Les employés concernés par la loi sur la fonction publique se verront accorder une prime de 7,5 % sur le salaire mensuel. (Photo : Bassam AI-Zoghbi)
Le président Abdel-Fattah Al-Sissi a ordonné l’augmentation du salaire minimum et des pensions de la fonction publique à 2 400 L.E. (153 dollars) par mois. La décision fait partie d’un plan plus ample stipulant la hausse des salaires des fonctionnaires publics. Ainsi, les salaires et les pensions de la fonction publique dans le budget étatique de 2020-2021 connaîtront une hausse d’un total de 68 milliards de L.E. (4,34 milliards de dollars), selon un communiqué de la présidence. Les pensions vont augmenter d’environ 13 % à un coût de 31 milliards de L.E., tandis que le coût de l’augmentation des salaires des employés de l’Etat dans le budget de l’année prochaine représente 37 milliards de L.E. Le président Sissi a donné ces directives lors d’une réunion, lundi 15 mars, avec le premier ministre, Moustapha Madbouli, et le ministre des Finances, Mohamad Maeit, où ils ont examiné le nouveau projet de budget pour l’exercice 2021-2022 qui entrera en vigueur début juillet.
Héba el-Leithy, professeure de statistiques à l’Université du Caire et conseillère du président de l’Agence centrale pour la mobilisation publique et les statistiques (CAPMAS), estime que la hausse du salaire minimum de 400 L.E. est importante, mais son effet sur les ménages diffère selon le nombre de personnes qui travaillent dans chaque famille. « Si une seule personne travaille dans une famille de quatre ou cinq, la hausse n’aura pas d’effet significatif sur le budget de la famille, mais si plus d’une personne travaillent dans la famille, son effet serait bien ressenti », opine-t-elle.
En général, tous les employés couverts par la loi sur la fonction publique se verront accorder une prime de 7,5 % sur le salaire mensuel. Quant aux employés non couverts par la loi en question, ils se verront accorder une prime pour une seule fois correspondant à 13 % de leur salaire de base, lit-on dans le communiqué. Le ministre des Finances a dit, dans un entretien télévisé, que 3 millions d’employés bénéficieraient de l’allocation, il s’agit de ceux qui ne sont pas visés par la loi sur la fonction publique, indiquant une augmentation des incitations à l’emploi. Le ministre a également noté que le budget pour le prochain exercice comprendrait une incitation pour les travailleurs qui déménagent dans la Nouvelle Capitale administrative, en construction à l’est du Caire, d’une valeur de 1,5 milliard de L.E. sous forme d’un versement de logement ou d’une allocation de transfert. L’année fiscale 2021-2022 connaîtra également une promotion des employés qui remplissent les conditions de promotion d’ici le 30 juin 2021, pour un coût total de 1 milliard de L.E.
La hausse du salaire minimum est la deuxième de son genre en deux ans ; en 2019, le président avait réclamé une augmentation de 67 % du salaire minimum à 2 000 L.E. contre 1 200 L.E. décidées en 2013. Cette hausse a eu lieu quelques années après l’implémentation de mesures d’austérité liées à la réforme économique mises en oeuvre en 2016, comprenant des mesures telles que le flottement de la monnaie locale, la réduction des subventions et l’imposition d’une taxe sur la valeur ajoutée. Des réformes qui faisaient partie d’un accord de financement de 12 milliards de dollars du Fonds monétaire international. Des réformes qui ont contribué à la baisse du déficit budgétaire et la réalisation d’un surplus primaire dans le budget étatique mais qui ont aussi causé une hausse des prix, affectant les ménages. « En additionnant les deux hausses du salaire minimum depuis 2019, celui-ci a doublé, ce qui crée un équilibre relatif avec la hausse des prix qui a résulté des réformes économiques », estime Héba el-Leithy. Le ministre des Finances a déclaré que le nouveau projet visait une réduction totale du déficit de 6,6 % et un excédent budgétaire primaire de 1,5 %.
Discussions dans le secteur privé
La hausse du salaire minimum des fonctionnaires publics doit être suivie d’une hausse dans les salaires du secteur privé. La décision du gouvernement d’augmenter les salaires ou les primes est habituellement suivie par des réunions entre le gouvernement et les représentants de la Fédération des industries égyptiennes pour discuter des possibilités et du niveau de hausse que le secteur privé peut octroyer. « Normalement, le secteur privé augmentait les salaires avec le gouvernement, mais il serait difficile d’obliger le secteur privé dans les circonstances actuelles de ralentissement de l’activité économique dans plusieurs secteurs et des incertitudes résultantes de la crise du Covid-19 à augmenter les salaires », prévoit Héba el-Leithy. Ajoutant qu’en 2019, à titre d’exemple, il était plus facile d’implémenter une telle décision dans le secteur privé. « Les hommes d’affaires vont prendre la décision en fonction du niveau d’activité. Il serait difficile pour certains secteurs d’augmenter les salaires alors que l’activité économique risque de connaître un ralentissement soudain avec la hausse des cas de coronavirus », ajoute-t-elle. Mohamed el-Bahey, membre du conseil d’administration de la Fédération des industries, assure que le secteur privé augmente les salaires avec les hausses périodiques des primes. « Le conseil d’administration de la fédération a maintenu des réunions avec les présidents des chambres, et chaque secteur va augmenter les salaires selon les estimations de croissance. La majorité des secteurs vont augmenter les salaires. Cependant, certains comme celui du textile, de l’emballage ou bien les industries localisées dans des zones frontalières ne vont pas pouvoir à cause de la baisse des marges des profits à ces secteurs. Si on impose le salaire minimum à0 ces secteurs, beaucoup de personnes vont sortir du marché du travail, ce qui affectera les ménages », explique el-Bahey, ajoutant que ces secteurs ne nécessitent pas de main-d’oeuvre habile et donc la majorité des travailleurs sont des nouveaux entrants sur le marché de travail.
El-Bahey estime que la décision de hausse des salaires bénéficie à la fois aux ouvriers, à l’économie et au secteur privé. « Toute hausse des salaires et toute amélioration des économies des ménages se reflètent en une expansion du marché et de l’activité économique et donc de la production et de la consommation, et aussi une hausse des revenus étatiques à travers les taxes et les impôts », explique-t-il. Il est prévu que le Conseil national des salaires tiendra, dans un court délai, des réunions avec des représentants des hommes d’affaires, des ouvriers et du gouvernement pour discuter de la hausse des salaires du secteur privé .
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