Les banques publiques veulent devenir des banques universelles qui possèdent toutes les plateformes d’investissement. (Photo : Ahmad Abdel-Razeq)
Les banques publiques ont manifesté dernièrement un grand intérêt pour le secteur financier non bancaire (banque d’investissement et sociétés de services financiers) à travers des offres d’acquisition. Récemment, la Banque Misr a présenté une offre d’achat à la banque d’investissement CI Capital Holding (CICH), numéro 2 sur le marché financier. En vertu de l’offre, approuvée par l’Autorité de réglementation financière, la Banque Misr (qui possédait déjà 24,7 % de CICH) voudrait augmenter sa part à 90 % en achetant 652 millions d’actions d’une valeur de 4,7 L.E. chacune. Plus tôt, au début du mois de février, la Banque du Caire avait présenté une offre d’achat d’une part importante de la banque d’investissement HC. Cette dernière offre une gamme de produits financiers comme la gestion des actifs, l’investissement direct et l’échange des titres financiers. « L’expansion dans le secteur financier est devenue une tendance pour consolider les positions des banques publiques dans ce secteur porteur d’opportunités de croissance élevées », explique Abanob Magdy, analyste auprès de la banque d’investissement Beltone Financial. Il juge le moment propice pour les banques publiques pour acquérir ces entités à des prix abordables. « L’évaluation de ces entreprises est en baisse en raison de la situation du marché financier par rapport à la période d’avant la pandémie », souligne-t-il, en donnant l’exemple de la dernière offre d’acquisition de CICH. « L’action a été évaluée à 4,8 L.E., alors que sa valeur était de 6,30 L.E. avant la pandémie de coronavirus », assure-t-il.
L’intérêt des banques publiques pour le secteur financier non bancaire a commencé dès la fin 2019, lorsque la Banque Nationale d’Egypte (NBE), plus grande banque publique, avait acquis la société de courtage Pharos Securities. La liste des acquisitions comprend aussi l’achat de la société de courtage Arabya online par NI Capital (bras d’investissement de la Banque nationale d’investissement, NBA), exécutée en Bourse le mois dernier. « Les banques publiques veulent devenir des banques universelles qui possèdent toutes les plateformes d’investissement, ce qui leur donne la possibilité de proposer à la fois des produits commerciaux et financiers », explique Abanob Magdy. Et d’ajouter que les responsables de la Banque Misr ont remarqué l’importance d’adopter en ce moment ce mode universel qui enlève toute barrière entre les activités commerciales des banques traditionnelles et celles du secteur financier non bancaire.
Le secteur financier non bancaire comprend les activités financières autres que les opérations traditionnelles des banques (réception des dépôts et octroi des crédits). Ce secteur compte différents types d’établissements financiers comme les sociétés de financement des particuliers et des entreprises qui offrent des possibilités de crédits plus aisés que les banques, les sociétés de microfinance, les sociétés de leasing ou de crédit-bail (offrant à l’emprunteur la possibilité de louer un bien immobilier assortie d’une promesse de vente en devenant propriétaire au terme du crédit). Le secteur comprend aussi les banques d’investissement (établissement financier spécialisé dans les opérations de marché : introduction en Bourse, trading) et les sociétés de paiement électronique.
Les banques veulent consolider leur position
Le directeur du département des recherches à la banque d’investissement Prime Holding, Amr Al-Alfy, note que les banques publiques veulent ajouter à leurs activités les plateformes d’investissement nécessaires à l’introduction en Bourse. « Etant donné la reprise prévue du programme gouvernemental d’introduction en Bourse des entreprises, il est important pour les banques publiques de s’approprier les activités des banques d’investissement et des sociétés de courtage », explique Amr Al-Alfy, en assurant qu’il était important pour la banque NBE de posséder une société de courtage comme Pharos Securities. Le PDG de la banque NBE, Hicham Okacha, a reconnu l’importance de l’acquisition de Pharos. « Cette acquisition intervient dans le cadre du plan de la banque visant à créer une banque d’investissement globale en vue d’attirer des investissements étrangers sur le marché égyptien », affirme-t-il.
Al-Alfy assure que ce type d’acquisition est avantageux pour les deux parties. Au niveau des banques publiques, elles vont augmenter leurs revenus provenant de la gestion des opérations d’émission en Bourse des sociétés introduites en Bourse. « D’ailleurs, les banques d’investissement ou les sociétés de courtage, qui souffrent déjà de la volatilité de leurs performances sous l’effet de la pandémie de Covid-19 et la remise des opérations de cotation en Bourse, auront les liquidités nécessaires pour attirer de nouveaux investissements », affirme Al-Alfy.
Services financiers, un rendement élevé
Dans le cadre du programme d’inclusion financière du gouvernement et de la baisse continue des taux intérêt bancaires, l’expansion des banques dans le secteur financier non bancaire est devenue nécessaire pour soutenir leurs activités commerciales liées à l’octroi des crédits. « Bien que les banques veulent investir l’excédent de liquidités en leur possession dans l’octroi des crédits, elles restent prudentes et craignent le non-remboursement à cause de la pandémie. Donc, elles peuvent surmonter ce problème à l’aide des sociétés de services financiers qui ont prouvé leur succès dans ce domaine. Ces sociétés disposent d’une main-d’oeuvre capable d’octroyer des crédits aux clients dans les zones éloignées et d’assurer le suivi des remboursements », explique à l’Hebdo Abanob Magdy, en ajoutant que le ratio de crédits-dépôts reste modeste en Egypte malgré la baisse des intérêts bancaires sur l’emprunt de 400 points l’année dernière pour atteindre 9,25 %. D’après le dernier rapport de la Banque Centrale d’Egypte (BCE), le ratio des crédits-dépôts atteint 43,2 %. « Ce ratio est à 50 % de son niveau dans les pays de la région MENA », renchérit Abanob Magdy, en ajoutant qu’un grand nombre de citoyens n’ont pas encore bénéficié des outils de services financiers non bancaires. « Les banques, en tant qu’activité commerciale, peuvent s’engager dans des activités de crédit à la consommation, mais le microfinancement nécessite un grand nombre d’agences et d’employés dans les villages et les hameaux pour atteindre le plus grand nombre de clients », souligne Abanob Magdy.
En revanche, en adhérant aux banques publiques, les sociétés de services financiers accèderont à une base financière plus large, ce qui leur donnera la possibilité d’élargir leurs activités de financement. Etant donné que le rendement des services financiers est plus élevé que celui des activités commerciales des banques, les services non financiers constituent une activité de soutien aux banques publiques. « Le rendement des services financiers non bancaires est élevé. Par exemple, dans le secteur de la microfinance, la marge d’intérêt dépasse la barre des 20 %, et donc les banques commerciales en bénéficieront si elles acquièrent des entités opérationnelles dans ce secteur », conclut Monette Doss, analyste senior pour le secteur de la macroéconomie et des services financiers à la banque d’investissement HC.
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