« L’Indice des Directeurs d’Achat (IDA) du secteur non pétrolier vient d’enregistrer une baisse en Egypte pour le 7e mois consécutif ». C’est ce que vient d’annoncer le groupe Markit HIS, responsable de la publication de l’indice, dans son rapport annuel. L’indice des directeurs d’achat mesure la performance du secteur privé non pétrolier. Il y a un recul des commandes pour les entreprises égyptiennes ainsi qu’une baisse de la production et des taux d’embauche. Le mois de février avait cependant connu une légère hausse de l’indice, pour se situer à 47,1 points, alors qu’il avait atteint son plus bas niveau depuis 3 ans en janvier avec 46 points. En général, un indice supérieur à 50 indique une expansion de l’activité de l’entreprise, alors qu’un indice inférieur à 50 traduit une contraction. Le rapport affirme que les entreprises non pétrolières ont limité leurs ventes et les embauches pendant le mois de février.
Deux facteurs expliquent cette baisse de l’indice. Le premier est d’ordre local et le second global.
« La dynamique du marché actuellement fait que la demande est faible, et ce, pour plusieurs raisons. D’une part, les ménages n’ont toujours pas retrouvé leur niveau d’avant le flottement et les entreprises ont des charges supplémentaires, notamment en ce qui concerne l’énergie. Elles ne peuvent pas étendre leurs activités, et donc le niveau d’embauche est en baisse », explique Mona Bédeir, économiste senior auprès de la banque d’investissement Prime. L’indice de l’embauche a enregistré sa chute la plus rapide depuis septembre 2017. « Ceci nous amène à croire que ce cercle vicieux va perdurer et ne prendra pas fin aussitôt », ajoute Mona Bédeir. Ce qui est positif, selon Phil Smith, un économiste senior du rapport, c’est que les entreprises tentent de briser ce cercle vicieux en diminuant les prix de la production.
L’effet sur les exportations est également visible. Elles ont connu un recul après une amélioration minime en août 2019.
Prévisions
Le second facteur déterminant dans cette crise, liée à la propagation du Covid-19 ou coronavirus, est la faiblesse de la demande extérieure. Selon Smith, la propagation du Covid-19 en Chine n’affecte pas seulement les exportations, mais affaiblit aussi le climat des affaires.
Dans une note publiée cette semaine, la banque d’investissement Prime affirme qu’il n’est pas prévisible que le secteur des exportations témoigne d’un rétablissement sur le court terme, vu les potentielles menaces dues au Covid-19. « La faiblesse de la consommation et le ralentissement des affaires associées à l’effet du Covid-19 sur les chaînes d’approvisionnement mondiales maintiendront une contraction des activités de l’IDA au cours du premier trimestre de 2020 », explique Mona Bédeir. Elle ajoute que les lectures du mois de février n’ont cependant pas capté tout l’effet du coronavirus et les chaînes mondiales d’approvisionnement encourent davantage de chocs. Les entreprises domestiques peuvent passer par des périodes de crise avec la carence des stocks et l’incapacité de trouver des approvisionnements alternatifs. Il est à noter que les exportations chinoises représentent 13,7 % des importations mondiales et environ 15,3 % des importations égyptiennes.
La note publiée par Prime affirme, dans son analyse, que ces chocs mondiaux compliqueront la situation du secteur non pétrolier en Egypte qui continue à souffrir des difficultés de l’après-flottement. Les prix des biens et services connaîtront des hausses considérables mais courtes si les turbulences persistent dans les chaînes globales d’approvisionnement et la livre égyptienne se trouve exposée à une dépréciation à cause de la sortie massive des capitaux. Ceci sera accompagné certes d’un déclin de la demande entraînant une récession.
« Un rétablissement total n’est pas prévisible sur le court terme. Tout dépend de la durée et de la magnitude de l’épidémie qui pourra interrompre l’assouplissement monétaire de la Banque Centrale d’Egypte (BCE). Dans ce cas, le soutien fiscal est l’unique option sur le court terme. Nous nous attendons à ce que le gouvernement réduise les coûts de l’énergie à l’adresse du secteur industriel lors du prochain réexamen des prix », ajoute Bédeir. Et de préciser que les facteurs saisonniers pourraient redresser en quelque sorte la situation accompagnés d’une demande accrue.
« Le gouvernement doit se tenir prêt et doit envisager différents scénarios, au cas où l’ombre de la crise continuerait de peser, afin d’éviter une intensification de l’impact sur les projections de croissance », affirme Mohamad Abou-Bacha, vice-directeur du département de la recherche auprès de la banque d’investissement EFG-Hermes.
Si la crise persiste, l’indice des directeurs d’achat ainsi que les sous-indicateurs relatifs aux différents secteurs qui en découlent devront être étudiés et analysés minutieusement.
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