Le nombre de chômeurs est en hausse sur le marché égyptien.
Le manque d’investissements, publics comme étrangers, et la décélération de la croissance économique dans les pays de la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord) impliquent que le taux de chômage des jeunes y soit le double du niveau mondial. C’est ce que révèle le dernier rapport intitulé « Tendances mondiales de l’emploi 2014 : vers une reprise sans emplois ? » publié le 19 février au Caire par l’Organisation Internationale du Travail (OIT). « Bien que le taux de chômage dans les pays MENA reste quasiment stable en 2013, c’est-à-dire aux alentours de 11,5 %, le taux de chômage des jeunes de 14 à 24 ans dans la région reste le plus élevé du monde avec 27,2 % au Moyen-Orient et 29 % en Afrique du Nord. Ces taux sont les doubles des taux mondiaux (soit 13,1 %) », souligne le rapport, présentant les tendances ainsi que les projections régionales et mondiales en matière d’emploi.
L’Egypte est la plus touchée par ce phénomène. Selon le rapport, ce taux de chômage atteint 19 % au Maroc, 22 % en Algérie et 25 % en Egypte. « Le chômage des jeunes est 3 fois plus élevé que celui des adultes. C’est un indice très dangereux, car les jeunes sont les plus actifs », avertit Youssef Al-Karyouti, directeur de l’OIT pour la région de l’Afrique du Nord, à l’issue d’une conférence de presse tenue à l’occasion du lancement du rapport. Il prévoit le prolongement de cette situation jusqu’à 2020. De même, le rapport note la faiblesse de l’emploi des femmes par rapport aux normes internationales. Ce taux a atteint 23 % dans la région MENA, contre 60 % dans les pays développés.
Moment crucial
La publication de ce rapport intervient à un moment crucial pour l’Egypte, qui traverse une crise économique majeure caractérisée par le recul des taux de croissance et des ressources limitées. Conséquence : accélération des chiffres du chômage avec la fermeture d’usines suite à la révolution, et l’incapacité du gouvernement à créer de nouveaux emplois aux jeunes diplômés. D’après les chiffres officiels de la Banque Centrale d’Egypte (BCE), le taux de chômage est passé de 9 % en 2010 à 13,2 % en 2013. « Ce problème est structurel non seulement en Egypte, mais aussi dans les pays MENA. L’Egypte n’a pas pu freiner la hausse du chômage avec un taux de croissance prometteur (5,1 % en 2009/2010) sous le régime Moubarak. Alors, sera-t-elle capable de le freiner aujourd’hui avec un taux de croissance de 2,1 % ? », se demande Youssef Karyouti. Ainsi, le rapport note la chute de la croissance dans la région MENA de 5,6 % en 2011 à 2 % en 2013. Ce recul majeur revient en grande partie à la chute énorme des investissements locaux, et par conséquent, l’incapacité du pays à créer de nouveaux emplois.
Ajoutant à la décélération des taux de croissance l’instabilité politique régnant sur les pays du Printemps arabe, tels que la Tunisie et l’Egypte, qui a eu des répercussions graves sur les investissements étrangers. « L’Egypte est le pire exemple de la région. Ce pays recevait 9 milliards de dollars par an avant la révolution de 2011, alors qu’elle n’a pas reçu d’investissements pendant l’année 2011/2012. Cette situation a entravé la création de nouveaux emplois durant cette période », renchérit Youssef Al-Karyouti, qui critique la concentration des investissements étrangers dans les secteurs faibles créateurs d’emplois comme le secteur pétrolier et celui des hydrocarbures.
Le rapport donne l’exemple de l’Egypte, où 45 % des Investissements Etrangers Directs (IED) sont injectés dans le secteur pétrolier. Une part qui s’élève à 61 % en Tunisie dans le secteur des hydrocarbures. « Il faut diriger les investissements directs dans des secteurs qui offrent plus d’emplois aux jeunes, tels que la construction et l’industrie », revendique Youssef Karyouti, en exprimant son optimisme à l’égard de l’impact des deux plans de stimulation adoptés par le gouvernement égyptien, d’un montant de 30 milliards de L.E. chacun, sur la baisse du chômage dans la période à venir.
Mais Ziad Bahaeddine, vice-premier ministre pour le développement économique, l’un des initiateurs des plans et qui vient de quitter ses fonctions, a minimisé cet impact. « Il est peu probable que le taux de chômage baisse comme prévu en trois ans de 13 % à 9 %, même si l’application des plans se fait dans les temps », a-t-il récemment dit à l’Hebdo. Pour plusieurs économistes, la majorité des emplois offerts par le 1er plan sont temporaires et n’offrent ni assurance sociale, ni même un salaire minimum.
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