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Des mesures contre l’inflation

Amani Gamal El Din , Jeudi, 12 janvier 2023

La Banque Centrale d’Egypte a décidé d’un nouveau flottement de la livre égyptienne et de l’émission de certificats de dépôt d’un taux d’intérêt élevé. Ces décisions sont destinées à stabiliser les prix sur le marché.

Des mesures contre l’inflation
Une stabilité des taux de change est attendue au début du deuxième trimestre de 2023.

La banque centrale d’Egypte (BCE) a pris une mesure radicale dans la journée du 4 janvier, celle de flotter la livre égyptienne pour la troisième fois depuis mars 2022. Parallèlement, les deux plus grandes banques publiques, Al-Ahly et Misr, ont émis des certificats de dépôt d’un taux d’intérêt de 25 %, le plus haut de l’histoire bancaire. Il faut dire que cette mesure était attendue un peu plus tôt avec la hausse des taux d’intérêt directeurs effectuée à la troisième semaine de décembre. Le comité des politiques monétaires avait alors relevé de 3 % les taux d’intérêt pour les situer à 16,25 % pour les dépôts et 17,25 % sur les crédits.

Juste après l’émission de ces certificats de dépôt, la livre égyptienne a perdu en une seule journée environ 8 % de sa valeur pour s’échanger audessus de 27 L.E. pour le dollar. La livre avait perdu 70 % de sa valeur depuis mars 2022, quand elle s’échangeait à 15,78 le dollar. La première réaction à l’émission des certificats fut le recul des indices boursiers EGX en début de journée. Mais, l’indice principal EGX30 a enregistré une hausse en fin de journée de 3,25 %, pour clôturer à 15 557 points. La valeur nominale des actions a dépassé la barre d’un trillion de L.E. pour la première fois depuis 2018.

« Le timing du lancement des deux certificats de dépôt est propice et leur émission convient aux conjonctures actuelles car ils auront comme conséquence l’arrêt du phénomène de dollarisation. Les hauts taux d’intérêt sont un incitateur qui amènerait les détenteurs des billets verts à les intégrer dans le système bancaire. Il s’agit là d’une manière indirecte de contrer l’inflation en réduisant les liquidités sur le marché », explique Hani Guéneina, professeur d’économie à l’Université américaine du Caire.

Mohamad Al-Atreby, PDG de la Banque Misr, a expliqué que les certificats réduisent l’écart entre le rendement sur les devises étrangères, le dollar et l’euro, qui sont à moins de 5 %, et ceux de la livre égyptienne qui atteignent 25 %. Il a ajouté que « les théories économiques affirment que dans un environnement de forte inflation, la livre égyptienne est mieux dépensée sur des actifs qui conservent leur valeur°». Selon lui, en 2017, suite au premier flottement, les banques publiques ont émis des certificats de dépôt de 20 % pour freiner l’inflation qui était montée en flèche à plus de 31 %. Par la suite, l’inflation a baissé à 5-6 %. Il a estimé que les certificats deviennent un instrument pour atteindre l’objectif d’une stratégie visant à ramener l’inflation, qui a atteint 18,7 % en novembre, à un seul chiffre. En effet, en 5 jours, les certificats ont collecté 119 milliards de L.E.

Vers une stabilité des taux de change

Pour sa part, Guéneina estime qu’il faut donner libre cours aux hauts rendements en livre égyptienne pour mettre un terme aux spéculations sur la monnaie locale alimentant le marché noir, ainsi que pour mettre un terme à la dollarisation. L’expert croit que « pour inciter les citoyens à dédollariser, il faut proposer des outils générant de hauts rendements, comme les certificats de dépôt, afin de compenser les impacts inflationnistes dus à la hausse des prix. J’assume que ce qui amènerait les citoyens à dédollariser est de voir un taux de change stable°». Il met en avant l’exemple de la Turquie qui a fait un flottement réel depuis février 2001 et a offert des certificats à d’énormes taux d’intérêt, au-dessus de 20 %, pour contrer l’effet du flottement.

Selon une note publiée par la banque d’investissement Naeem Holding, il y aura un effet satisfaisant sur le court terme. Dans un mois ou un mois et demi, le marché noir devrait disparaître complètement. « La valeur de la livre égyptienne se rétrécira de 5 % dans le court terme pour atteindre 28 L.E. et comblera graduellement le fossé avec le marché noir fin février (autour de 29-30 L.E. le billet vert actuellement) », lit-on. D’autres financements proviendront de diverses sources dans les mois qui viennent, à commencer par le crédit du FMI de 3 milliards de dollars. S’y ajoutent 10 autres milliards de dollars qui seront injectés grâce aux opérations d’acquisition dans divers secteurs. Ce flux de devises étrangères aura un impact considérable sur la stabilisation du taux de change, analyse le rapport.

Guéneina s’attend à une stabilité des taux de change au début du deuxième trimestre de 2023. « La prochaine réunion du comité des politiques monétaires relèvera les taux d’intérêt de 200 points au plus. Mais, à la fin de 2023, on va de nouveau revenir à la baisse des taux d’intérêt. Les investissements dans les bons de Trésor, qu’on appelle hot money, vont revenir (25 milliards avaient fui pendant l’année dernière), parce qu’il y a un appétit pour les marchés émergents qui ont tous relevé leurs taux d’intérêt. Tous les gestionnaires des fonds d’investissement mondiaux disent dans leur rapport que les capitaux vont s’intensifier dans les marchés émergents dans la deuxième moitié de 2023 », conclut-il.

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