Le 22 novembre, malgré la persistance de la crise du Covid-19, le gouvernement égyptien a relevé ses estimations de croissance pour la période fiscale 2018-2020 qui s’est terminée en juin dernier. Le vice-ministre de la Planification, Dr Ahmad Ahmad Kamali, estime que la croissance se situera entre 3,5 et 3,8 %, contrairement aux précédentes prévisions de 3,5 %. Kamali a déclaré que le ministère travaille actuellement sur l’élaboration d’un ensemble de scénarios pour affronter la deuxième vague du coronavirus. Il a ajouté qu’à la lumière des interventions gouvernementales, un rapport international sera publié sur l’impact du coronavirus sur l’économie égyptienne. Les prévisions de la banque d’investissement Prime vont de pair avec celles du gouvernement, estimant que le taux de croissance baissera légèrement à 3,3 % en 2021-2022. « Pour l’exercice passé, l’effet du Covid-19 n’a été ressenti qu’au quatrième trimestre, mais pour l’exercice en cours, la croissance des trois premiers trimestres a été affectée par la pandémie », explique Mona Bedeir, économiste auprès de Prime. Elle souligne que le secteur vital de l’économie ne se redressera pas complètement avant la fin de la pandémie et la découverte d’un vaccin. L’Egypte est l’une des rares économies au niveau mondial à maintenir un taux de croissance positif malgré la crise.
L’annonce d’une hausse probable de la croissance a été faite par une mission du Fonds Monétaire International (FMI) en visite en Egypte du 4 au 15 novembre. L’équipe du FMI et les autorités égyptiennes sont parvenues à un accord sur le premier examen de l’accord de confirmation de 12 mois. Les experts du bailleur international estiment que l’Egypte est en bonne voie pour recevoir la deuxième tranche de l’aide financière de l’accord conclu en juin. L’accord, rédigé par des experts du FMI, sera soumis à l’approbation du conseil d’administration du fonds au cours des prochaines semaines. Après validation, 1,6 milliard de dollars supplémentaires seront mis à la disposition de l’Egypte. Le conseil d’administration du Fonds monétaire international avait approuvé le 26 juin un programme d’un montant total de 5,2 milliards de dollars avec le décaissement immédiat de 2 milliards de dollars afin de faire face à l’impact de la pandémie du coronavirus. « L’économie égyptienne s’est montrée plus performante que prévu malgré la pandémie. Les mesures de confinement, soutenues par une gestion efficace de la crise par les autorités, ont contribué à atténuer les effets néfastes de la pandémie », lit-on dans le communiqué de presse de fin de mission du FMI, publié le 19 novembre.
Des progrès sur plusieurs volets
Les experts de l’institution internationale ont souligné que le gouvernement a progressé sur plusieurs volets comme les réserves internationales et le solde primaire qui ont dépassé les objectifs du programme. La baisse de l’inflation, la flexibilité des taux de change et la politique monétaire de la Banque Centrale ont entraîné la baisse des taux d’intérêt. « L’engagement des autorités et les bons résultats ont permis d’atteindre tous les objectifs du plan pour la fin septembre 2020 », a déclaré le communiqué du fonds qui s’est par ailleurs félicité du succès de la politique budgétaire : « La politique budgétaire de l’Egypte au cours de l’exercice 2020-21 reste centrée de manière appropriée sur le soutien des priorités immédiates en matière de santé, de la protection des plus vulnérables et l’encouragement des secteurs touchés par la pandémie. Le pays demeure en bonne voie pour atteindre un excédent primaire de 0,5 % du PIB ». Les experts du FMI ont pourtant souligné l’importance pour le gouvernement de s’engager à « revenir à un excédent primaire de 2 % du PIB ».
Le contrat avec le FMI est lié à des réformes structurelles que le gouvernement s’est engagé à entreprendre en ce qui concerne le système de taxation, l’encouragement de l’investissement privé et la concurrence dans les douze prochains mois. « Le gouvernement s’attèlera à réformer le système de taxation et à renforcer la capacité de ses organismes à collecter efficacement les taxes et les impôts plutôt que d’avoir un ratio sur les taxes sur le Produit Intérieur Brut (PIB) comme c’était le cas ces dernières années », explique Mona Bedeir. Elle ajoute que d’autres réformes envisagées sont destinées à encourager la concurrence, réduire les pratiques monopolistiques sur le marché égyptien, réformer les entreprises publiques et la reprise des appels d’offres initiaux en Bourse, interrompus par la pandémie.
Pour sa part, dans son récent rapport « Egypt economic monitor », la Banque mondiale a également salué les réformes entreprises par l’Egypte avant la crise du Covid-19. Le rapport a notamment loué les politiques de consolidation fiscale ayant permis de réduire le déficit budgétaire et, entre autres, l’ouverture au secteur privé de l’investissement dans le domaine de l’énergie. Cependant, la banque a souligné l’importance d’aborder les défis relatifs à l’économie égyptienne. L’activité relativement basse du secteur privé non pétrolier et la modestie des exportations du secteur ainsi que celle du flux des investissements directs étrangers doivent être corrigées. Le rapport souligne aussi l’importance de contrôler les dépenses publiques de sorte à réduire le service de la dette pour pouvoir augmenter l’investissement public, notamment dans l’éducation et la santé. « La structure des dépenses publiques est rigide depuis des décennies et ce n’est pas une situation que le gouvernement peut renverser sur le court terme. Déjà, les autorités ont adopté un programme de restructuration de la dette publique appuyé sur le service de la dette. Comme partout dans le monde, le Covid-19 a obligé l’administration égyptienne à avoir recours à l’endettement pour contrer les effets négatifs de la crise sanitaire », explique Mona Bedeir, ajoutant qu’une telle réforme ne peut être immédiate et devra être envisagée sur le moyen terme.
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