mai 2014

Le gouvernement tunisien cherche à couper les subventions à l'essence pour réduire son déficit budgétaire. Ces mesures, prises sous la pression des institutions internationales, vont de pair avec d'autres, plus symboliques, comme la baisse des salaires des hauts fonctionnaires.

Tunisie
Annuler les bons d'essence des fonctionnaires n'économise que 100 millions de dinars sur 6 milliards pour la subvention à l'énergie. (Photo : Reuters)

Baisse des subventions sur l’essence et des salaires des fonctionnaires: le plan de réduction du déficit budgétaire tuni­sien vise avant tout à obtenir l’aide promise d’un milliard de dollars en 2014. Sous la pression des institutions internationales, le Conseil des ministres a approuvé, le 2 mai, un train de mesures visant à réduire les dépenses publiques et à freiner le gonflement du déficit commercial.

Au niveau du budget, il s’agit notamment de réduire de 10% les salaires des ministres et secré­taires d’Etat. Un autre 10% de leurs salaires sera escompté pour souscrire à des titres gouvernemen­taux qui seront prochainement lancés par le gouver­nement. Les mesures comprennent aussi la vente des voitures de fonction. Des actions plus symbo­liques qu’efficaces.

De même pour le remplacement des bons d’es­sence des fonctionnaires, à partir du mois prochain, par une prime financière compensatoire avec une réduction de leur valeur de 10%. Les économies prévues sont minimes, bien que symboliquement fortes. « Nous avons pris ces mesures pour réduire les dépenses publiques », a réitéré le porte-parole du gouvernement, Nedal Al-Warfali, sans donner plus de détail sur les montants éco­nomisés.

Des mesures plus agressives avaient été annoncées au début de l’année: supprimer graduellement les subventions à l’énergie. Celles accordées aux cimenteries ont déjà été réduites de moitié. Le reste sera coupé en juin prochain.

Le ministère de l’Industrie et du Commerce a aussi annoncé l’annulation graduelle des subventions à l’énergie accordées au secteur de l’industrie agroalimentaire.

Ces décisions interviennent à un moment très crucial pour l’économie tunisienne. Cette dernière souffre depuis ces trois der­nières années d’un gonflement de son déficit budgétaire passant à 5,9% du PIB en 2013 contre 1,1% en 2011, d’après les chiffres du FMI.

Grâce aux mesures entreprises, le ratio devrait fléchir à 5,3% du PIB vers la fin de 2014, selon les estimations du ministère des Finances.

Souhaitant donner l’exemple, le président, Moncef Al-Marzouki, a réduit, le mois dernier, son salaire d’un tiers. Idem pour les réductions salariales des hauts fonctionnaires. « Les mesures attendues pour la compression des dépenses dans les ministères n’auront pas un grand impact sur la maîtrise des dépenses de l’Etat », souligne Jamel Belhaj, direc­teur général de la Caisse des dépôts et de consigna­tions.

Les bons d’essence des fonctionnaires ne repré­sentent que 100 millions de dinars sur un budget total de 6,8 milliards pour les subventions à l’énergie dans le cadre du budget 2014.

Recours à l’endettement

Toutefois, pour remplir ses engagements, le gou­vernement n’aura d’autre choix que de recourir à l’endettement. Le pays devra s’endetter auprès des institutions internationales et de différents pays pour combler un écart budgétaire de 6,3 milliards de dol­lars entre revenus et dépenses.

« Il manquait 4 milliards de dinars (soit 6,3 mil­liards de dollars, ndlr) dans le budget de l’Etat 2014. Nous ne savons pas d’où les ramener. Il faut que nous trouvions les ressources. Nous avons l’in­tention de lancer une souscription pour renflouer les caisses de l’Etat, mais ce n’est pas suffisant. J’ai l’intention d’aller dans les pays du Golfe, aux Etats-Unis et en France. Nous allons emprunter encore plus », a déclaré le mois dernier le premier ministre, Mehdi Jomaa. Celui-ci a formé à la fin de janvier dernier un gouvernement apolitique après le départ de la coalition menée par le parti islamiste Ennahda.

Jusqu’à présent, le pays a reçu des aides et des crédits de 3,2 milliards de dollars des institutions internationales telles que le FMI, la Banque mon­diale et de pays comme les Etats-Unis et le Japon. Ces derniers ont exigé de la Tunisie d’adopter des réformes structurelles concernant la réduction des subventions à l’énergie. « Bien que l’adoption de la Constitution et la formation du nouveau gouverne­ment aient maximisé la confiance dans les perspec­tives politiques et économiques, le déficit budgétaire et commercial reste un grand défi », prévient Min Zhu, directeur général adjoint du FMI.

Le FMI a versé, le 25 avril, 225 millions de dollars destinés à aider la Tunisie durant sa période de transition. Ce financement représente la troi­sième tranche du plan d’aide, approuvé en juin 2013, d’un montant de 1,75 milliard de dollars. Min Zhu a sobrement indiqué que les critères de réalisation quantitatifs prévus pour fin mars « semblent avoir été remplis », même si à ses yeux « les réformes structurelles ont été ralen­ties par la crise politique prolongée de l’an dernier », notamment sur le plan du chômage qui reste élevé et des déséquilibres budgétaires et extérieurs persistants.

L’agence Fitch, si elle a maintenu la note de la Tunisie à BB avec des perspectives néga­tives, a prévenu que « les facteurs de risques tels que l’échec de la réduction du déficit bud­gétaire ou la reprise des tensions politiques pourraient entraîner la dégradation de la note ». Aujourd’hui, la réduction des subven­tions à l’énergie reste le seul recours possible pour contenir le déficit budgétaire.

Limiter les importations, une priorité

Le Conseil des ministres vise à rationaliser les importa­tions, notamment en provenance des pays avec lesquels la balance commerciale souffre de déficit (la Chine et la Turquie). De même, des mesures exceptionnelles devraient être prises pour limiter l’importation de certains produits qui possèdent leur équivalent en production nationale. L’objectif est de réduire le déficit de la balance commerciale qui tournait aux alentours de 11% en 2013, et 7% début 2014.

Ces mesures interviennent au moment où la Banque Centrale de Tunisie annonce un recul des réserves en devises à 6,4 milliards de dollars, soit une baisse de 5,5% par rapport à l’année dernière. Cette baisse des avoirs en devises du pays a entraîné une régression de la capacité d’importation de la Tunisie de 102 à 93 jours.

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